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13/04/2015 | FRANCE | N°C3996

France | France, Tribunal des conflits, 13 avril 2015, C3996


Vu, enregistrée à son secrétariat le 25 novembre 2014, l'expédition du jugement du 20 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Rennes, saisi d'une requête des époux A...contre la société Orange France, devenue société Orange, par lequel ce tribunal a renvoyé au Tribunal des conflits, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié par le décret du 25 juillet 1960, le soin de décider de la question de compétence pour statuer sur la demande de réparation d'un trouble anormal de voisinage résultant de l'implantation d'une antenne de téléphonie

mobile à proximité de leur propriété ;

Vu, enregistré le 29 déce...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 25 novembre 2014, l'expédition du jugement du 20 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Rennes, saisi d'une requête des époux A...contre la société Orange France, devenue société Orange, par lequel ce tribunal a renvoyé au Tribunal des conflits, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié par le décret du 25 juillet 1960, le soin de décider de la question de compétence pour statuer sur la demande de réparation d'un trouble anormal de voisinage résultant de l'implantation d'une antenne de téléphonie mobile à proximité de leur propriété ;

Vu, enregistré le 29 décembre 2014, le mémoire présenté pour les épouxA..., qui conclut à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente pour connaître du litige, par les motifs que leur demande est exclusivement indemnitaire et dirigée contre une personne privée ;

Vu le mémoire de la société Orange concluant à la compétence du juge administratif pour le tout, par le motif que le trouble prétendu proviendrait d'un ouvrage accessoire à un ouvrage public, et demandant l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, aux époux A...et à la société Orange ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, notamment le III de son article 13 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015, notamment son article 50 ;

Vu les articles L. 32-1, L. 42-1 et L. 43 du code des postes et communications électroniques, L. 2124-6 et L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thierry Fossier, membre du Tribunal,

- les observations de Me B...pour M. et MmeA...,

- les observations de la SCP Tiffreau, Marlange, de La Burgade pour la société Orange,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison du I de l'article L. 32-1 du code des postes et communications électroniques, des articles L. 42-1 et L 43 du même code et des articles L. 2124-26 et L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques, que le législateur a organisé une police spéciale des communications électroniques confiée à l'Etat ; qu'afin d'assurer sur l'ensemble du territoire national et conformément au droit de l'Union européenne, d'une part, un niveau élevé et uniforme de protection de la santé publique contre les effets des ondes électromagnétiques émises par les réseaux de communications électroniques, qui sont identiques sur tout le territoire, d'autre part, un fonctionnement optimal de ces réseaux, notamment par une couverture complète de ce territoire, le législateur a confié aux seules autorités publiques qu'il a désignées le soin de déterminer et contrôler les conditions d'utilisation des fréquences ou bandes de fréquences et les modalités d'implantation des stations radioélectriques sur l'ensemble du territoire ainsi que les mesures de protection du public contre les effets des ondes qu'elles émettent et contre les brouillages préjudiciables ;

Considérant que, par suite, l'action tendant, quel qu'en soit le fondement, à obtenir l'interruption de l'émission, l'interdiction de l'implantation, l'enlèvement ou le déplacement d'une station radioélectrique régulièrement autorisée et implantée sur une propriété privée ou sur le domaine public, au motif que son fonctionnement serait susceptible de compromettre la santé des personnes vivant dans le voisinage ou de provoquer des brouillages implique, en raison de son objet même, une immixtion dans l'exercice de la police spéciale dévolue aux autorités publiques compétentes en la matière ; que, nonobstant le fait que les titulaires d'autorisations soient des personnes morales de droit privé et ne soient pas chargés d'une mission de service public, il n'appartient qu'au juge administratif, par application du principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires, de connaître d'une telle action ;

Considérant, en revanche, que le juge judiciaire est compétent, sous réserve d'une éventuelle question préjudicielle, pour connaître des litiges opposant un opérateur de communications électroniques à des usagers ou à des tiers, d'une part, aux fins d'indemnisation des dommages, de toute nature, causés par l'implantation ou le fonctionnement d'une station radioélectrique sauf si elle a le caractère d'un ouvrage public, d'autre part, aux fins de faire cesser les troubles anormaux de voisinage liés à une implantation irrégulière ou un fonctionnement non conforme aux prescriptions administratives ou à la preuve de nuisances et inconvénients anormaux autres que ceux afférents à la protection de la santé publique et aux brouillages préjudiciables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci dessus que la juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître de l'action engagée par les époux A...contre la société Orange, en tant que le dispositif des conclusions des demandeurs tend exclusivement au versement par ladite société de dommages intérêts à raison des pertes financières occasionnées et du risque créé pour la santé desdits demandeurs, par le fonctionnement d'une antenne de téléphonie mobile qui lui appartient et qui n'a pas le caractère d'un ouvrage public ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant les époux A...à la société Orange en tant qu'il porte sur les conséquences dommageables du fonctionnement d'une antenne de téléphonie mobile appartenant à ladite société.

Article 2 : L'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Créteil en date du 23 mai 2011 est déclarée nulle et non avenue en tant qu'elle porte sur la partie du litige mentionnée à l'article 1er. La cause et les parties sont renvoyées, dans cette mesure, devant ce tribunal pour qu'il soit statué sur cette demande.

Article 3 : La présente décision sera notifiée aux épouxA..., à la société Orange, au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3996
Date de la décision : 13/04/2015
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Thierry Fossier
Rapporteur public ?: M. Dacosta

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2015:C3996
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