COUR D'APPEL DE NÎMES CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre A ARRÊT DU 10 MAI 2011
ARRÊT N R. G. : 10/ 00674 CJ
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARPENTRAS 17 décembre 2009
X... B... X... X... X... C/ Y... Z...
APPELANTS : Monsieur Patrick X... né le 17 Mars 1950 à DUBLIN (IRLANDE) ...84200 CARPENTRAS représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoué à la Cour assisté de Me Jacques TARTANSON, avocat au barreau d'AVIGNON
Madame Marie-Jacqueline B... épouse X... née le 19 Février 1950 en ANGLETERRE ...84200 CARPENTRAS représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoué à la Cour assistée de Me Jacques TARTANSON, avocat au barreau d'AVIGNON
Monsieur Simon X... né le 05 Janvier 1979 à SEINE SAINT DENIS ...42660 ST GENEST MALIFAUX représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoué à la Cour assisté de Me Jacques TARTANSON, avocat au barreau d'AVIGNON
Monsieur Nathaniel X... né le 10 Juillet 1981 à SEINE SAINT DENIS ...84200 CARPENTRAS représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoué à la Cour assisté de Me Jacques TARTANSON, avocat au barreau d'AVIGNON
Monsieur Timothée X... né le 24 Septembre 1987 à CARPENTRAS (84200) ...84200 CARPENTRAS représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoué à la Cour assisté de Me Jacques TARTANSON, avocat au barreau d'AVIGNON
INTIMÉS : Monsieur Claude Y... né le 19 Mai 1951 à BEAUMES DE VENISE (84190) ... 84190 BEAUMES DE VENISE représenté par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour assisté de Me Michel ALLIO, avocat au barreau de TARASCON
Madame Sophie Z... épouse Y... née le 16 Août 1957 à NEUILLY SUR SEINE (92) ... 84190 BEAUMES DE VENISE représentée par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour assistée de Me Michel ALLIO, avocat au barreau de TARASCON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 11 Février 2011
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : M. Dominique BRUZY, Président, Mme Christine JEAN, Conseiller, M. Serge BERTHET, Conseiller,
GREFFIER : Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffier lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS : à l'audience publique du 08 Mars 2011, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Mai 2011. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au Greffe de la Cour d'Appel ;
ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Dominique BRUZY, Président, publiquement, le 10 Mai 2011, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au Greffe de la Cour.
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EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES Roland X..., âgé de 17 ans, invité à venir se baigner dans la piscine des époux Y... par les enfants de ceux-ci, est décédé à la suite d'une chute d'un muret de la propriété de ces derniers, qu'il escaladait pour atteindre, en montant sur une chaise pliante, la toiture de l'abri piscine de laquelle il plongeait ; ce jeune homme s'est empalé sur une tige de fer à béton plantée au milieu du bosquet situé au pied de ce muret. Monsieur et Madame X..., parents du défunt et leurs enfants majeurs, Simon, Nathaniel et Timothée, ont, par exploit du 12 novembre 2008, fait assigner les époux Y... pour les voir déclarer responsables, sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du Code Civil, en qualité de gardiens de la tige de fer et recevoir indemnisation au titre des souffrances endurées par leur fils avant son décès à hauteur de 20. 000 € ainsi que de leur préjudice moral à hauteur de 30. 000 € pour chacun des parents et de 25. 000 € pour chacun des frères. Par jugement en date du 17 décembre 2009, le Tribunal de Grande Instance de CARPENTRAS a débouté les consorts X... de leurs demandes et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile. Les consorts X... ont relevé appel de cette décision. Par écritures signifiées le 17 juin 2010, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, ils forment les demandes suivantes : " Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de CARPENTRAS le 17 Décembre 2009, Rejuger, Vu l'article 1384 alinéa 1er du Code Civil, Dire et juger que la responsabilité de Monsieur et Madame Y... est pleinement engagée en qualité de gardiens du fer à béton qui a été l'instrument du dommage à l'origine de la disparition de feu Rolland X..., En conséquence, condamner solidairement Monsieur et Madame Y... à verser :- aux appelants, en qualité d'ayants-droits de feu Rolland X..., la somme de 20. 000 € au titre des souffrances endurées,- à Madame X..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 30. 000 €,- à Monsieur X..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 30. 000 €,- à Monsieur Patrick X..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 25. 000 €,- à Monsieur Simon X..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 25. 000 €,- à Monsieur Nathaniel X..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 25. 000 €,- à Monsieur Timothée X..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 25. 000 €, Condamner Monsieur et Madame Y... à verser aux appelants la somme de 5. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens. " Monsieur et Madame Y... concluent à la confirmation du jugement déféré aux motifs que la chose inerte n'était pas en position anormale ni en mauvais état et que le comportement fautif de Roland X... a constitué la cause exclusive du dommage. Ils sollicitent l'allocation d'une somme de 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
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MOTIFS : Aux termes de l'article 1384 al 1er du Code Civil, " on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde ". En matière de fait des choses, l'application de ce texte est subordonnée à la preuve que la chose a été, en quelque manière et ne fût-ce que pour partie, l'instrument du dommage ; comme à bon droit énoncé par le Tribunal, une chose inerte ne peut être l'instrument du dommage que si la preuve est rapportée qu'elle occupait une position anormale ou qu'elle était en mauvais état. La charge de la preuve incombe à la victime. En l'espèce, la tige de fer sur laquelle la victime s'est empalée a été installée pour servir de tuteur à un arbuste au milieu duquel elle était implantée. Il résulte de l'enquête de Gendarmerie que la tige était rigide, enfoncée dans le sol de 20cm, laissant émerger 1, 06cm, d'une hauteur inférieure à celle de l'arbuste. Le Tribunal a pertinemment relevé que le seul fait de se servir de cette tige, rigide et de mêmes caractéristiques qu'un tuteur de jardin, comme tuteur d'un bosquet ne caractérise pas une position anormale. Il ressort des constatations des Gendarmes et des photographies prises dans le cadre de l'enquête pénale que la tige-tuteur se trouvait au milieu de cet arbuste depuis la plantation de celui-ci et n'occupait pas une place anormale ni dangereuse ; elle n'est donc pas l'instrument du dommage. Surabondamment, s'agissant de la cause d'exonération invoquée par les intimés consistant dans la faute de la victime âgée de 17 ans et demi et capable de discernement, la Cour relève qu'il ressort de l'enquête de Gendarmerie que Rolland X... s'amusait avec d'autres jeunes à escalader un muret sur lequel ils avaient placé une chaise en plastique pliante pour se hisser sur le toit de l'abri piscine d'où ils plongeaient. Le Tribunal a retenu à juste titre que ce comportement imprudent revêtait pour les gardiens de la tige métallique un caractère imprévisible et irrésistible dès lors qu'ils ne pouvaient prévoir ni empêcher que le muret servirait de support d'accès au toit de l'abri piscine ni que celui-ci serait utilisé comme plongeoir alors qu'il n'était pas acccesible à hauteur d'homme ni même en montant sur une chaise et qu'il n'a été atteint par la victime qu'après escalade du muret et utilisation d'une chaise placée sur le sommet de celui-ci ; si les enfants des époux Y... ont déclaré aux enquêteurs qu'ils avaient l'habitude de plonger du muret, ce fait est totalement différent de celui consistant à plonger du toit de l'abri piscine après être monté sur l'appareil de climatisation, puis avoir escaladé ce muret et s'être hissé sur une chaise pour accéder au toit du préau ; qu'au surplus, cette chaise pliante en plastique a été placée en équilibre sur le muret et la victime y est montée avec les pieds mouillés après avoir déjà plongé. Une telle imprudence extérieure aux gardiens ne pouvait être prévue ni empêchée par ces derniers, étant observé que tenant l'âge de la victime, à quelques mois de la majorité, et les circonstances de l'accident, il ne peut être fait reproche aux propriétaires des lieux de n'avoir pas exercé de surveillance. Le Tribunal a donc à bon droit débouté les consorts X... de l'ensemble de leurs demandes. Il n'y a pas lieu de faire application en la cause des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile. Les appelants supporteront les dépens.
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, Dit l'appel régulier et recevable en la forme, Confirme le jugement déféré, Dit n'y avoir lieu à application en la cause des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, Condamne les appelants aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP PERICCHI, avoués, sur leurs affirmations de droit, dans les formes et conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile. Arrêt signé par M. BRUZY, Président, et par Mme LAURENT-VICAL, Greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,