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11/06/2025 | FRANCE | N°52500650

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juin 2025, 52500650


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CZ






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 11 juin 2025








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 650 F-D


Pourvoi n° M 24-14.458








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_____

____________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 JUIN 2025


Mme [V] [C], épouse [F], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 24-14.458 contre l'arrêt rendu le 7 février 2024 par la cour d'appel d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 11 juin 2025

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 650 F-D

Pourvoi n° M 24-14.458

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 JUIN 2025

Mme [V] [C], épouse [F], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 24-14.458 contre l'arrêt rendu le 7 février 2024 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à la société Aux Délices de l'étoile XVIIème, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de Mme [C], de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Aux Délices de l'étoile XVIIème, après débats en l'audience publique du 14 mai 2025 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, Mme Deltort, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 février 2024), Mme [C], épouse [F], a été engagée en qualité de responsable de magasin par la société Aux Délices de l'étoile XVIIème le 1er septembre 2017.

2. Elle a démissionné le 31 janvier 2019

3. La salariée a saisi la juridiction prud'homale le 10 juillet 2019 afin de solliciter la qualification de sa démission en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et la condamnation de son employeur à lui verser diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat.

Examen des moyens

Sur le quatrième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.

Sur le premier moyen, pris sa quatrième branche

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en paiement de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires, du repos compensateur et congés payés afférents, du travail dissimulé et en fixation d'un salaire habituel à une certaine somme, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que, pour rejeter la demande en paiement d'heures supplémentaires formée par Mme [C], la cour d'appel a constaté que la salariée produisait un document recensant ses horaires et faisant apparaître ces heures supplémentaires, ainsi que des sms faisant état d'un règlement global des heures supplémentaires sans qu'un comptage précis ne soit effectué ; que, cependant, la cour d'appel a également considéré, d'une part, que l'employeur versait aux débats des attestations qui affirmaient que Mme [C] effectuait ses heures en demi-journée en alternance avec une autre salariée et surtout qu'elle et son époux partaient voir leur famille deux à trois week-ends par mois en demandant aux autres salariés de ne pas en parler aux dirigeants de la société, et, d'autre part, que les salariés ayant attesté produisaient également une feuille d'heures retraçant pour chacun les heures supplémentaires et les jours de fermeture de la boulangerie, ce qui établissait qu'un système de remontée des heures effectuées était mis en place ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que Mme [C] présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne fournissait aucun élément de contrôle de la durée du travail de Mme [C], la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

6. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition de l'agent de contrôle de l'inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

7. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

8. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

9. Pour débouter la salariée de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, l'arrêt retient que la salariée produit un document recensant ses horaires faisant apparaître ces heures supplémentaires, des sms faisant état d'un règlement global des heures supplémentaires sans qu'un comptage précis ne soit effectué. Il relève que toutefois cette seule pièce ne permet pas d'établir la preuve de l'amplitude horaire effectivement réalisée par la salariée et que l'examen des tickets de caisse produits démontre, au contraire, que certains jours indiqués comme ayant été travaillés par la salariée et son époux ne l'étaient pas, soit que le magasin était purement et simplement fermé le jour dit, soit que les époux [F] étaient en week-end de repos. Il constate que, contrairement aux affirmations de la salariée, ses bulletins de paie contiennent chaque mois des heures supplémentaires. Il ajoute que l'employeur verse aux débats les attestations de trois salariées qui affirment que l'intéressée effectuait ses heures en demi journée en alternance avec une autre salariée et surtout qu'elle partait avec son époux voir leur famille près de [Localité 3] deux à trois week-ends par mois en demandant aux autres salariés de ne pas en parler aux dirigeants de la société. Il relève, enfin, que les salariées ayant attesté produisent également une feuille d'heures retraçant pour chacune les heures supplémentaires et les jours de fermeture de la boulangerie, ce qui établit qu'un système de remontée des heures effectuées était mis en place.

10. En statuant ainsi, alors, d'une part, qu'il résultait de ses constatations que la salariée présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre et, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail de la salariée, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé le texte susvisé.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

11. La salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, alors « que la cassation d'un chef de décision entraîne la cassation par voie de conséquence de tous les autres chefs de décision qui en sont la suite, nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen ne pourra qu'entraîner la cassation du chef de l'arrêt relatif à la demande de dommages-intérêts pour violation de l'obligation de sécurité. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

12. La cassation prononcée emporte la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt déboutant la salariée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. La salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en qualification de sa démission en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ses demandes indemnitaires consécutives à cette rupture, alors « que la cassation d'un chef de décision entraîne la cassation par voie de conséquence de tous les autres chefs de décision qui en sont la suite, nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; que la cassation à intervenir sur les deux premiers moyens ne pourra qu'entraîner la cassation du chef de l'arrêt relatif à la demande de requalification de la démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

14. La cassation prononcée emporte la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif de l'arrêt déboutant la salariée de sa demande en qualification de sa démission en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes indemnitaires consécutives à cette rupture, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [C], épouse [F], de ses demandes en paiement de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires, repos compensateur et congés payés afférents, d'une indemnité pour travail dissimulé, en fixation du salaire habituel à une certaine somme, en paiement de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, en qualification de sa démission en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en paiement des demandes indemnitaires consécutives à cette rupture et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 7 février 2024, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Aux Délices de l'étoile XVIIème aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Aux Délices de l'étoile XVIIème et la condamne à payer à Mme [C], épouse [F] la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le onze juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500650
Date de la décision : 11/06/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 février 2024


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jui. 2025, pourvoi n°52500650


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500650
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