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10/11/2011 | FRANCE | N°10/04296

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 10 novembre 2011, 10/04296


R.G : 10/04296
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 10 Novembre 2011
Décision du tribunal de grande instance de LyonAu fond du 12 mai 2010

1ère chambre - section 2 - cabinet A -
RG :2008/09663
APPELANTE :
Laïla X...née en à ...69450 SAINT-CYR-AU-MONT-D'OR

représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Jérôme BERTRAND, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

ADMINISTRATION DES IMPOTS représentée par le Chef des Services fiscaux de la Direction du Contrôle fiscal Rhône-Alpes Bourgogne41, c

ours de la Liberté69422 LYON CEDEX 03

représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY ET LIGIER, avoués à la Cour
* * *...

R.G : 10/04296
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 10 Novembre 2011
Décision du tribunal de grande instance de LyonAu fond du 12 mai 2010

1ère chambre - section 2 - cabinet A -
RG :2008/09663
APPELANTE :
Laïla X...née en à ...69450 SAINT-CYR-AU-MONT-D'OR

représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Jérôme BERTRAND, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

ADMINISTRATION DES IMPOTS représentée par le Chef des Services fiscaux de la Direction du Contrôle fiscal Rhône-Alpes Bourgogne41, cours de la Liberté69422 LYON CEDEX 03

représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY ET LIGIER, avoués à la Cour
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 27 Mai 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 29 Septembre 2011
Date de mise à disposition : 27 Octobre 2011, prorogée au 10 Novembre 2011, les avoués dûment avisés conformément à l'article 450 dernier aliéna du code de procédure civile. Audience présidée par Philippe SEMERIVA, magistrat rapporteur, sans opposition des avoués dûment avisés, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :- Michel GAGET, président- François MARTIN, conseiller- Philippe SEMERIVA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire .
* * * * *EXPOSÉ DU LITIGE

M. et Mme X... ont, pour les années 2003, 2004 et 2005, fait figurer dans leurs déclarations relatives à l'impôt de solidarité sur la fortune des participations que M. X... détenait dans la SAS Omeris et la SELARL Ulis au titre de biens professionnels exonérés.

L'administration a remis en cause cette qualification et notifié un redressement.
M. X... est décédé le 12 décembre 2006.
Après mise en recouvrement des droits supplémentaires, Mme X... a demandé le dégrèvement et obtenu satisfaction partielle, mais l'administration fiscale a maintenu que ces participations ne pouvaient être considérées comme des biens professionnels exonérés, de sorte que Mme X... a agi en justice.
Le jugement entrepris l'a déboutée de ses demandes de dégrèvement aux motifs, essentiellement, que M. X... a poursuivi son activité libérale sous une autre forme et que ses activités de dirigeant des sociétés en cause, même si on les considère comme provenant d'activités connexes à son activité libérale, constituent moins de 50 % de l'ensemble de ses revenus professionnels.
*

Mme X... expose :

- qu'il convient d'examiner si la rémunération perçue en tant que loueur de clientèle rémunérait une véritable activité professionnelle,
- que tel n'est pas sauf le cas exceptionnel, où cette activité satisfait, par la fréquence et l'importance des diligences accomplies, aux critères généraux caractérisant l'activité professionnelle et son exercice à titre principal,
- qu'en l'espèce, Lahcen X... ne désirait plus exploiter personnellement sa clientèle d'infirmier libéral, du fait du développement de ses activités dans le domaine des maisons de retraite, de sorte qu'il en avait concédé la jouissance à la société Ulis, dont tous les infirmiers étaient associés et cogérants, qui l'exploitait à ses risques et profit, sans que lui-même assume aucune part dans la responsabilité en découlant ni n'effectue aucun acte infirmier, ce que le contrat de concession lui interdisait, d'ailleurs,
- qu'il ne se livrait donc à aucune activité professionnelle, qui ne s'est donc pas poursuivie sous une autre forme et que, contrairement à ce que soutient la partie adverse, les juridictions ne retiennent pas que le loueur exploite professionnellement la clientèle,
- qu'à supposer même le contraire, les activités des sociétés Omeris et Ulis étaient connexes et complémentaires, de sorte que la participation détenue dans la seconde constitue un bien professionnel exonéré, du moment que l'ensemble des revenus perçus représentait plus de la moitié des revenus professionnels de Lahcen X....
*

L'administration des impôts souligne que M. X... était adhérent de l'AGAPRO et soutient essentiellement,

- que la clientèle ne constitue pas, par nature, un élément susceptible d'être transféré dans le patrimoine personnel et ne cesse pas de faire partie de l'actif professionnel,
- que le Conseil d'Etat juge que la location, par un membre d'une profession libérale, de sa clientèle et des biens accessoires à son exploitation doit être regardée comme la poursuite de son activité commerciale sous une autre forme et qu'il a ainsi posé un principe général de continuation par le loueur de son activité,
- que les infirmiers co-gérants de la société Ulis effectuent leurs prestations principalement dans les maisons de retraite du réseau Omeris, contrôlé par M. X...,
- que dans la mesure où ce dernier fournissait la clientèle constituée de personnes dépendantes y résidant, il contribuait à la réalisation du chiffre d'affaires de cette société, sur la base duquel sa rémunération était calculée, et qu'il est donc nécessairement impliqué dans l'activité de cette dernière, même s'il n'exerçait plus sa profession d'infirmier,
- que s'ils disposaient juridiquement du même statut de co-gérants, les infirmiers en question étaient en fait dépendants de M. X..., toutes les transactions concernant les parts qu'ils pouvaient détenir devant transiter entre les mains de ce seul actionnaire qui soit en mesure de les céder, puis de les ré-acquérir, et que les achats étaient faits à prix coûtant.
Elle en conclut que M. X... exerçait ainsi une activité professionnelle, d'autant qu'il était rémunéré en fonction du chiffre d'affaires ; elle demande la confirmation du jugement.
* *

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. X... a fondé le réseau Omeris regroupant des maisons de retraite ; son épouse et lui-même possédaient l'ensemble des parts formant le capital de la SAS Omeris, société holding détenant des participations dans les sociétés gérant ces maisons de retraite, dont il était le président - directeur général, rémunéré à ce titre.

Il louait sa clientèle d'infirmier libéral à la SELARL Ulis ; il détenait environ 70 % du capital de cette société et en était co-gérant.

Il n'est pas contesté que deux des trois conditions cumulatives mises par l'article 885 O bis, 1o du code général des impôts à la qualification de biens professionnels sont remplies.

L'administration fiscale considère cependant que les rémunérations perçues des sociétés Omeris et Ulis représentent moins de la moitié du revenu à prendre en considération en pareil cas, ce qui conduit à examiner si les redevances de location de clientèle doivent être prises en compte au titre des revenus professionnels, et donc si l'activité M. X... a poursuivi son activité professionnelle au travers de la société Ulis.

Pour conclure par l'affirmative, l'administration soutient d'abord que la jurisprudence en matière d'impôt sur le revenu pose un principe général de poursuite de l'activité professionnelle "sous une autre forme".

Mais, en soi, cette solution établit seulement qu'en cas de location de clientèle il n'existe pas de plus-value taxable, faute de cession, et la décision citée aux conclusions en matière de taxe professionnelle n'est pas plus utile au débat ; adopté en matière d'impôt sur le revenu, un tel principe ne saurait être directement transposé dans le contentieux de l'ISF, et il faut, dans ce cadre, examiner la réalité de l'activité du redevable.
Il n'est pas prétendu, de ce point de vue, que M. X... exploitait lui-même la clientèle louée, mais que, sous couvert de la société Ulis, il poursuivait l'exercice d'une véritable activité professionnelle qui ne se limitait pas à la simple location de clientèle, quand bien même il n'exerçait plus sa profession d'infirmier.
Il ressort des éléments produits que tel était bien le cas en l'espèce.
L'adhésion à l'AGAPRO en est un premier indice pertinent, quoique insuffisant à lui seul.
Par ailleurs, M. X... ne se bornait pas à percevoir des redevances ; il procédait, puisqu'il était le seul à être en mesure de le faire, à la cession des parts aux nouveaux entrants, si du moins cette arrivée ne coïncidait pas avec le départ d'un associé, ce qui lui conférait un contrôle total des admissions.
En outre, sa rémunération dépendait du chiffre d'affaires réalisé par les membres de la société et il n'est pas contesté que la clientèle louée était principalement celle des maisons de retraite dépendant du groupe Omeris.
Il déployait donc dans le cadre de la société Ulis une activité propre tendant au développement de cette clientèle, qui conditionnait le niveau des redevances, en exploitant par ce biais la clientèle même qu'il donnait en location et dont il participait à la maîtrise dans le cadre de l'exploitation des maisons de retraite.
Ce faisant, et peu important la position adoptée par la CNAM quant à sa couverture sociale, il continuait bel et bien l'exercice de sa profession, sous une autre forme, en maîtrisant les éléments essentiels de l'exploitation de la clientèle louée et en se livrant à des actes et diligences personnels caractéristiques de l'exercice d'une profession.
Le recours à une location de clientèle libérale n'était donc qu'une modalité de son exploitation dans le cadre plus large d'une synergie avec l'activité des entreprises dans lesquelles la société Oméris détenait des parts.
Les revenus perçus en retour rémunéraient une activité professionnelle.
Il en résulte qu'ils devaient être pris en compte pour l'appréciation du seuil de 50 %, de sorte que les "salaires" déclarés au titre des sociétés Omeris n'atteignant pas ce seuil, les parts litigieuses ne constituaient pas des biens professionnels exonérés de l'ISF.

Certes, Mme X... soutient à juste raison, au regard de l'article 885 O bis, 2o du code général des impôts, que le redevable exerçant des fonctions de direction dans plusieurs sociétés dont il était également associé ou actionnaire et dont les activités étaient soit similaires, soit connexes et complémentaires, l'ensemble des rémunérations qu'il percevait doit être pris en compte pour apprécier si elles représentent plus de la moitié de ses revenus professionnels, et si, par voie de conséquence, les titres qu'il détenait dans ces sociétés constituaient un bien professionnel unique exonéré de la base d'imposition de l'ISF.

Mais en l'espèce, compte tenu du fait que les parts de la société Omeris ne sauraient être exonérées, les rémunérations en cause représentaient, selon les exercices considérés, entre 15,95 % et 22,6 % des revenus professionnels déclarés, de sorte que les dispositions relatives à l'existence d'un bien professionnel unique sont sans conséquence sur la situation et que les participations donnant lieu au litige ne peuvent être exonérées de l'ISF.

Le jugement entrepris doit être confirmé.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,
- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- Condamne Mme X... aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Ligier de Mauroy - Ligier, avoué.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Joëlle POITOUX Michel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 10/04296
Date de la décision : 10/11/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Analyses

Pourvoi n° K1210223 du 06 janvier 2012 (AROB)


Références :

ARRET du 15 janvier 2013, Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 15 janvier 2013, 12-10.223, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-11-10;10.04296 ?
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