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09/07/2025 | FRANCE | N°52500754

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 juillet 2025, 52500754


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 9 juillet 2025








Cassation partielle




Mme MONGE, conseillère doyenne
faisant fonction de présidente






Arrêt n° 754 F-D


Pourvoi n° U 24-16.397






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
___

______________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 JUILLET 2025


Mme [P] [H], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° U 24-16.397 contre l'arrêt rendu le 9 avril 2024 par la cour d'appel d'Agen...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 9 juillet 2025

Cassation partielle

Mme MONGE, conseillère doyenne
faisant fonction de présidente

Arrêt n° 754 F-D

Pourvoi n° U 24-16.397

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 JUILLET 2025

Mme [P] [H], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° U 24-16.397 contre l'arrêt rendu le 9 avril 2024 par la cour d'appel d'Agen (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à l'association Santé famille 47, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à France travail, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseillère référendaire, les observations de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, avocat de Mme [H], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'association Santé famille 47, après débats en l'audience publique du 11 juin 2025 où étaient présentes Mme Monge, conseillère doyenne faisant fonction de présidente, Mme Laplume, conseillère référendaire rapporteure, Mme Cavrois, conseillère, et Mme Pontonnier, greffière de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des présidente et conseillères précitées, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 9 avril 2024), Mme [H] a été engagée en qualité d'infirmière coordinatrice par l'association Santé famille 47 le 5 septembre 2011. Elle exerçait en dernier lieu la fonction de directrice d'association.

2. Elle a été licenciée le 23 août 2019.

3. Le 31 octobre 2019, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents, des contreparties obligatoires en repos et congés payés afférents et de l'indemnité pour travail dissimulé, alors : « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que les juges du fond ne peuvent, pour rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires, se fonder exclusivement sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié et doivent examiner les éléments objectifs que l'employeur est tenu de leur fournir ; qu'en retenant, pour débouter Mme [H], qu'elle ne produisait aucune pièce corroborant sa demande quand il ressortait de ses propres constatations qu'elle avait communiqué des courriels envoyés tôt le matin ou tard le soir, sa fiche de poste, sa délégation de pouvoirs, la description de ses tâches, des attestations de collègues confirmant sa charge de travail, ses mandats de représentation et de participation à de nombreux colloques, congrès, formations, ses justificatifs de transports et ses notes de frais, ces éléments étant suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a d'ores et déjà violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

5. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition de l'agent de contrôle de l'inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

6. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

7. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

8. Pour débouter la salariée de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, l'arrêt retient que la salariée produit à l'appui de sa demande sa fiche de poste, sa délégation de pouvoirs, la description de ses tâches, plusieurs attestations de collègues confirmant sa charge de travail, ses mandats de représentation et de participation à de nombreux colloques, congrès, formations, ses justificatifs de transports et ses notes de frais, des courriels envoyés tôt le matin ou tard le soir et qu'elle ne produit aucun relevé des heures travaillées, aucun décompte des heures accomplies et de la somme réclamée, ni aucune pièce corroborant sa demande.

9. Il ajoute que la salariée présente un montant global et forfaitaire de 9 heures par jour sur cinq jours sans en justifier, alors qu'un tel calcul est proscrit par la Cour de cassation, que conformément à son statut, elle avait droit à quatorze jours ouvrés en plus des cinq semaines de congés payés, que les courriels envoyés tôt le matin ou tard le soir ne prouvent pas l'amplitude horaire de travail dans la mesure où le salarié peut vaquer, avant ou après, à ses occupations personnelles, qu'elle disposait d'un jour de télétravail depuis le mois de septembre 2017, que le contrôle du temps de travail des salariés entrait dans ses attributions et que les attestations produites par la salariée faisant éloge de son investissement et de sa présence sur le site ne sont pas de nature à remplacer le décompte qui fait défaut.

10. En statuant ainsi, alors que la salariée présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. La cassation prononcée n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile et déboutant l'employeur de sa demande à ce titre, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [H] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents, des contreparties obligatoires en repos et congés payés afférents et d'indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt rendu le 9 avril 2024, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne l'association Santé famille 47 aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Santé famille 47 et la condamne à payer à Mme [H] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le neuf juillet deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500754
Date de la décision : 09/07/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 09 avril 2024


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jui. 2025, pourvoi n°52500754


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseillère doyenne faisant fonction de présidente)
Avocat(s) : SCP Françoise Fabiani - François Pinatel , SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500754
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