Vu, enregistrée à son secrétariat le 19 octobre 2020, l'expédition du jugement du 16 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice, saisi par les sociétés Fayat Bâtiment et Pro-Fond, co-traitantes d'un marché de travaux publics, d'un litige par lequel elles recherchent leurs responsabilités respectives dans les préjudices qu'elles ont subis à raison d'un retard dans l'exécution des travaux, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 32 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;
Vu l'ordonnance du 3 mars 2017 par laquelle le tribunal de grande instance de Nice s'est déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;
Vu, enregistré à son secrétariat le 14 janvier 2021, le mémoire présenté par la SCP Gadiou, Chevallier pour la société Fayat Bâtiment, tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente par le motif que le litige oppose deux sociétés de droit privé liées par un contrat de droit privé.
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à la société Pro-Fond, à la SA Fondasol, à la société ERG Géotechnique, à la société Artelia Bâtiment, à la société Expertise, à la Mutuelle des architectes français, à la société SAS Sol Essais, à la compagnie AXA France IARD, à la SAS Norisko Construction (DEKRA), à la société HDI- Gerling Industrie Allgemeine Versicherung AG, à la SAS Pinto, à la SARL Atelier Barani et au ministre de l'économie, des finances et de la relance, qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu la loi n° 91-641 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. A... B..., membre du Tribunal,
- les conclusions de M. Paul Chaumont, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Le 16 juin 2010, le centre hospitalier universitaire de Nice a conclu un marché de " terrassement, fondations spéciales, gros oeuvres et maçonnerie " avec le groupement d'entreprises constitué des sociétés Cari, devenue Fayat Bâtiment, et Pro-Fond, dans le cadre de la construction d'un centre de recherche et de traitement de la maladie d'Alzheimer à Nice. En raison de dommages causés aux bâtiments voisins, l'exécution de ce marché a été interrompue du 18 avril au 31 mai 2011. Compte tenu du préjudice résultant de cette interruption des travaux, la société Pro-Fond a recherché devant le juge judiciaire la responsabilité des autres constructeurs pour obtenir réparation de ses propres préjudices, tout en demandant à être dégagée, en ce qui la concerne, de toute responsabilité. Par ordonnance du 3 mars 2017, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Nice a rejeté ces demandes. Saisi par la société Fayat Bâtiment de conclusions dirigées contre les autres constructeurs, au nombre desquels son co-traitant la société Pro-Fond, pour obtenir la réparation du préjudice subi à raison du retard dans l'exécution des travaux, mais également de conclusions similaires de la société Pro-Fond contre d'autres constructeurs, dont la société Fayat Bâtiment, le tribunal administratif de Nice a, par un jugement du 16 octobre 2020, estimé que les conclusions de la société Pro-Fond tendant à la condamnation de la société Fayat Bâtiment, à laquelle elle était liée par un contrat de droit privé, ainsi que les conclusions de la société Fayat Bâtiment dirigées contre la société Pro-Fond, présentées en dehors de tout litige les opposant au maître de l'ouvrage, ne relevaient pas de la compétence de la juridiction administrative. Compte tenu de l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Nice, devenue définitive, du 3 mars 2017 déclinant la compétence du juge judiciaire pour connaître de ces conclusions, le tribunal administratif a, par un jugement du 16 octobre 2020, sursis à statuer et renvoyé au Tribunal le soin de décider sur la question de compétence en application de l'article 32 du décret du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles.
2. Le litige né de l'exécution d'un marché de travaux publics et opposant des participants à l'exécution de ces travaux relève de la compétence de la juridiction administrative, sauf si les parties sont unies par un contrat de droit privé.
3. Les sociétés Fayat Bâtiment et Pro-Fond, membres d'un même groupement titulaire d'un marché de travaux publics, ont l'une et l'autre poursuivi la responsabilité quasi-délictuelle de leur co-traitant et présenté des conclusions tendant à la condamnation de celui-ci à réparer le préjudice qu'elles estiment avoir subi à raison de fautes qu'il a commises au cours de l'exécution du contrat conclu avec le maître de l'ouvrage. Alors même que les deux co-traitants sont par ailleurs liés par un contrat de droit privé, un tel litige, qui ne concerne pas l'exécution de ce contrat de droit privé et qui implique que soient appréciées les conditions dans lesquelles un contrat portant sur la réalisation de travaux publics a été exécuté, relève de la juridiction administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La juridiction administrative est compétente pour connaître du litige opposant les sociétés Fayat-Bâtiment et Pro-Fond.
Article 2 : Le jugement rendu par le tribunal administratif de Nice le 16 octobre 2020 est déclaré nul et non avenu en tant qu'il statue sur les conclusions de la société Fayat Bâtiment dirigées contre la société Pro-Fond et sur les conclusions de la société Pro-Fond dirigées contre la société Fayat Bâtiment. La cause et les parties sont renvoyées dans cette mesure devant ce tribunal.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Fayat Bâtiment, à la société Pro-Fond, à la SA Fondasol, à la société ERG Géotechnique, à la société Artelia Bâtiment, à la société Expertise, à la Mutuelle des architectes français, à la société SAS Sol Essais, à la compagnie AXA France IARD, à la SAS Norisko Construction (DEKRA), à la société HDI- Gerling Industrie Allgemeine Versicherung AG, à la SAS Pinto, à la SARL Atelier Barani et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.