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24/03/2003 | FRANCE | N°C3338

France | France, Tribunal des conflits, 24 mars 2003, C3338


Vu, enregistrée à son secrétariat le 15 juillet 2002, l'expédition de l'arrêt du 10 juillet 2002 par lequel la Cour de cassation, chambre sociale, saisie du pourvoi formé par le SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC et M. Jean X contre la Fédération des Syndicats solidaires, unitaires, démocratiques (SUD) des PTT, la société France Télécom, la Fédération unifiée CFDT des Postes et Télécom, la Fédération CFTC des Postes et télécommunications, la Fédération syndicaliste FO des travailleurs des Postes et Télécom, la Fédération nationale des travailleurs et

travailleuses des PTT, tendant à l'annulation de l'ordonnance par laquelle...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 15 juillet 2002, l'expédition de l'arrêt du 10 juillet 2002 par lequel la Cour de cassation, chambre sociale, saisie du pourvoi formé par le SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC et M. Jean X contre la Fédération des Syndicats solidaires, unitaires, démocratiques (SUD) des PTT, la société France Télécom, la Fédération unifiée CFDT des Postes et Télécom, la Fédération CFTC des Postes et télécommunications, la Fédération syndicaliste FO des travailleurs des Postes et Télécom, la Fédération nationale des travailleurs et travailleuses des PTT, tendant à l'annulation de l'ordonnance par laquelle le tribunal d'instance du 15ème arrondissement de Paris, saisi d'une contestation relative à l'organisation des élections des représentants du personnel au conseil d'administration de France Télécom, a décliné sa compétence au profit de la juridiction administrative, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu, enregistré le 17 octobre 2002, le mémoire présenté pour M. X, le SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC, le syndicat national des contractuels de France Télécom (SNC) et le syndicat national des Télécommunications (SNT) tendant à ce que la juridiction de l'ordre judiciaire soit déclarée compétente par les motifs que l'élection des représentants du personnel au conseil d'administration d'une entreprise relève par nature de la compétence du juge judiciaire ; qu'une telle élection, dans une entreprise dont le capital est majoritairement détenu par l'Etat, n'implique l'exercice d'aucune prérogative de puissance publique et relève d'un acte de gestion et non pas d'un acte d'autorité publique ; que la loi du 26 juillet 1996 transformant France Télécom en société anonyme a constitué un changement de droit qui fait obstacle à ce que la compétence du juge administratif puisse être aujourd'hui retenue ; et concluant à ce que la partie perdante soit condamnée à verser, à chacun d'eux, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

Vu, enregistré le 23 octobre 2002, le mémoire présenté pour la société France Télécom concluant à ce que le juge administratif soit déclaré compétent par les motifs que le Tribunal des Conflits a consacré la compétence du juge administratif en la matière par décision du 24 octobre 1994 (Préfet de la Région Ile-de-France, Préfet de Paris c/ Fédération syndicale SUD PTT) et que cette compétence ne saurait être remise en cause par l'effet de la loi du 26 juillet 1996 modifiant la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, et demandant que M. X, LE SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC, le syndicat national des contractuels de France Télécom (SNC) et le syndicat national des Télécommunications (SNT) soient condamnés à lui verser la somme 2 300 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

Vu, enregistré le 25 novembre 2002, le mémoire présenté pour la Fédération SUD PTT tendant à ce que le juge administratif soit déclaré compétent par les motifs que les modifications apportées par la loi du 26 juillet 1996 ne sont pas telles que la solution consacrée par le Tribunal des Conflits, par la décision rendue le 24 octobre 1994, doive être remise en cause alors que la très grande majorité du personnel de France Télécom demeure soumise au statut de la fonction publique, et concluant à ce que M. X, LE SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC, le syndicat national des contractuels de France Télécom (SNC) et le syndicat national des Télécommunications (SNT) soit condamnés à lui verser la somme 2 300 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

Vu, enregistrées le 18 décembre 2002, les observations en réplique produites pour M. X, LE SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC, le syndicat national des contractuels de France Télécom (SNC) et le syndicat national des Télécommunications (SNT) ;

Vu, enregistrées le 9 janvier 2003, les observations complémentaires, présentées pour la Fédération SUD PTT ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée au ministre des affaires sociales et de la solidarité et à la Fédération unifiée CFDT des Postes et Télécom qui n'ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié et, notamment ses articles 35 et suivants ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée par la loi n° 96-660 du 26 juillet 1996 ;

Vu la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Mazars, membre du Tribunal,

- les observations de la SCP Gatineau, avocat du SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC et de M. X, du Syndicat national des contractuels de France Télécom (SNC) et du Syndicat national des Télécommunications (SNT), de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la Fédération des syndicats solidaires unitaires et démocratiques (SUD) des PTT, de Me Delvolvé, avocat de la société France Télécom et de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la Fédération unifiée CFDT des Postes et Télécommunications,

- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le SYNDICAT NATIONAL DES CADRES DE FRANCE TELECOM CGC et M. X ont saisi le tribunal d'instance du 15ème arrondissement de Paris d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'entreprise France Télécom d'organiser les élections des représentants du personnel au conseil d'administration, prévues le 24 octobre 2000, dans des conditions conformes aux exigences de l'article 19 de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, de communiquer les procès-verbaux des commissions de répartition des services et des filiales de l'entreprise afin de s'assurer de la mise en place du matériel électoral, et le cas échéant, de reporter la date du scrutin ; que le tribunal d'instance a décliné sa compétence au motif que la juridiction judiciaire ne saurait, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs issu de la loi des 16 et 24 août 1790, connaître des contestations relatives à la régularité de telles opérations électorales dans la mesure où le personnel de France Télécom demeure majoritairement composé de fonctionnaires ;

Considérant, d'une part, que la loi du 26 juillet 1996, modifiant la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et des Télécommunications, a transformé l'exploitant public France Télécom en société anonyme à participation majoritaire de l'Etat ; que France Télécom entre ainsi dans le champ d'application de la loi du 26 juillet 1983 et notamment de ses articles 5 à 20 relatifs au conseil d'administration, sous réserve des dispositions des articles 10-1 et 12 de la loi du 2 juillet 1990 ; que, selon l'article 19 de la loi du 26 juillet 1983, les contestations relatives à l'électorat, à l'éligibilité et à la régularité des opérations électorales, pour l'élection des représentants des salariés au conseil d'administration, sont de la compétence du tribunal d'instance statuant en dernier ressort ;

Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'article 29-1 ajouté à la loi du 2 juillet 1990 par l'article 5 de la loi du 26 juillet 1996 l'entreprise nationale emploie désormais librement des agents contractuels sous le régime des conventions collectives ; que, si les corps des fonctionnaires de France Télécom ont été rattachés à l'entreprise et placés sous l'autorité de son président, il ne peut plus être procédé, depuis le 1er janvier 2002, à des recrutements externes d'agents fonctionnaires ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le litige relatif aux élections des représentants du personnel au conseil d'administration de France Télécom relève de la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire, sous réserve des questions préjudicielles que la qualité de fonctionnaire d'agents de France Télécom pourrait conduire cette juridiction à poser ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes tendant au remboursement des frais exposés ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige relatif aux élections des représentants du personnel au conseil d'administration de France Télécom.

Article 2 : Les demandes susvisées tendant au remboursement des frais exposés sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

17-03-01-02-0251-02-04 COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR DES TEXTES SPÉCIAUX - ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - ELECTION DES REPRÉSENTANTS DU PERSONNEL AU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE FRANCE TÉLÉCOM [RJ1].

z17-03-01-02-02z51-02-04z La loi du 26 juillet 1996 a transformé en société anonyme à participation majoritaire de l'Etat l'exploitant public France Télécom, qui entre ainsi dans le champ d'application de la loi du 26 juillet 1983, notamment de ses articles 5 à 20 relatifs au conseil d'administration, sous réserve des dispositions des articles 10-1 et 12 de la loi du 2 juillet 1990. Selon l'article 19 de la loi du 26 juillet 1983, les contestations relatives à l'électorat, à l'éligibilité et à la régularité des opérations électorales, pour l'élection des représentants des salariés au conseil d'administration, sont de la compétence du tribunal d'instance statuant en dernier ressort. En vertu de l'article 29-1 ajouté à la loi du 2 juillet 1990 par l'article 5 de la loi du 26 juillet 1996, l'entreprise nationale emploie désormais librement des agents contractuels sous le régime des conventions collectives. Si les corps des fonctionnaires de France Télécom ont été rattachés à l'entreprise et placés sous l'autorité de son président, il ne peut plus être procédé, depuis le 1er janvier 2002, à des recrutements externes d'agents fonctionnaires. Il résulte de ce qui précède que le litige relatif aux élections des représentants du personnel au conseil d'administration de France Télécom relève de la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire, sous réserve des questions préjudicielles que la qualité de fonctionnaire d'agents de France Télécom pourrait conduire cette juridiction à poser.


Références :

[RJ1]

Comp. TC, 24 octobre 1994, Préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris c/ Fédération syndicale Sud PTT, p. 608 ;

Rappr. CE, Assemblée, 2 juillet 1993, Syndicat Fédération Sud PTT, p. 191.


Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: Mme Christine Maugüé
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de la décision : 24/03/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : C3338
Numéro NOR : CETATEXT000007608997 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.conflits;arret;2003-03-24;c3338 ?
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