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02/05/2011 | FRANCE | N°C3770

France | France, Tribunal des conflits, 02 mai 2011, C3770


Vu, enregistrée à son secrétariat le 15 mars 2010, l'expédition du jugement du 9 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen, saisi d'une demande de la Société industrielle d'équipements urbains dirigée contre la société Frameto et la commune de Ouistreham et tendant, d'une part, à ce qu'il leur soit fait interdiction de détenir, proposer à la vente, distribuer, exposer, reproduire, vendre toute barrière ou potelet constituant la contrefaçon de ses modèles et, d'autre part, à la condamnation de la société Frameto et de la commune de Ouistreham à l'indemniser du p

réjudice subi en raison d'actes de contrefaçon, a renvoyé au Tribun...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 15 mars 2010, l'expédition du jugement du 9 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen, saisi d'une demande de la Société industrielle d'équipements urbains dirigée contre la société Frameto et la commune de Ouistreham et tendant, d'une part, à ce qu'il leur soit fait interdiction de détenir, proposer à la vente, distribuer, exposer, reproduire, vendre toute barrière ou potelet constituant la contrefaçon de ses modèles et, d'autre part, à la condamnation de la société Frameto et de la commune de Ouistreham à l'indemniser du préjudice subi en raison d'actes de contrefaçon, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'arrêt du 12 mars 2009 par lequel la cour d'appel de Caen a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Caen du 18 avril 2007 qui s'était déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;

Vu les pièces dont il résulte que la saisine du Tribunal a été communiquée aux partiesB, qui n'ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 ;

Vu le code de la propriété intellectuelle, notamment son article L. 521-3-1 ;

Vu la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, notamment ses articles 3 et 7 ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, notamment son article 135 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jacques Arrighi de Casanova, membre du Tribunal,

- les conclusions de M. Jean-Dominique Sarcelet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la Société industrielle d'équipements urbains, estimant que des barrières et potelets installés par la commune de Ouistreham sur des dépendances de la voirie, et qui avaient été fournis par la société Frameto, l'avaient été en méconnaissance de ses droits résultant de l'enregistrement par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle d'un modèle de barrière, a fait assigner devant le tribunal de commerce de Caen la commune et la société Frameto, en vue de leur faire interdire de fabriquer, faire fabriquer, importer, détenir, proposer à la vente, distribuer, exposer, reproduire, vendre toute barrière ou potelet constituant la contrefaçon du modèle qu'elle avait déposé, et de les faire condamner à l'indemniser du préjudice résultant des actes de contrefaçon qu'elle leur imputait ; qu'après confirmation, par la cour d'appel de Caen, du jugement d'incompétence rendu par le tribunal de commerce de Caen, la Société industrielle d'équipements urbains a porté son action devant le tribunal administratif de Caen, qui a décliné la compétence de la juridiction administrative ;

En ce qui concerne les conclusions tendant à la condamnation de la société Frameto :

Considérant que, si les barrières et potelets litigieux ont été fournis par la société Frameto en exécution d'un marché public, cette circonstance est sans incidence sur la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître d'une action en contrefaçon opposant une personne privée à une autre ; que par suite, les conclusions de la Société industrielle d'équipements urbains dirigées contre la société Frameto ressortissent à la compétence de la juridiction judiciaire ;

En ce qui concerne les conclusions tendant à la condamnation de la commune de Ouistreham :

Considérant que, si la responsabilité qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est en principe soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative, il résulte de l'article L. 521-3-1 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel Les actions civiles et les demandes relatives aux dessins et modèles sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance, y compris lorsqu'elles portent à la fois sur une question de dessins et modèles et sur une question connexe de concurrence déloyale , que le législateur a entendu, par dérogation aux principes gouvernant la responsabilité des personnes publiques, faire relever de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire la recherche de la responsabilité des personnes morales de droit public en raison d'une contrefaçon de dessins et modèles qui leur serait imputée ; que, par suite, la mise en jeu de la responsabilité de la commune de Ouistreham en raison des fautes qu'elle aurait commises en installant, sur une dépendance de la voire communale, des barrières et potelets en méconnaissance des droits que la Société industrielle d'équipements urbains détiendrait sur un modèle de barrière ressortit également à la compétence de la juridiction judiciaire ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la Société industrielle d'équipements urbains à la société Frameto et à la commune de Ouistreham.

Article 2 : L'arrêt de la cour d'appel de Caen du 12 mars 2009 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant cette juridiction.

Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Caen est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu le 9 mars 2010 par ce tribunal.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3770
Date de la décision : 02/05/2011
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR DES TEXTES SPÉCIAUX - ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - AUTRES CAS D'ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - ACTIONS EN CONTREFAÇON DE DESSINS ET MODÈLES (ART - L - 521-3-1 DU CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE) - APPLICATION À L'ACTION EXERCÉE À RAISON DE PRESTATIONS D'UN MARCHÉ PUBLIC.

17-03-01-02-05 Si la responsabilité qui peut incomber aux personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est en principe soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative, il résulte de l'article L. 521-3-1 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel « Les actions civiles et les demandes relatives aux dessins et modèles sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance, y compris lorsqu'elles portent à la fois sur une question de dessins et modèles et sur une question connexe de concurrence déloyale », que le législateur a entendu, par dérogation aux principes gouvernant la responsabilité des personnes publiques, faire relever de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire la recherche de la responsabilité des personnes morales de droit public en raison d'une contrefaçon de dessins et modèles qui leur serait imputée. Par suite, ressortit à la compétence de la juridiction judiciaire la mise en jeu de la responsabilité d'une commune en raison des fautes qu'elle aurait commises en installant, sur une dépendance de la voirie communale, des barrières et potelets en méconnaissance des droits que détiendrait sur un modèle de barrière une autre société que celle titulaire du marché public passé pour l'implantation de ces équipements.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - DROIT DE PROPRIÉTÉ - PROPRIÉTÉ LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE - DESSINS ET MODÈLES - ACTION EN CONTREFAÇON DIRIGÉE CONTRE UNE PERSONNE PUBLIQUE - COMPÉTENCE JURIDICTIONNELLE - COMPÉTENCE JUDICIAIRE.

26-04-03 Si la responsabilité qui peut incomber aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est en principe soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative, il résulte de l'article L. 521-3-1 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel « Les actions civiles et les demandes relatives aux dessins et modèles sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance, y compris lorsqu'elles portent à la fois sur une question de dessins et modèles et sur une question connexe de concurrence déloyale », que le législateur a entendu, par dérogation aux principes gouvernant la responsabilité des personnes publiques, faire relever de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire la recherche de la responsabilité des personnes morales de droit public en raison d'une contrefaçon de dessins et modèles qui leur serait imputée. Par suite, ressortit à la compétence de la juridiction judiciaire la mise en jeu de la responsabilité d'une commune en raison des fautes qu'elle aurait commises en installant, sur une dépendance de la voirie communale, des barrières et potelets en méconnaissance des droits que détiendrait sur un modèle de barrière une autre société que celle titulaire du marché passé pour l'implantation de ces équipements.


Composition du Tribunal
Président : M. Gallet
Rapporteur ?: M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur public ?: M. Sarcelet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2011:C3770
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