LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° D 24-82.416 F-D
N° 00836
SL2
17 JUIN 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 17 JUIN 2025
M. [Y] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-2, en date du 20 mars 2024, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 20 juin 2023, pourvoi n° 22-82.155), pour diffamation publique envers un particulier, l'a condamné à 3 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Violeau, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [Y] [D], les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [P] [F], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Violeau, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [Y] [D] a été cité devant le tribunal correctionnel par M. [P] [F], partie civile, du chef susvisé en raison des propos publiés, le 6 janvier 2017, sur son compte Facebook, accessible à tous.
3. Le tribunal a déclaré M. [D] coupable du délit poursuivi et a prononcé sur les intérêts civils.
4. Les parties ont relevé appel de cette décision, le ministère public appel incident.
5. Par arrêt du 17 janvier 2022, la cour d'appel a infirmé ce jugement, relaxé M. [D] et prononcé sur les intérêts civils.
6. M. [F] a formé un pourvoi contre cet arrêt.
7. Par arrêt du 20 juin 2023, la Cour de cassation a cassé cette décision et renvoyé l'affaire à la même cour d'appel, autrement composée.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation, en ce qu'il a, sur l'action publique, confirmé le jugement ayant déclaré M. [D] coupable de diffamation publique envers un particulier et condamné à une amende de 3 000 euros, alors « que la cassation, sur le seul pourvoi de la partie civile, dans toutes ses dispositions, de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 17 janvier 2022, est nécessairement intervenue dans les limites de ce pourvoi qui ne concernait que les seuls intérêts civils, la relaxe de M. [D] ayant acquis l'autorité de chose jugée ; en confirmant le jugement sur la culpabilité et la peine, la cour d'appel, qui n'était saisie que des seuls intérêts civils, a excédé ses pouvoirs et méconnu les articles 609 et 567 du code de procédure pénale ; la cassation interviendra sans renvoi, avec constatation de l'autorité de chose jugée attachée à la relaxe. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 567 et 609 du code de procédure pénale :
9. Si, selon ces textes, le pourvoi a pour effet de déférer à la Cour de cassation la décision attaquée dans son intégralité, cet effet est limité par la qualité du demandeur, par sa volonté ou par son intérêt à agir.
10. Après cassation, l'affaire est dévolue à la cour d'appel de renvoi dans les limites fixées par l'acte de pourvoi et dans celles de la cassation intervenue.
11. Il résulte de l'arrêt attaqué qu'avant de se prononcer sur l'action civile, les juges du second degré ont, sur l'action publique, confirmé en toutes ses dispositions le jugement déclarant M. [D] coupable du délit qui lui était reproché.
12. En statuant ainsi, alors que l'effet dévolutif du pourvoi formé par la partie civile était nécessairement limité aux seuls intérêts civils, et que la cassation ne pouvait donc concerner que les dispositions civiles, seules déférées à la censure de la Cour de cassation, la cour d'appel, qui n'était plus saisie de l'action publique, a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.
13. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquence de la cassation
14. La cassation de l'arrêt en ce qu'il a prononcé sur l'action publique entraîne la cassation de l'arrêt en ce qu'il a statué sur l'action civile, la cour d'appel ayant déduit de la déclaration de culpabilité de M. [D] l'existence d'une faute civile.
15. Il n'y a dès lors pas lieu d'examiner les autres moyens.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 20 mars 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille vingt-cinq.