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26/06/2006 | FRANCE | N°C3508

France | France, Tribunal des conflits, 26 juin 2006, C3508


Vu, enregistrée à son secrétariat le 21 novembre 2005, l'expédition du jugement du 10 novembre 2005 par lequel le tribunal administratif de Dijon, saisi de la demande de Mme Christiane A tendant à la condamnation de la commune de Chaulgnes à lui payer diverses indemnités de licenciement à la suite de la cessation du contrat de travail conclu avec l'association pour l'exploitation du restaurant scolaire et transféré à la dite commune ensuite de la mise en liquidation judiciaire de l'association, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 ajouté au décret du 26 octobre

1849, le soin de décider sur la question de compétence;

Vu ...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 21 novembre 2005, l'expédition du jugement du 10 novembre 2005 par lequel le tribunal administratif de Dijon, saisi de la demande de Mme Christiane A tendant à la condamnation de la commune de Chaulgnes à lui payer diverses indemnités de licenciement à la suite de la cessation du contrat de travail conclu avec l'association pour l'exploitation du restaurant scolaire et transféré à la dite commune ensuite de la mise en liquidation judiciaire de l'association, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 ajouté au décret du 26 octobre 1849, le soin de décider sur la question de compétence;

Vu le jugement du 3 février 2004 par lequel le conseil de prud'hommes de Nevers s'est déclaré incompétent pour connaître du litige;

Vu, enregistrées le 23 mai 2006, les observations du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, tendant à la compétence judiciaire, par les motifs que Mme A est restée dans un régime contractuel de droit privé, dès lors que postérieurement à la mise en liquidation judiciaire de l'association, elle a expressément refusé, le 17 décembre 2002, la proposition d'intégration dans les services communaux faite par le maire de Chaulgnes le 9 décembre précédent;

Vu, enregistrées le 25 mars 2004, les observations présentées par le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, tendant à ce que la juridiction judiciaire soit reconnue compétente ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à la commune de Chaulgnes et à Mme A, qui n'ont pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code du travail, notamment en son article L 122-12 ;

Vu la directive du Conseil des communautés européennes n° 2001/23/CE ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Guirimand , membre du Tribunal,

- les conclusions de M. Jacques-Henri Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du code du travail, s'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ;

Considérant que si les dispositions précitées, interprétées au regard de la directive n° 2001/23/CEE du Conseil du 12 mars 2001, imposent le maintien des contrats de travail en cours, y compris dans le cas où l'entité économique transférée constitue un service public administratif dont la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public, elles n'ont pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats de travail en cause, qui demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public ; que lorsqu'un salarié refuse de signer le contrat de droit public qui lui est proposé, le litige relatif aux conséquences de ce refus relève de la compétence judiciaire, dès lors que ledit salarié n'a jamais été lié au nouvel employeur public par un rapport de droit public ;

Considérant que l'association assurant l'activité de restauration de l'école de la commune de Chaulgnes ayant été mise en liquidation judiciaire le 5 septembre 2002, la commune a repris la gestion de la cantine scolaire en régie directe ; que l'inspecteur du travail n'a pas accordé au liquidateur l'autorisation de procéder au licenciement de Mme A, salariée de ladite association en qualité d'aide-cuisinière ; que cette dernière a ensuite refusé un contrat de droit public proposé par la commune ;

Considérant que Mme A, dont le contrat de travail initial, conclu avec une association, personne morale de droit privé, a été transféré à la commune de Chaulgnes en application de l'article L 122-12 du code du travail, n'a pas été placée dans un régime de droit public ; que dans ces conditions, le litige qui oppose cette commune à Mme A, quant aux conséquences de ce que cette dernière analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente en ce qui concerne le litige opposant Mme A à la commune de Chaulgnes.

Article 2 : Le jugement du conseil de prud'hommes de Nevers en date du 3 février 2004 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.

Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Dijon est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 10 novembre 2005.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3508
Date de la décision : 26/06/2006
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - PERSONNEL - AGENTS DE DROIT PRIVÉ - PERSONNEL D'UNE ENTITÉ ÉCONOMIQUE DONT L'ACTIVITÉ EST REPRISE PAR UNE PERSONNE MORALE DE DROIT PUBLIC (ART - L - 122-12 DU CODE DU TRAVAIL) - A) MAINTIEN DES CONTRATS DE TRAVAIL DE DROIT PRIVÉ TANT QUE LES SALARIÉS N'ONT PAS ÉTÉ PLACÉS DANS UN RÉGIME DE DROIT PUBLIC [RJ1] - B) CONSÉQUENCE - COMPÉTENCE DU JUGE JUDICIAIRE POUR CONNAÎTRE D'UN REFUS D'UN SALARIÉ TRANSFÉRÉ DE SIGNER LE CONTRAT DE DROIT PUBLIC QUI LUI EST PROPOSÉ [RJ2].

17-03-02-04-02 a) Si les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail, interprétées au regard de la directive n° 2001/23/CEE du Conseil du 12 mars 2001, imposent le maintien des contrats de travail en cours, y compris dans le cas où l'entité économique transférée d'un employeur à un autre constitue un service public administratif dont la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public, elles n'ont pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats de travail en cause, qui demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public.,,b) Lorsqu'un salarié refuse de signer le contrat de droit public qui lui est proposé, le litige relatif aux conséquences de ce refus relève de la compétence judiciaire, dès lors que ledit salarié n'a jamais été lié au nouvel employeur public par un rapport de droit public.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CHANGEMENT DE CADRES - RECLASSEMENTS - INTÉGRATIONS - INTÉGRATION DE PERSONNELS N'APPARTENANT PAS ANTÉRIEUREMENT À LA FONCTION PUBLIQUE - PERSONNEL D'UNE ENTITÉ ÉCONOMIQUE DONT L'ACTIVITÉ EST REPRISE PAR UNE PERSONNE MORALE DE DROIT PUBLIC (ART - L - 122-12 DU CODE DU TRAVAIL) - A) MAINTIEN DES CONTRATS DE TRAVAIL DE DROIT PRIVÉ TANT QUE LES SALARIÉS N'ONT PAS ÉTÉ PLACÉS DANS UN RÉGIME DE DROIT PUBLIC [RJ1] - B) CONSÉQUENCE - COMPÉTENCE DU JUGE JUDICIAIRE POUR CONNAÎTRE D'UN REFUS D'UN SALARIÉ TRANSFÉRÉ DE SIGNER LE CONTRAT DE DROIT PUBLIC QUI LUI EST PROPOSÉ [RJ2].

36-04-04 a) Si les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail, interprétées au regard de la directive n° 2001/23/CEE du Conseil du 12 mars 2001, imposent le maintien des contrats de travail en cours, y compris dans le cas où l'entité économique transférée d'un employeur à un autre constitue un service public administratif dont la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public, elles n'ont pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats de travail en cause, qui demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public.,,b) Lorsqu'un salarié refuse de signer le contrat de droit public qui lui est proposé, le litige relatif aux conséquences de ce refus relève de la compétence judiciaire, dès lors que ledit salarié n'a jamais été lié au nouvel employeur public par un rapport de droit public.


Références :

[RJ1]

Cf. TC, 19 janvier 2004, Mme Devun et autres c/ Commune de Saint-Chamond, n°3393, p. 509.,,

[RJ2]

Cf. TC, 29 décembre 2004, Mme Durand c/ Centre hospitalier régional de Metz-Thionville, p. 524.


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars
Rapporteur ?: Mme Dominique Guirimand
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2006:C3508
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