Sur le premier moyen :
Vu les articles 555 et 564 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que l'évolution du litige permettant la mise en cause devant la cour d'appel d'une personne qui n'était pas partie en première instance ou qui y figurait en une autre qualité, exige l'existence d'un élément nouveau révélé par le jugement ou survenu postérieurement à celui-ci ;
Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué, que la société Vuillaume, devenue la société des Combustibles de l'Est, a commandé une certaine quantité de fioul à la société Elf France ; que le chauffeur de la société " Magasins généraux d'Epinal " (MGE), transporteur, n'a pas livré la marchandise à son destinataire, mais l'a dépotée sur l'aire de la société Arnould, dans la cuve de la société Carotel ; qu'un débordement s'est ultérieurement produit ; que la société Vuillaume n'ayant pas réglé la facture de la société Elf France, un tribunal de commerce a été saisi du litige opposant ces diverses parties ; que la société MGE a formé appel contre le jugement qui l'a condamnée à régler à la société Elf France le montant de la facture adressée à la société Vuillaume et a mis hors de cause la société Carotel ; que la société Elf France intimée a demandé à titre principal la confirmation du jugement et à titre subsidiaire la condamnation de la société Carotel qui avait été assignée en première instance par la société Arnould ; que la société Carotel a soutenu que cette demande formée pour la première fois contre elle en appel par la société Elf France n'était pas recevable ;
Attendu que pour déclarer la demande recevable et condamner la société Carotel à payer une certaine somme à la société Elf France, l'arrêt énonce que la société Carotel ne saurait s'opposer à cette demande nouvelle en raison de l'évolution du litige ;
Attendu cependant que la société Elf France disposait devant les juges du premier degré des éléments nécessaires pour apprécier l'opportunité de demander, fût ce à titre subsidiaire, la condamnation de la société Carotel ; qu'ainsi la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que l'arrêt a déclaré recevable la demande de la société Elf France contre la société Carotel et condamné celle-ci à lui payer la somme de soixante-treize mille huit cent quatre-vingt-huit francs soixante quatorze centimes (73 888,74 francs) avec intérêts, l'arrêt rendu le 2 mars 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy autrement composée.