LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
JL10
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 27 mai 2025
Cassation partielle
Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 553 F-D
Pourvoi n° J 24-10.983
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2025
M. [G] [L], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 24-10.983 contre l'arrêt rendu le 28 novembre 2023 par la cour d'appel d'Agen (chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'Association protestante régionale d'écoute et de soutien, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations écrites de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [L], de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de l'Association protestante régionale d'écoute et de soutien, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 28 novembre 2023), M. [L] a été engagé en qualité de directeur de la maison d'enfants à caractère social Concorde par l'Association protestante régionale d'écoute et de soutien le 5 janvier 2015.
2. La relation de travail était soumise à la convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.
3. Le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie du 31 août 2017 au 26 août 2020, la caisse primaire d'assurance maladie ayant reconnu entre-temps le caractère professionnel de la maladie.
4. Déclaré inapte à tout poste dans l'entreprise le 3 septembre 2020, le salarié a été licencié pour inaptitude par courrier du 16 décembre 2020.
5. Le 1er septembre 2021, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes à titre de rappel de salaire.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et quatrième moyens
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de remboursement de la retenue indue sur bulletin de salaire de décembre 2020, alors « que, si tout paiement suppose une dette, seul ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution ; que, pour débouter M. [L] de sa demande de remboursement de la retenue indue sur bulletin de salaire de décembre 2020 à hauteur de 34 642,40 euros, la cour d'appel a constaté que ''l'employeur justifie sa retenue par la revalorisation des indemnités journalières bénéficiant au salarié après que l'origine professionnelle de sa maladie ait été reconnue'' et que ''les sommes effectivement versées au salarié après revalorisation sont établies par les attestations de payement des indemnités journalières produites aux débats par le salarié, et font apparaître que du 8 mars 2018 -date de fin de la subrogation de l'employeur- au 26 août 2020, M. [L] a effectivement bénéficié de la somme de 148 967,91 euros au titre des indemnités journalières'' ; qu'après avoir relevé, d'une part, que, ''sur la même période du 8 mars 2018 au 26 août 2020, il est établi par les bulletins de paye produits aux débats par l'employeur que les indemnités journalières dont le salarié a bénéficié ont été sous-évaluées, la somme de 122 945,31 étant retenue'', d'autre part, que ''M. [L], dans son courrier du 31 décembre 2020, reconnaît d'ailleurs en son principe la possibilité d'une régularisation des indemnités journalières entre ce qui a été reçu et ce qui aurait dû l'être'', la cour d'appel a estimé que ''l'employeur apporte donc la preuve qu'une retenue est justifiée au titre de la revalorisation des indemnités journalières'' ; qu'en se déterminant ainsi, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations de fait que la différence entre le montant des indemnités journalières retenu par l'employeur [122 945,31 euros] et celui véritablement perçu par le salarié [148 967,91 euros], au cours de la même période, s'élevait à la somme de 26 022,60 euros, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier une retenue sur salaire d'un montant de 34 642,40 euros, privant sa décision de toute base légale au regard des articles 1302 et 1302-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1302 et 1302-1 du code civil :
8. Aux termes du premier de ces textes, tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.
9. Aux termes du second, celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.
10. Pour débouter le salarié de sa demande en remboursement de la retenue indue de 34 642,40 euros sur le bulletin de salaire de décembre 2020, l'arrêt retient que l'employeur justifie sa retenue par la revalorisation des indemnités journalières bénéficiant au salarié après que l'origine professionnelle de sa maladie eut été reconnue, que les sommes effectivement versées au salarié après revalorisation sont établies par les attestations de paiement des indemnités journalières produites aux débats par le salarié et font apparaître que du 8 mars 2018, date de fin de la subrogation de l'employeur, au 26 août 2020, le salarié a effectivement bénéficié de la somme de 148 967,91 euros au titre des indemnités journalières et que sur la même période du 8 mars 2018 au 26 août 2020, il est établi par les bulletins de paye produits aux débats par l'employeur que les indemnités journalières dont le salarié a bénéficié ont été sous-évaluées, la somme de 122 945,31 étant retenue. Il ajoute que, dans son courrier du 31 décembre 2020, le salarié reconnaît d'ailleurs en son principe la possibilité d'une régularisation des indemnités journalières entre ce qui a été reçu et ce qui aurait dû l'être. Il conclut que l'employeur apporte la preuve qu'une retenue est justifiée au titre de la revalorisation des indemnités journalières.
11. En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à justifier l'existence d'une dette du salarié envers l'employeur d'un montant de 34 642,40 euros et la retenue sur salaire du même montant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [L] de sa demande en remboursement de la retenue indue de 34 642,40 euros sur le bulletin de salaire de décembre 2020 et en ce qu'il statue sur les dépens d'appel et l'application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 28 novembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne l'Association protestante régionale d'écoute et de soutien aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'Association protestante régionale d'écoute et de soutien et la condamne à payer à M. [L] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le vingt-sept mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.