LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° X 24-84.848 F-D
N° 00703
SL2
27 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 27 MAI 2025
La commune de [Localité 1], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, chambre correctionnelle, en date du 10 juillet 2024, qui, pour infraction au code de l'urbanisme, a condamné Mme [C] [Z] à 500 euros d'amende avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Rouvière, conseiller référendaire, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la commune de [Localité 1], et les conclusions de M. Bigey, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Rouvière, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Mme [C] [Z] a installé un mobile home et quatre caravanes sur une parcelle classée en zone agricole et, pour partie, en zone inondable.
3. Elle a été poursuivie du chef d'infraction aux dispositions du plan local d'urbanisme.
4. Le tribunal correctionnel l'a déclarée coupable, l'a condamnée à 1 000 euros d'amende avec sursis, a ordonné la remise en état des lieux sous astreinte et, statuant sur les intérêts civils, a reçu la constitution de partie civile de la commune de [Localité 1] et condamné Mme [Z] à lui payer 1 euro à titre de dommages et intérêts, outre une indemnité sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
5. Mme [Z], sur les dispositions pénales et civiles, et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé le jugement en ce qu'il avait ordonné à l'encontre de Mme [Z], la remise en état des lieux dans un délai de huit mois et a débouté la commune de [Localité 1] de toutes ses demandes, en ce compris la demande de remise en état des lieux, comportant le retrait des caravanes et du mobile-home, dans un délai de huit mois à compter du prononcé du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà de ce délai, alors :
« 1°/ que, pour apprécier l'opportunité de prononcer une mesure de démolition ou de remise en état des lieux destinée à mettre fin à une situation illicite ou à réparer un préjudice résultant de la commission de l'une des infractions prévues aux articles L. 480-4 et L. 610-1 du code de l'urbanisme, une juridiction répressive ne peut prendre en considération le droit au respect de la vie privée et familiale et au domicile du prévenu lorsque le bien susceptible de faire l'objet d'une telle mesure est situé en zone inondable exposée aux aléas les plus forts ; que, selon les constatations de l'arrêt, le terrain illicitement occupé par la prévenue était classé en zone agricole partiellement inondable et les caravanes installées sur ce terrain se situaient en zone inondable (arrêt attaqué, p. 5, § 8) ; que cependant, pour juger que la « remise en état des lieux sous astreinte, appara[issait] inopportune et d[evait] être infirmée » (arrêt attaqué, p. 7, § 1), la cour d'appel a considéré qu'« une telle sanction serait d'une particulière dureté » (arrêt attaqué, p. 7, § 1), dès lors que la prévenue « travaill[ait] de manière régulière en intérim pour un salaire de l'ordre de 1 600 euros par mois, que sa dernière fille âgée de quatorze ans [était] à sa charge, qu'elle a[vait] souscrit des prêts pour un total de 43 000 euros en vue d'acquérir le terrain (30 000 euros outre les frais de mutation) qui [était] grevé d'une hypothèque, et le mobil-home qui l'abrit[ait] et que, comme l'a observé à juste titre le premier juge, elle se trouv[ait] dans une situation financière et familiale complexe » et que « les habitations précaires dont l'enlèvement est sollicité par la commune constitu[ai]ent le seul logement de cette famille » (arrêt attaqué, p. 6, § 6 et p. 7, § 1) ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs impropres, tirés de la situation familiale et financière complexe de la prévenue, sans considération du risque déterminant pour cette même vie familiale et résultant de ce que leur domicile se trouve en zone inondable rouge, la cour d'appel a violé les articles L. 153-60, L. 480-5 et L. 480-14 du code de l'urbanisme et L. 562-1 et L. 562-4 du code de l'environnement, ensemble l'article 1240 du code civil ;
2°/ que, pour apprécier l'opportunité de prononcer une mesure de démolition ou de remise en état des lieux destinée à mettre fin à une situation illicite résultant de la commission de l'une des infractions prévues aux articles L. 480-4 et L. 610-1 du code de l'urbanisme, une juridiction répressive ne peut prendre en considération le fait que des tiers se trouvent ou se sont trouvés dans une situation illicite similaire, à plus forte raison lorsque la situation illicite en cause porte sur l'occupation d'une parcelle inondable soumise aux aléas les plus forts ; que, pour juger que la « remise en état des lieux sous astreinte, appara[issait] inopportune et d[evait] être infirmée » (arrêt attaqué, p. 7, § 1), la cour d'appel a justifié son appréciation par la considération « que le trouble causé par l'infraction est peu important puisque le terrain était déjà occupé dans les mêmes conditions avant les faits et que les parcelles adjacentes le sont également par des tiers également dans les mêmes conditions », considération qui, selon les motifs de l'arrêt, caractérisait « des éléments de faits [devant] être pris en considération au titre des circonstances de la commission de l'infraction qui particip[ai]ent à la détermination de la juste peine » (arrêt attaqué, p. 6, § 6) ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs impropres tirés de ce que l'illicéité d'occupation aurait été partagée par des voisins et le précédent propriétaire, qui auraient occupé leurs parcelles dans les mêmes conditions, et ce sans considération du risque déterminant pour les occupants à se trouver en zone inondable rouge, la cour d'appel a violé les articles L. 153-60, L. 480-5 du code de l'urbanisme et L. 562-1 et L. 562-4 du code de l'environnement. »
Réponse de la Cour
7. La commune, partie civile, n'ayant pas relevé appel du jugement qui avait ordonné la remise en état des lieux sous astreinte au seul titre de l'action publique, n'est pas recevable à critiquer l'infirmation par la cour d'appel de cette disposition étrangère à ses intérêts civils.
8. Dès lors, le moyen ne saurait être accueilli.
9. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt-cinq.