LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 6 mai 2025
Cassation
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 462 F-D
Pourvoi n° Q 23-20.345
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 MAI 2025
M. [T] [X], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 23-20.345 contre l'arrêt rendu le 25 mai 2023 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société [3], société anonyme, exerçant sous le nom commercial [4], dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Panetta, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [X], de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société [3], après débats en l'audience publique du 25 mars 2025 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Panetta, conseiller rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 25 mai 2023), M. [X] a été engagé, en qualité de chef stewarding, le 12 septembre 2008, par la société [3] devenue société [4] (la société).
2. Licencié pour faute grave le 7 septembre 2012, le salarié a saisi, par requête du 6 mai 2015, le conseil de prud'hommes d'une contestation de la rupture de son contrat de travail et de demandes en réparation de ses préjudices.
3. Par jugement du 16 décembre 2016, le conseil a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale, rendue le 29 novembre 2017, et l'affaire a été remise au rôle, par acte du 8 juillet 2020.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater la péremption de l'instance introduite le 5 mai 2015 devant le conseil de prud'hommes et, en conséquence de constater l'extinction de l'instance, alors « qu'aux termes de l'article R. 1452-8 du code du travail applicable aux faits de la cause, la péremption n'est prononcée que si les parties s'abstiennent pendant deux ans d'effectuer les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ; qu'en retenant, pour dire que l'instance était périmée au 8 juillet 2020, date de la demande de réinscription de l'affaire, en l'absence de diligences par les parties pendant plus de deux ans, la cour d'appel a retenu qu'il ressortait de cette décision que "le terme du sursis fixé par les premiers juges est (?) le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale saisie d'une action introduite par le salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de la société, et non une décision de justice définitive sur cette action", que "le jugement a été rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale le 29 novembre 2017, le terme du sursis à statuer est intervenu à cette même date", en sorte que " l'affaire devait dès lors être reprise au plus tard le 29 novembre 2019", et que "la demande de réinscription ayant été formée par acte remis au greffe le 8 juillet 2020, l'instance était périmée à cette date en l'absence de diligences par les parties pendant plus de deux années" ; qu'en statuant ainsi, sans constater que la décision prononçant le sursis à statuer mettait expressément des diligences à la charge des parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 386 du code de procédure civile et R. 1452-8 du code du travail, dans sa version applicable en la cause. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 386 du code de procédure civile et l'article R. 1452-8 du code du travail, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 :
6. Selon le premier de ces textes, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
7. Selon le second de ces textes, en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
8. Pour dire l'instance périmée et déclarer irrecevables les demandes du salarié, l'arrêt constate d'une part, que le conseil de prud'hommes a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale, et d'autre part que dès lors qu'il n'est pas discuté que le jugement a été rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale le 29 novembre 2017, le terme du sursis à statuer est intervenu à cette même date, en a déduit que l'affaire devait dès lors être reprise au plus tard le 29 novembre 2019 et que la demande de réinscription ayant été formée par acte remis au greffe le 8 juillet 2020, l'instance était périmée à cette date en l'absence de diligences par les parties pendant plus de deux années.
9. En statuant ainsi, alors qu'aucune diligence, autre que celle nécessaire à la réinscription de l'affaire, n'avait été mise à la charge des parties, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion autrement composée ;
Condamne la société [3] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [3] et la condamne à payer à M. [X] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le six mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.