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02/05/2011 | FRANCE | N°C3766

France | France, Tribunal des conflits, 02 mai 2011, C3766


Vu, enregistrée à son secrétariat le 7 janvier 2010, l'expédition de la décision du 28 décembre 2009 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de la requête de la Société Europe Finance et Industrie (EFI) tendant à la condamnation de l'Autorité des marchés financiers (AMF) à lui verser la somme de 15 millions d'euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des retards apportés par la Commission des opérations de bourse, puis par cette Autorité, à l'instruction de ses

demandes de visa présentées en vue de l'inscription de sociétés en bou...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 7 janvier 2010, l'expédition de la décision du 28 décembre 2009 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de la requête de la Société Europe Finance et Industrie (EFI) tendant à la condamnation de l'Autorité des marchés financiers (AMF) à lui verser la somme de 15 millions d'euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des retards apportés par la Commission des opérations de bourse, puis par cette Autorité, à l'instruction de ses demandes de visa présentées en vue de l'inscription de sociétés en bourse, a renvoyé au Tribunal, en application des articles 34 et 35 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider de la question de compétence ;

Vu la décision du 16 janvier 2007, passée en force de chose jugée, par laquelle la cour d'appel de Paris, saisie de la demande de la Société Europe Finance et Industrie (EFI), s'est déclarée incompétente aux motifs qu'il résulte des dispositions de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, dans leur rédaction issue de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, que le législateur a entendu donner compétence aux juridictions de l'ordre administratif pour connaître de toute contestation opposant l'Autorité des marchés financiers à l'une des personnes ou entités mentionnées au II de l'article L. 621-9 dudit code, y compris les demandes d'indemnisation du préjudice causé par les dysfonctionnements imputés à cet organisme ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à la Société Europe Finance et Industrie (EFI), à l'Autorité des marchés financiers, à la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, qui n'ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié, notamment ses articles 34 et 35 ;

Vu le code monétaire et financier ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Guirimand, membre du Tribunal,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la responsabilité qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative ; qu'il n'en va autrement que si la loi, par une disposition expresse, a dérogé à ce principe ;

Considérant que, si l'article L. 621-30 du code monétaire et financier réserve à l'autorité judiciaire compétence pour connaître des recours formés contre les décisions individuelles de l'Autorité des marchés financiers autres que celles relatives aux personnes et entités mentionnées au II de l'article L. 621-9 du même code, et si, par suite, il en va de même pour les actions tendant à la réparation des conséquences dommageables nées de telles décisions, en revanche, les actions mettant en cause le fonctionnement défectueux des services de cette autorité publique relèvent de la compétence de la juridiction administrative ;

Considérant que la Société Europe Finance et Industrie (EFI), prestataire de services d'investissement agréé, sollicite l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des conditions fautives dans lesquelles, au cours des années 2002 à 2004, la Commission des opérations de bourse, puis l'Autorité des marchés financiers, auraient instruit les demandes de visa des documents d'information du public qu'elle lui avait présentées, en application des dispositions du code monétaire et financier, pour plusieurs sociétés clientes souhaitant avoir accès au marché boursier ; qu'ainsi, le litige qui l'oppose à l'Autorité des marchés financiers, étranger à toute décision individuelle que celle-ci aurait prise, concerne l'exécution par cette autorité de sa mission de service public administratif ; que, dès lors, ce litige relève de la juridiction administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La juridiction de l'ordre administratif est compétente pour connaître du litige opposant la Société Europe Finance et Industrie (EFI) et l'Autorité des marchés financiers.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3766
Date de la décision : 02/05/2011
Type d'affaire : Administrative

Analyses

CAPITAUX - MONNAIE - BANQUES - CAPITAUX - OPÉRATIONS DE BOURSE - AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS - RESPONSABILITÉ À RAISON DE SON FONCTIONNEMENT - COMPÉTENCE JURIDICTIONNELLE - COMPÉTENCE ADMINISTRATIVE [RJ1].

13-01-02-01 La responsabilité qui peut incomber aux personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève de la juridiction administrative sauf si la loi a expressément dérogé à ce principe. Si l'article L. 621-30 du code monétaire et financier réserve à l'autorité judiciaire compétence pour connaître des recours formés contre les décisions individuelles de l'Autorité des marchés financiers (AMF) autres que celles relatives aux personnes et entités mentionnées au II de l'article L. 621-9 du même code, et si, par suite, il en va de même pour les actions tendant à la réparation des conséquences dommageables nées de telles décisions, en revanche, les actions mettant en cause le fonctionnement défectueux des services de cette autorité publique relèvent de la compétence de la juridiction administrative. Ressortit donc à la compétence de la juridiction administrative l'action indemnitaire d'un prestataire agréé de services d'investissements dirigée contre l'AMF pour obtenir réparation du préjudice que lui aurait causé l'instruction par cette autorité de demandes de visa de documents d'information du public présentées pour certaines sociétés clientes de ce prestataire en vue d'un accès au marché boursier.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR DES TEXTES SPÉCIAUX - ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - AUTRES CAS D'ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - RECOURS CONTRE LES DÉCISIONS INDIVIDUELLES DE L'AMF AUTRES QUE CELLES RELATIVES AUX PERSONNES ET ENTITÉS MENTIONNÉES AU II DE L'ARTICLE L - 621-9 DU CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER (ART - L - 621-30 DU MÊME CODE) - ETENDUE - ACTIONS EN RESPONSABILITÉ À RAISON DU FONCTIONNEMENT DE L'AMF - EXCLUSION.

17-03-01-02-05 La responsabilité qui peut incomber aux personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève de la juridiction administrative sauf si la loi a expressément dérogé à ce principe. Si l'article L. 621-30 du code monétaire et financier réserve à l'autorité judiciaire compétence pour connaître des recours formés contre les décisions individuelles de l'Autorité des marchés financiers (AMF) autres que celles relatives aux personnes et entités mentionnées au II de l'article L. 621-9 du même code, et si, par suite, il en va de même pour les actions tendant à la réparation des conséquences dommageables nées de telles décisions, en revanche, les actions mettant en cause le fonctionnement défectueux des services de cette autorité publique relèvent de la compétence de la juridiction administrative. Ressortit donc à la compétence de la juridiction administrative l'action indemnitaire d'un prestataire agréé de services d'investissements dirigée contre l'AMF pour obtenir réparation du préjudice que lui aurait causé l'instruction par cette autorité de demandes de visa de documents d'information du public présentées pour certaines sociétés clientes de ce prestataire en vue d'un accès au marché boursier.


Références :

[RJ1]

Comp., lorsque l'action en responsabilité est exercée à raison de l'illégalité de la décision prise, TC, 22 juin 1992, Me Mizon, n° 02671, p. 486.


Composition du Tribunal
Président : M. Gallet
Rapporteur ?: Mme Dominique Guirimand
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2011:C3766
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