LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
HE1
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 4 juin 2025
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 624 F-D
Pourvoi n° H 23-17.854
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 JUIN 2025
La société Saga décor, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° H 23-17.854 contre l'arrêt rendu le 22 mars 2023 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [T] [R], épouse [N], domiciliée [Adresse 2],
2°/ à la Fédération nationale des travailleurs du verre et de la céramique CGT, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Saga décor, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [R] et de la Fédération nationale des travailleurs du verre et de la céramique CGT, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 22 mars 2023), Mme [R] a été engagée par la société Saga décor à compter du 29 mars 1994, en qualité d'agent de ligne décor. En dernier lieu, elle exerçait les fonctions de conductrice décor et elle était titulaire de mandats de déléguée syndicale et d'élue au comité social et économique. Le contrat de travail était régi par la convention collective nationale de fabrication mécanique du verre.
2. Le 28 juillet 2020, la salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
3. Le 17 juillet 2020, elle avait saisi la juridiction prud'homale pour obtenir l'annulation d'un rappel à l'ordre et d'une mise à pied et la condamnation de l'employeur à lui payer un rappel de salaire au titre du repos compensateur ainsi qu'une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour discrimination. La Fédération nationale des travailleurs du verre et de la céramique CGT est intervenue volontairement à l'instance.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée certaines sommes à titre de rappel de salaire et congés payés afférents et de le condamner à payer à la Fédération nationale des travailleurs du verre et de céramique CGT une certaine somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, alors :
« 1°/ que tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de 11 heures consécutives ; qu'une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut déroger à la durée minimale de repos quotidien, notamment pour des activités caractérisées par la nécessité d'assurer une continuité du service ou par des périodes d'intervention fractionnés ; qu'en l'espèce, l'article 4 de l'accord du 31 août 1999 relatif à la "Réduction du temps de travail à 35 heures" dispose en son alinéa 1er que : " ? tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de 11 heures consécutives" ; que l'alinéa 4 précise que "Les signataires affirment leur volonté de respecter, pour les travailleurs postés, un repos d'une durée de 16 heures entre chaque poste, sauf exceptions liées à certains régimes de travail" ; qu'il résulte de ces termes clairs et précis que l'obligation de repos quotidien de 16 heures ne s'impose qu'entre deux postes de travail ; qu'en retenant au contraire que "Mme [R] devait bénéficier d'un temps de repos quotidien à l'issue de ses heures de délégation dans les mêmes proportions que si elle s'était trouvée sur son poste de travail", la cour d'appel a violé l'article 4 de l'accord du 31 août 1999 précité, ensemble les articles L. 3131-1 et L. 3131-2 du code du travail ;
2°/ que la cassation à intervenir sur la première branche entraînera la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société Saga décor à payer à la Fédération nationale des travailleurs du verre et de la céramique CGT la somme de 1 500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession par application de l'article 624 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article L. 2143-17, alinéa 1er, du code du travail, les heures de délégation sont, de plein droit, considérées comme temps de travail et payées à l'échéance normale. Il en résulte que l'utilisation des heures de délégation ne doit entraîner aucune perte de salaire pour le représentant du personnel ou le représentant syndical.
6. Ayant constaté que la salariée, exerçant habituellement son activité selon un régime de travail posté, bénéficiait, en vertu de l'article 4 de l'accord du 31 août 1999 relatif à la réduction du temps de travail à 35 heures, d'un repos minimal de 16 heures, la cour d'appel a retenu à bon droit qu'elle devait bénéficier de ce temps de repos à l'issue de l'utilisation de ses heures de délégation, jusqu'à sa reprise de poste.
7. Le moyen, privé de portée en sa seconde branche, n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Saga décor aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Saga décor et la condamne à payer à Mme [R] et à la Fédération nationale des travailleurs du verre et de céramique CGT, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le quatre juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.