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02/06/2008 | FRANCE | N°C3619

France | France, Tribunal des conflits, 02 juin 2008, C3619


Vu, enregistrée à son secrétariat le 7 novembre 2006, la requête présentée pour Mme Halima A, demeurant 25, rue de Giromagny, à Belfort (90000), tendant à ce que le Tribunal, en application de l'article 17 du décret du 26 octobre 1849 modifié, détermine l'ordre de juridiction compétent pour statuer sur sa demande tendant à la condamnation de la société nationale des chemins de fer (SNCF) à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi du fait du décès accidentel de son fils M. Djilali Dergam, renversé par un train express régional le 5 février 1999, alors qu'il traversait la v

oie ferrée sur le territoire de la commune de Belfort ;

à la suite d...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 7 novembre 2006, la requête présentée pour Mme Halima A, demeurant 25, rue de Giromagny, à Belfort (90000), tendant à ce que le Tribunal, en application de l'article 17 du décret du 26 octobre 1849 modifié, détermine l'ordre de juridiction compétent pour statuer sur sa demande tendant à la condamnation de la société nationale des chemins de fer (SNCF) à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi du fait du décès accidentel de son fils M. Djilali Dergam, renversé par un train express régional le 5 février 1999, alors qu'il traversait la voie ferrée sur le territoire de la commune de Belfort ;

à la suite du conflit négatif résultant de ce que :

1°) par une ordonnance du 29 mai 2002, le tribunal administratif de Besançon a déclaré la juridiction administrative incompétente pour connaître de sa demande ;

2°) par un arrêt du 21 septembre 2005, la cour d'appel de Besançon a déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître du même litige ;

elle soutient que les trois conditions exigées par l'article 17 du décret du 28 octobre 1849 sont réunies ;

Vu l'ordonnance et l'arrêt précités ;

Vu enregistré le 9 janvier 2008, le mémoire présenté pour la SNCF et tendant à ce que le Tribunal des conflits déclare nulle et non avenue l'ordonnance du 29 mai 2002 du tribunal administratif de Besançon ; la SNCF soutient que M. Djilali Dergam était usager de l'ouvrage public sans être usager du service public industriel et commercial de la SNCF et que son action se fondait non pas sur la loi du 31 décembre 1957 mais sur le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ; qu'en outre les trains, dans la mesure où ils circulent en site propre, ne sont pas des véhicules au sens de la loi du 31 décembre 1957 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Serge Daël, membre du Tribunal ;

- les observations de la SCP Boutet, avocat de Mme Halima A, et de Me Odent, avocat de la société nationale des chemins de fer (SNCF) ;

- les conclusions de M. Jean-Dominique Sarcelet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Djilali Dergam est décédé après avoir été heurté le 5 février 1999 à Belfort par le train express régional reliant Vesoul à Belfort, alors qu'il franchissait la voie ferrée sans être bénéficiaire d'une prestation de transport de la SNCF ; qu'estimant que le décès de son fils avait pour cause déterminante le défaut d'entretien normal des grillages de protection de cette voie, prévus pour en interdire l'accès, défaut qui seul lui avait permis d'y pénétrer irrégulièrement, Mme Halima A a saisi le tribunal administratif de Besançon d'une demande tendant, sur le fondement du défaut d'entretien normal de l'ouvrage public, à l'indemnisation de son préjudice propre ; que, par une ordonnance du 29 mai 2002, le tribunal administratif de Besançon, se fondant sur les dispositions de la loi du 31 décembre 1957, a rejeté cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que par un arrêt du 21 septembre 2005 la cour d'appel de Besançon, infirmant le jugement du 20 mai 2003 du tribunal de grande instance de Belfort, a décliné la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour statuer sur la demande présentée par Mme Halima A sur le même fondement, au motif que relève de la compétence des juridictions de l'ordre administratif l'indemnisation des conséquences dommageables des accidents survenus dans les emprises de la SNCF à des usagers non autorisés de l'ouvrage public ne bénéficiant pas d'une prestation assurée aux usagers du service ferroviaire ;

Considérant que si l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 s'applique aux dommages qui sont le fait d'un véhicule appartenant à la SNCF ou placé sous sa garde, tel un train, et à ceux qui sont imputables à l'un de ses agents chargé de conduire ce train ou associé à sa conduite, cette disposition n'a pas pour objet, et ne saurait avoir pour effet, de déroger aux règles normales de compétence applicables aux actions en responsabilité engagées sur un fondement autre que celui qui est seul visé par cette disposition ; que l'action en responsabilité exercée par Mme Dergam à l'encontre de la SNCF est fondée sur le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public constitué par la voie ferrée à l'égard de laquelle son fils avait la qualité d'usager non autorisé ; qu'il en résulte que le litige relève de la compétence de la juridiction administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction de l'ordre administratif est compétente pour connaître du litige opposant Mme Halima A à la SNCF.

.

Article 2 : L'ordonnance en date du 29 mai 2002 du tribunal administratif de Besançon par laquelle cette juridiction a décliné sa compétence est déclarée nulle et non avenue en tant seulement qu'elle statue sur la demande de Mme Halima A.

Article 3 : La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.

Délibéré dans la séance du 5 mai 2008 où siégeaient : M. Philippe Martin, Vice-Président du Tribunal des conflits, Président ; M. Jean-Marie Delarue, M. Serge Daël, M. Philippe Bélaval, M. Jean-Louis Gallet, Mme Dominique Guirimand, M. Pierre Bailly, Mme Ingall-Montagnier, membres du Tribunal.

Lu en séance publique le 2 juin 2008

Le Président :

Signé : M. Philippe Martin

Le rapporteur :

Signé : M. Serge Daël

Le secrétaire :

Signé : Mme Claire James

Certifié conforme,

Le secrétaire


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3619
Date de la décision : 02/06/2008
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - TRAVAUX PUBLICS - DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - A) ARTICLE 1ER DE LA LOI DU 31 DÉCEMBRE 1957 - PORTÉE - ARTICLE N'AYANT NI POUR OBJET NI POUR EFFET DE DÉROGER AUX RÈGLES NORMALES DE RÉPARTITION DES COMPÉTENCES APPLICABLES AUX ACTIONS EN RESPONSABILITÉ [RJ2] - B) DÉFAUT D'ENTRETIEN NORMAL D'UN OUVRAGE PUBLIC CONSTITUÉ PAR LA VOIE FERRÉE - TIERS À L'OUVRAGE - ACTION EN RESPONSABILITÉ - COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE [RJ1].

17-03-02-06-01 a) Si l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 s'applique aux dommages qui sont le fait d'un véhicule appartenant à la SNCF ou placé sous sa garde, tel un train, et à ceux qui sont imputables à l'un de ses agents chargé de conduire ce train ou associé à sa conduite, cette disposition n'a pas pour objet, et ne saurait avoir pour effet, de déroger aux règles normales des compétences applicables aux actions en responsabilité engagées sur un fondement autre que celui qui est seul visé par cette disposition.... ...b) L'action en responsabilité exercée à l'encontre de la SNCF, fondée sur le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public constitué par la voie ferrée à l'égard duquel le requérant avait la qualité d'usager non autorisé, relève de la compétence de la juridiction administrative.

TRAVAUX PUBLICS - DIFFÉRENTES CATÉGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES SUR LES VOIES PUBLIQUES TERRESTRES - DÉFAUT D'ENTRETIEN NORMAL - DÉFAUT D'ENTRETIEN NORMAL D'UN OUVRAGE PUBLIC CONSTITUÉ PAR LA VOIE FERRÉE - TIERS À L'OUVRAGE - ACTION EN RESPONSABILITÉ - COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE [RJ1].

67-03-01-02 L'action en responsabilité exercée à l'encontre de la SNCF, fondée sur le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public constitué par la voie ferrée à l'égard de laquelle le requérant avait la qualité d'usager non autorisé, relève de la compétence de la juridiction administrative.


Références :

[RJ1]

Rappr. 26 mars 1990, Jaffré, n° 02593., ,

[RJ2]

Cf. 2 décembre 1991, Préfet de la Haute-Loire, n° 02680 ;

12 février 2001, Commune de Courdimanche, n° 03243 ;

20 juin 2005, Mme Dufraisse c/ OPAC d'Indre-et-Loire et autres, n° 3445.


Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Serge Daël
Rapporteur public ?: M. Sarcelet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2008:C3619
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