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22/11/2010 | FRANCE | N°C3746

France | France, Tribunal des conflits, 22 novembre 2010, C3746


Vu, enregistrée à son secrétariat le 22 juin 2009, l'expédition du jugement du 17 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Lille, saisi d'une demande de Mme A tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le proviseur du lycée professionnel Jacques Durand de Saint Omer (62505) a rejeté ses demandes indemnitaires et à la condamnation de cet établissement à lui payer les sommes de 983,30 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, de 23 743,20 euros à titre de dommages-intérêts à raison de son licenciement sans c

ause réelle et sérieuse, de 1918,60 euros au titre de l'indemnité ...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 22 juin 2009, l'expédition du jugement du 17 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Lille, saisi d'une demande de Mme A tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le proviseur du lycée professionnel Jacques Durand de Saint Omer (62505) a rejeté ses demandes indemnitaires et à la condamnation de cet établissement à lui payer les sommes de 983,30 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, de 23 743,20 euros à titre de dommages-intérêts à raison de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 1918,60 euros au titre de l'indemnité de préavis, de 197,86 euros au titre des congés payés y afférents, et de 989,30 euros au titre d'indemnité de licenciement, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'arrêt du 10 mars 2006 par lequel la cour d'appel de Douai a déclaré requalifier en contrat à durée indéterminée les contrats de travail de Mme A et, pour le surplus, renvoyé cette dernière à mieux se pourvoir ;

Vu, enregistré le 31 juillet 2009, le mémoire présenté par le ministre de l'éducation nationale qui conclut à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire par le motif que les litiges relatifs au contrat "emploi-solidarité" ou au contrat "emploi consolidé" relèvent de ces juridictions, même si l'employeur est une personne publique gérant un service public à caractère administratif, et que, lorsque la personne bénéficiaire d'un tel contrat, qui a été requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, se borne à demander l'indemnisation du préjudice que lui a causé la rupture de son contrat de travail, la juridiction administrative n'est pas compétente ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à Mme A et au lycée professionnel Jacques Durand, qui n'ont pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code du travail ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Guirimand, membre du Tribunal,

- les conclusions de M. Pierre Collin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le lycée professionnel Monsigny, devenu le lycée professionnel Jacques Durand, a engagé Mme A pour assurer des fonctions d'aide secrétaire ou d'aide au standard par contrats "emploi-solidarité" conclus pour la période comprise entre le 1er juillet 1999 et le 30 septembre 2001, puis, à compter du 1er octobre 2001 et jusqu'au 4 octobre 2004, par contrats "emploi consolidé" à durée déterminée ; que Mme A a, le 26 octobre 2004, saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Omer aux fins de requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée ou de paiement de diverses indemnités ; que cette juridiction a fait droit à la demande ; que sur recours du lycée professionnel Jacques Durand, la cour d'appel de Douai a requalifié en contrat de travail à durée indéterminée les contrats de travail de Mme A, en retenant que le lycée professionnel Jacques Durand avait méconnu ses obligations relatives à la formation et à l'orientation professionnelle de l'intéressée, et, pour le surplus, a renvoyé cette dernière à mieux se pourvoir ; que le litige ayant été porté devant le tribunal administratif de Lille, cette juridiction a saisi le Tribunal de la question de compétence ;

Considérant que, selon les dispositions des articles L.322-4-8 et L.322-4-8-1 du code du travail, alors en vigueur, les contrats "emploi- solidarité" et "emploi consolidé" sont des contrats de travail de droit privé, à durée déterminée ou indéterminée ; qu'en conséquence, les litiges nés à propos de la conclusion, de l'exécution, de la rupture ou de l'échéance de ces contrats relèvent en principe de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

Considérant toutefois que, d'une part, dans le cas où la contestation met en cause la légalité de la convention passée entre l'Etat et l'employeur, la juridiction administrative est seule compétente pour se prononcer sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; que, d'autre part, le juge administratif est également seul compétent pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci, n'entre, en réalité, pas dans le champ des catégories d'emploi, d'employeurs ou de salariés visés à l'article L.322-4-7 du code du travail, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence, non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat, mais la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire ;

Considérant que les demandes présentées à titre indemnitaire par Mme A sont relatives à la rupture des contrats "emploi-solidarité" ou "emploi consolidé" passés avec le lycée professionnel Jacques Durand qui n'ont pas été conclus en méconnaissance des dispositions des articles L.322-4-7 et L.322-4-8-1 du code du travail, s'agissant des catégories d'emplois, d'employeurs ou de salariés qu'elles visent ; que le litige relève en conséquence de la compétence du juge judiciaire ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant Mme A au lycée professionnel Jacques Durand.

Article 2 : L'arrêt de la cour d'appel de Douai en date du 10 mars 2006 est annulé en ce qu'il a renvoyé Mme A à mieux se pourvoir. La cause et les parties sont renvoyées devant cette cour.

Article 3 : La procédure suivie devant la juridiction administrative est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement du tribunal administratif de Lille en date du 17 juin 2009.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3746
Date de la décision : 22/11/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Dominique Guirimand
Rapporteur public ?: M. Collin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2010:C3746
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