Vu, enregistrée à son secrétariat le 10 juillet 2015, la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. et Mme A...à la commune de Biarritz devant la cour d'appel de Pau ;
Vu le déclinatoire de compétence adressé le 30 octobre 2014 au procureur général près la cour d'appel de Pau par le préfet des Pyrénées-Atlantiques tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente pour connaître du litige par les motifs que les travaux de confortement de la falaise engagés par la commune, à l'origine de l'expropriation, avaient pour but de prévenir les éboulements et, secondairement, d'aménager une promenade publique, que ces travaux revêtent le caractère de travaux publics, quand bien même ils seraient effectués sur le domaine privé de la commune dès lors qu'ils répondent à un but d'intérêt général et que la dépréciation de la propriété de M. et Mme A...a pour cause directe et immédiate l'effondrement d'une voie publique située en surplomb de la falaise et donc d'un défaut d'entretien du domaine public constitué par l'assiette de cette voie et son sous-sol ;
Vu l'arrêt du 30 mars 2015 par lequel la cour d'appel de Pau a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la commune de Biarritz ;
Vu l'arrêté du 30 avril 2015 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a élevé le conflit ;
Vu, enregistré le 1er septembre 2015, le mémoire présenté pour la commune de Biarritz tendant à la confirmation de l'arrêté de conflit et à la condamnation de M. et Mme A...au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 par les motifs que la demande de M. et Mme A...est fondée sur l'absence ou l'insuffisance des travaux publics que la commune aurait dû réaliser sur la falaise et que le préjudice de M. et Mme A...est imputable à l'effondrement d'une voie publique située entre la villa de l'Ermitage et le bord de la falaise ;
Vu, enregistré le 11 septembre 2015, le mémoire présenté par la SCP Lyon-Caen, Thiriez pour M. et Mme A...tendant, à titre principal, à l'irrégularité de la procédure de conflit, et, à titre subsidiaire, à l'annulation de l'arrêté de conflit par les motifs que l'arrêt du 30 mars 2015 est passée en force de chose jugée et que le préfet n'est pas recevable à mettre en oeuvre une procédure de conflit et, qu'en toute hypothèse, le litige est dépourvu d'objet, la décision sur la compétence étant définitive ; ils font, par ailleurs, valoir que la responsabilité de la commune est recherchée en sa qualité de gardienne de la falaise appartenant à son domaine privé et qu'il n'allègue pas que leur préjudice résulterait de l'exécution de travaux publics pas plus qu'ils ne mettent en cause la voie publique ou son tréfonds ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée au ministre de l'intérieur qui n'a pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015, notamment son article 50 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yves Maunand , membre du Tribunal,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié pour la Commune de Biarritz,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
Considérant que M. et Mme A...étaient propriétaires d'un lot de copropriété dans la villa de l'Ermitage jouxtant la falaise de la côte des Basques à Biarritz dépendant du domaine privé de la commune ; qu'estimant que l'indemnité qui leur avait été accordée à la suite de l'expropriation de leur lot avait été insuffisante au regard de l'état de dégradation de cette falaise imputée à la commune de Biarritz (la commune), M. et Mme A...ont assigné celle-ci devant le tribunal de grande instance de Bayonne sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil en paiement d'une indemnité réparant la perte de valeur de leur bien entre son acquisition et la date de l'expropriation ; que le préfet des Pyrénées-Atlantiques a adressé le 30 octobre 2014 un déclinatoire de compétence au procureur général que celui-ci a omis de transmettre à la cour d'appel de Pau qui avait été saisie de l'appel formé par la commune contre l'ordonnance du juge de la mise en état ayant rejeté son exception d'incompétence ; que, par arrêt du 30 mars 2015, la cour d'appel a confirmé cette ordonnance ;
Sur la régularité de la procédure de conflit :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de l'ordonnance du 1er juin 1828 : " ... le conflit pourra être élevé en cause d'appel s'il ne l'a pas été en première instance ... " ; que le conflit a, en l'espèce, été élevé pour la première fois devant la cour d'appel de Pau, ainsi que le permettent ces dispositions ;
Considérant, en second lieu, que le déclinatoire de compétence présenté le 30 octobre 2014 par le préfet des Pyrénées-Atlantiques a été remis au procureur général près la cour d'appel de Pau ; que c'est à la suite d'une erreur que la cour d'appel n'a pas statué sur ce déclinatoire tout en se prononçant sur sa compétence ; que cette irrégularité qui n'est pas imputable à l'administration n'affecte pas l'arrêté de conflit qui est recevable dès lors que le juge judiciaire a implicitement mais nécessairement rejeté le déclinatoire de compétence le 30 mars 2015 ;
Sur la compétence :
Considérant que M. et MmeA..., qui ne prétendent pas que la réalisation ou l'absence de réalisation d'un travail public serait la cause du préjudice qu'ils allèguent ni que celui-ci résulterait de l'effondrement d'une voie publique, recherchent la responsabilité de la commune en sa qualité de gardienne de la falaise dans la dépréciation de leur bien résultant du risque d'effondrement, antérieur à la procédure d'expropriation, dont l'immeuble était affecté ; que la responsabilité pouvant incomber à une commune dans la gestion de son domaine privé ne saurait être appréciée que par les juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que le préfet a élevé le conflit ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Biarritz au titre des dispositions de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 30 avril 2015 par le préfet des Pyrénées-Atlantiques est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Biarritz au titre des dispositions de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et MmeA..., à la commune de Biarritz et au ministre de l'intérieur.