Vu, enregistrée à son secrétariat le 9 septembre 2024, la requête présentée pour M. A... tendant à ce que le Tribunal, saisi par application de l'article 15 de la loi du 24 mai 1872 :
1° constate la contrariété existant entre l'ordonnance du 8 mars 2023 de la présidente désignée de la cour administrative d'appel de Bordeaux, devenue définitive, ayant rejeté sa requête aux fins de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, et des pénalités correspondantes, et le jugement du tribunal correctionnel de Bayonne du 27 février 2024, également définitif, l'ayant relaxé du chef de fraude fiscale facilitée par une domiciliation fiscale fictive à l'étranger au titre des années 2013 à 2015 ;
2° juge qu'il n'a pas la qualité de résident fiscal français au titre des années 2013 et 2014 ;
3° prononce la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, et des pénalités correspondantes ;
4° réforme les décisions de justice mentionnées en ce qu'elles ont de contraire à la décision à venir du Tribunal des conflits ;
5° mette à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
par les motifs que la requête satisfait aux conditions de recevabilité fixées par l'article 15 de la loi du 24 mai 1872, l'ordonnance de la cour administrative d'appel de Bordeaux et le jugement du tribunal correctionnel de Pau, devenus irrévocables, portant sur le même objet et conduisant, en raison de leur contrariété sur son domicile fiscal, à un déni de justice ;
Vu, enregistré à son secrétariat le 30 novembre 2024, le mémoire du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie concluant à titre principal au rejet de la requête, subsidiairement ce que soit reconnue à M. A... la qualité de résident fiscal français pour les années 2013 et 2014, et à ce que M. A... verse à l'Etat une somme de 3000 euros au titre de du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, notamment son article 75 ;
Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Boulouis, membre du Tribunal,
- les observations de Me Katia Guermonprez-Tanner pour M. A...,
- les observations de la SCP Foussard-Froger pour le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie,
- les conclusions de M. Jean Lecaroz ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 15 de la loi du 24 mai 1872 : " Le Tribunal des conflits peut être saisi des décisions définitives rendues par les juridictions administratives et judiciaires dans les instances introduites devant les deux ordres de juridiction, pour des litiges portant sur le même objet, lorsqu'elles présentent une contrariété conduisant à un déni de justice. / Sur les litiges qui lui sont ainsi déférés, le Tribunal des conflits juge au fond, à l'égard de toutes les parties en cause. Ses décisions ne sont susceptibles d'aucun recours ". En vertu de ces dispositions, les décisions définitives des tribunaux administratifs et des tribunaux judiciaires ne peuvent être déférées au Tribunal des conflits, au motif qu'elles présenteraient une contrariété conduisant à un déni de justice, que si elles ont été rendues dans des litiges portant sur le même objet.
2. M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, et des pénalités correspondantes. Par un jugement du 14 avril 2022, le tribunal administratif s'est notamment fondé, pour rejeter leur demande, sur ce qu'ils avaient, pour les années en cause, leur domicile fiscal en France. Par une ordonnance du 8 mars 2023, devenue irrévocable à la suite de la non-admission du pourvoi en cassation qu'ils avaient formé contre elle, la présidente désignée de la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté leur appel contre ce jugement. Par un jugement du 27 février 2024, devenu définitif à la suite du désistement, constaté par ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Pau du 10 juillet 2024, des appels principal et incident, respectivement du ministère public et de la direction départementale des finances publiques, le tribunal correctionnel de Bayonne a relaxé des fins de la poursuite M. A..., prévenu de fraude fiscale réalisée ou facilitée par une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l'étranger du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, au motif que son domicile fiscal n'était pas en France.
3. Il résulte de ce qui précède que les décisions rendues par les juridictions des deux ordres, alors même qu'elles ont tranché la même question, ne portaient pas sur le même objet. Les conditions auxquelles les dispositions de l'article 15 de la loi du 24 mai 1872 subordonnent l'ouverture de la voie de recours qu'elles instituent ne sont ainsi pas réunies. Dès lors, les conclusions de M. A... tendant notamment à ce que le Tribunal des conflits prononce la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, et des pénalités correspondantes ne sont pas recevables. Il s'ensuit que la requête doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'Etat au même titre.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Etat au titre du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.