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02/04/2012 | FRANCE | N°C3831

France | France, Tribunal des conflits, 02 avril 2012, C3831


Vu, enregistrée à son secrétariat le 28 juin 2011, l'expédition de la décision du 24 juin 2011 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi du pourvoi de la société ATEXO tendant à l'annulation de l'ordonnance du 25 février 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, lui-même saisi après que le juge des référés du tribunal de grande instance de cette ville avait, par une ordonnance du 7 février 2011, décliné la compétence de la juridiction judiciaire, et statuant en application de l'article L.551-1 du code de justice admini

strative, a rejeté sa demande aux fins d'annulation de la procédure ...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 28 juin 2011, l'expédition de la décision du 24 juin 2011 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi du pourvoi de la société ATEXO tendant à l'annulation de l'ordonnance du 25 février 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, lui-même saisi après que le juge des référés du tribunal de grande instance de cette ville avait, par une ordonnance du 7 février 2011, décliné la compétence de la juridiction judiciaire, et statuant en application de l'article L.551-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande aux fins d'annulation de la procédure engagée par l'association "Marchés publics d'Aquitaine" (AMPA) pour la passation d'un accord-cadre portant sur l'exploitation, l'hébergement, la maintenance et l'évolution des fonctionnalités d'un logiciel de gestion des procédures de marché des adhérents de l'association, a renvoyé au Tribunal, en application de l'article 35 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu, enregistré le 7 octobre 2011, le mémoire présenté pour la société ATEXO, qui conclut à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, par les motifs que le contrat ne saurait être qualifié d'administratif au regard de son objet qui porte sur la simple exploitation et l'hébergement d'un logiciel, que l'AMPA ne peut être regardée comme le mandataire d'une ou plusieurs personnes publiques, et qu'elle n'est pas une association transparente ;

Vu, enregistré le 24 octobre 2011, le mémoire présenté pour l'AMPA, qui conclut à la compétence des juridictions de l'ordre administratif, par les motifs que l'accord-cadre contesté est un contrat administratif, que l'association est composée majoritairement de personnes publiques, que son financement incombe presque exclusivement à des personnes publiques et que l'accord-cadre contesté a pour objet l'exécution d'une mission de service

public ;

Vu, enregistré le 2 novembre 2011, le mémoire du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, par les motifs que l'AMPA ne saurait être regardée comme un groupement de commandes ou le coordonnateur d'un tel groupement au sens de l'article 8 du code des marchés publics, que cette association, dotée la personnalité juridique, est distincte de chacun de ses membres, et qu'elle ne peut être qualifié d'association transparente ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de procédure civile ;

Vu la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ;

Vu l'ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 ;

Vu l'ordonnance n°2009-515 du 7 mai 2009 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Guirimand, membre du Tribunal,

- les observations de Maître Foussard, pour la Société Atexo,

- les observations de la SCP Odent-Poulet, pour Association Marchés publics d'Aquitaine (Ampa),

- les conclusions de M. Pierre Collin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société ATEXO, éditeur de logiciels dédiés aux personnes publiques, a, sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, saisi le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à l'annulation de la procédure engagée au moyen d'un avis d'appel public à la concurrence publié le 3 décembre 2010, en vue de la conclusion d'un accord-cadre portant sur l'exploitation, l'évolution des fonctionnalités et l'hébergement d'un logiciel de gestion, par l'association "Marchés publics d'Aquitaine" (AMPA), dont l'objet est de mettre en place et mutualiser une plate-forme de dématérialisation des procédures de passation des marchés publics intéressant ses adhérents ;

Considérant que si l'association "Marchés publics d'Aquitaine" a été créée à l'initiative de la région Aquitaine, de la communauté urbaine de Bordeaux et de la commune de Floirac et si elle rassemble plus de trois cents personnes publiques qui lui procurent ensemble l'essentiel de ses ressources par leurs cotisations destinées à couvrir ses dépenses de fonctionnement et leurs participations aux frais relatifs au site dématérialisé de gestion des procédures de passation des marchés et par leurs subventions éventuelles, aucun des membres de cette association, qui regroupe également des personnes privées, n'en contrôle, seul ou conjointement avec d'autres personnes publiques, l'organisation et le fonctionnement ni ne lui procure l'essentiel de ses ressources ; que cette association, qui est un organisme adjudicateur régi par les dispositions de l'ordonnance du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, est dotée d'une personnalité morale distincte de celle de chacun de ses membres et ne saurait être regardée à leur égard, au sens de l'article 8 du code des marchés publics, ni comme un groupement de commandes susceptible de conclure un marché, ni comme le coordonnateur d'un tel

groupement ;

Considérant, par ailleurs, que l'objet exclusif de l'association est de répondre aux besoins de ses membres et qu'elle n'a pas reçu de leur part mandat pour conduire la procédure de mise en concurrence et conclure des accords-cadres ;

Que, par suite, la contestation relative à la procédure engagée pour la conclusion d'un accord-cadre de fournitures courantes et services, qui oppose deux personnes morales de droit privé, relève de la compétence du juge judiciaire ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la société ATEXO à l'association "Marchés publics d'Aquitaine".

Article 2 : L'ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de Bordeaux du

7 février 2011 est déclarée nulle et non avenue ; la cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3831
Date de la décision : 02/04/2012
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ASSOCIATIONS ET FONDATIONS - QUESTIONS COMMUNES - ASSOCIATION TRANSPARENTE - ABSENCE - ASSOCIATION REGROUPANT NOTAMMENT PLUS DE 300 PERSONNES PUBLIQUES - COMPTE TENU DE SON ORGANISATION - DE SON FONCTIONNEMENT ET DE SON MODE DE FINANCEMENT [RJ1].

10-01 Une association créée à l'initiative de trois collectivités publiques et regroupant notamment plus de 300 personnes publiques qui lui procurent ensemble l'essentiel de ses ressources n'est pas transparente dès lors qu'aucun des membres de cette association, qui regroupe également des personnes privées, n'en contrôle l'organisation et le fonctionnement seul ou conjointement avec d'autres personnes publiques ni ne procure à lui seul à cette association l'essentiel de ses ressources.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - CONTRATS - CONTRATS DE DROIT PRIVÉ - CONTRATS CONCLUS ENTRE PERSONNES PRIVÉES - PROCÉDURE POUR LA CONCLUSION D'UN ACCORD-CADRE ENGAGÉ PAR UNE ASSOCIATION REGROUPANT NOTAMMENT PLUS DE 300 PERSONNES PUBLIQUES - ASSOCIATION TRANSPARENTE [RJ1] - ABSENCE - CONSÉQUENCE - COMPÉTENCE JUDICIAIRE.

17-03-02-03-01-01 Une association créée à l'initiative de trois collectivités publiques et regroupant notamment plus de 300 personnes publiques qui lui procurent ensemble l'essentiel de ses ressources n'est pas transparente dès lors qu'aucun des membres de cette association, qui regroupe également des personnes privées, n'en contrôle l'organisation et le fonctionnement seul ou conjointement avec d'autres personnes publiques ni ne procure à lui seul à cette association l'essentiel de ses ressources. Par suite et en l'absence de mandat reçu par l'association de la part des personnes publiques qui la composent, la juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige relatif à la procédure de passation par cette association d'un accord-cadre avec une personne privée.

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - NATURE DU CONTRAT - CONTRATS N'AYANT PAS UN CARACTÈRE ADMINISTRATIF - CONTRATS PASSÉS ENTRE PERSONNES PRIVÉES - PROCÉDURE POUR LA CONCLUSION D'UN ACCORD-CADRE ENGAGÉ PAR UNE ASSOCIATION REGROUPANT NOTAMMENT PLUS DE 300 PERSONNES PUBLIQUES [RJ1].

39-01-02-02-05 Une association créée à l'initiative de trois collectivités publiques et regroupant notamment plus de 300 personnes publiques qui lui procurent ensemble l'essentiel de ses ressources n'est pas transparente dès lors qu'aucun des membres de cette association, qui regroupe également des personnes privées, n'en contrôle l'organisation et le fonctionnement seul ou conjointement avec d'autres personnes publiques ni ne procure à lui seul à cette association l'essentiel de ses ressources. Par suite et en l'absence de mandat reçu par l'association de la part des personnes publiques qui la composent, la juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige relatif à la procédure de passation par cette association d'un accord-cadre avec une personne privée.


Références :

[RJ1]

Cf., sur la notion d'association transparente, CE, 5 décembre 2005, Département de la Dordogne, n° 259748, p. 552 ;

CE, 21 mars 2007, Commune de Boulogne-Billancourt, n° 281796, p. 130.


Composition du Tribunal
Président : M. Gallet
Rapporteur ?: Mme Dominique Guirimand
Rapporteur public ?: M. Collin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2012:C3831
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