LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB1
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 6 mai 2025
Cassation partielle
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 436 F-D
Pourvoi n° B 23-15.641
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 MAI 2025
La Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles du Grand Est (Groupama Grand Est), dont le siège est [Adresse 1], organisme mutualiste d'assurance mutuelle, a formé le pourvoi n° B 23-15.641 contre l'arrêt rendu le 17 mars 2023 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Z] [L], domicilié [Adresse 2],
2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
M. [L] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles du Grand Est, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [L], après débats en l'audience publique du 25 mars 2025 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, M. Redon, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3 alinéa 2 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 17 mars 2023), M. [L] a été engagé en qualité d'inspecteur vérificateur risques industriels, le 7 avril 2015, par la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles du Grand Est (la société).
2. Par lettre du 23 janvier 2018, il a adressé à l'Agence française anticorruption un signalement portant sur des manquements à l'article 17 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.
3. Licencié pour faute lourde le 10 décembre 2018, il a saisi la juridiction prud'homale d'une contestation de la rupture de son contrat de travail, soutenant, à titre principal, qu'elle était nulle et, à titre subsidiaire, qu'elle était dépourvue de cause réelle et sérieuse. Il a également présenté une demande indemnitaire pour harcèlement moral.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal de l'employeur, pris en ses trois premières branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen du pourvoi principal, pris en ses quatrième, cinquième et sixième branches
Enoncé du moyen
5. La société fait grief à l'arrêt de juger que le licenciement du salarié est nul et, en conséquence, de le condamner à lui payer des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, de rappel de salaire pour la période de mise à pied, outre les congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents et au titre de l'indemnité légale de licenciement ainsi que de lui ordonner de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées le cas échéant au salarié dans la limite de deux mois à compter de la date de la rupture, alors :
« 4°/ que le salarié qui relate des faits susceptibles de constituer un délit ou d'un crime peut être licencié pour ce motif en cas de mauvaise foi, laquelle peut résulter de son intention de nuire, même en l'absence de preuve de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits relatés ; qu'en l'espèce, l'employeur, après avoir rappelé que la mauvaise foi pouvait résulter notamment de l'intention de nuire du salarié, s'attachait à démontrer l'existence d'une telle intention chez le salarié dans la mise en oeuvre de la seconde alerte ; qu'en affirmant que la mauvaise foi ne pouvait résulter que de la connaissance qu'avait le salarié que les faits qu'il dénonçait étaient faux, pour en déduire que cette fausseté ne pouvait résulter d'une simple divergence d'analyse sur la qualification pénale qu'ils seraient susceptibles de recevoir et que la mauvaise foi du salarié dans le dossier de la société Chassinel n'était pas établie, quand il lui appartenait d'examiner les éléments invoqués par l'employeur pour établir l'intention de nuire du salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-3-3 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
5°/ subsidiairement, que le salarié qui relate des faits susceptibles de constituer un délit ou d'un crime peut être licencié pour ce motif en cas de mauvaise foi ; qu'en l'espèce, l'employeur invoquait de nombreux éléments pour démontrer la mauvaise foi du salarié notamment dans la mise en oeuvre de la seconde alerte ; qu'en particulier, il soutenait que les deux alertes successives étaient intervenues dans un contexte où le salarié s'était vu refuser une augmentation pour 2018 en raison d'un niveau de performance insuffisant, et qu'il nourrissait un ressentiment très fort à l'égard de son employeur, certains collaborateurs ayant indiqué que les actions menées par le salarié dans le cadre de ses alertes étaient préméditées et procédaient d'une intention de nuire ; que l'employeur exposait également que l'alerte concernant la société Chassinel, lancée de façon opportune après que le salarié avait été informé qu'il ne pouvait bénéficier du statut de protecteur d'alerte au titre de sa première alerte, concernait des faits dont il avait connaissance dès juillet 2017, qu'elle n'avait pourtant eu lieu que près d'un an après et alors qu'il avait reçu fin 2017 tous les éléments de réponse de son employeur ; qu'il ajoutait que le salarié avait écrit à son employeur le 17 avril 2018 en prétendant lui laisser un mois pour répondre sur l'alerte Chassinel et avait affirmé le 6 juin 2018 ne pas avoir encore saisi l'Agence française anticorruption tandis qu'en réalité, il avait informé l'AFA de ce dossier dès le 23 janvier 2018 et complété son dossier le 9 mai 2018, et que bien que l'alerte ait été traitée conformément à la loi et que des réponses argumentées lui aient été apportées, le salarié avait informé (outre l'AFA) un officier de police judiciaire, la Direccte et l'inspection du travail de son signalement, et communiqué des photographies confidentielles prises sur le site du client à ces intervenants extérieurs ; que l'employeur faisait enfin valoir que le salarié avait, à l'occasion de ses alertes, multiplié les messages à plusieurs cadres de l'entreprise visant à les déstabiliser dans leur exercice professionnel et à les menacer d'actions judiciaires en se prévalant de son ''accès VIP au procureur de la République'' et avait adopté un comportement obsessionnel et compulsif à de multiples reprises, caractérisé par la multitude des courriels adressés à la société et à ses collègues, les menaces faites à ses interlocuteurs, et sa communication très large sur son statut de lanceur d'alerte, sur le contenu de ses alertes et sa prétendue discrimination ; qu'en se bornant à énoncer, pour en déduire que la mauvaise foi du salarié dans le dossier de la société Chassinel n'était pas établie, que la mauvaise foi ne pouvait résulter que de la connaissance qu'avait le salarié que les faits qu'il dénonçait étaient faux et que cette fausseté ne pouvait résulter d'une simple divergence d'analyse sur la qualification pénale qu'ils seraient susceptibles de recevoir, sans rechercher si les différents éléments invoqués par l'employeur ne permettaient pas d'établir la connaissance par le salarié de la fausseté des faits dénoncés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-3-3 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
6°/ en tout état de cause que le salarié qui relate des faits susceptibles de constituer un délit ou d'un crime peut être licencié en cas d'abus du droit d'alerte ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reprochait au salarié un abus du droit d'alerte que l'employeur s'attachait à démontrer par de multiples éléments ; qu'en particulier, il soutenait que les deux alertes successives étaient intervenues dans un contexte où le salarié s'était vu refuser une augmentation pour 2018 en raison d'un niveau de performance insuffisant, et qu'il nourrissait un ressentiment très fort à l'égard de son employeur, certains collaborateurs ayant indiqué que les actions menées par le salarié dans le cadre de ses alertes étaient préméditées et procédaient d'une intention de nuire ; que l'employeur exposait également que l'alerte concernant la société Chassinel, lancée de façon opportune après que le salarié avait été informé qu'il ne pouvait bénéficier du statut de protecteur d'alerte au titre de sa première alerte, concernait des faits dont il avait connaissance dès juillet 2017, qu'elle n'avait pourtant eu lieu que près d'un an après et alors qu'il avait reçu fin 2017 tous les éléments de réponse de son employeur ; qu'il ajoutait que le salarié avait écrit à son employeur le 17 avril 2018 en prétendant lui laisser un mois pour répondre sur l'alerte Chassinel et avait affirmé le 6 juin 2018 ne pas avoir encore saisi l'Agence française anticorruption tandis qu'en réalité, il avait informé l'AFA de ce dossier dès le 23 janvier 2018 et complété son dossier le 9 mai 2018, et que bien que l'alerte ait été traitée conformément à la loi et que des réponses argumentées lui aient été apportées, le salarié avait informé (outre l'AFA) un officier de police judiciaire, la Direccte et l'inspection du travail de son signalement, et communiqué des photographies confidentielles prises sur le site du client à ces intervenants extérieurs ; que l'employeur faisait enfin valoir que le salarié avait, à l'occasion de ses alertes, multiplié les messages à plusieurs cadres de l'entreprise visant à les déstabiliser dans leur exercice professionnel et à les menacer d'actions judiciaires en se prévalant de son ''accès VIP au procureur de la République'' et avait adopté un comportement obsessionnel et compulsif à de multiples reprises, caractérisé par la multitude des courriels adressés à la société et à ses collègues, les menaces faites à ses interlocuteurs, et sa communication très large sur son statut de lanceur d'alerte, sur le contenu de ses alertes et sa prétendue discrimination ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si un abus du droit d'alerte n'était pas caractérisé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-3-3 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016. »
Réponse de la Cour
6. Selon l'article L. 1132-3-3, alinéa 1er, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.
7. Aux termes de l'article L. 1132-4 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance de ces dispositions est nul.
8. Il en résulte que le salarié qui relate ou témoigne de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
9. La cour d'appel a, d'abord, relevé, d'une part, que le salarié avait signalé à l'Agence française anticorruption, les 23 janvier 2018 et 9 mai 2018, des faits de nature à recevoir une qualification pénale de fraude fiscale et d'abus de bien social commis par son employeur lors du règlement, susceptible d'être qualifié d'acte anormal de gestion par l'administration fiscale, d'un sinistre déclaré par la société Chassinel et, d'autre part, que Groupama Grand Est avait contesté l'analyse du salarié, en faisant valoir qu'il avait reçu tous les éléments de réponse à ses interrogations en octobre et novembre 2017, que cette prise en charge était conforme aux obligations légales et conventionnelles de l'entreprise comme à son intérêt social et lui reprochait de fonder son analyse sur une jurisprudence fluctuante et controversée relative à la faute dolosive de l'assuré.
10. Elle a, ensuite, retenu que la mauvaise foi ne pouvait être déduite d'une simple divergence d'analyse sur la qualification pénale que les faits seraient susceptibles de recevoir, en sorte que la mauvaise foi du salarié n'était pas établie.
11. Elle en a exactement déduit, sans avoir à procéder à une recherche que ces constatations rendaient inopérante, que le licenciement fondé, pour partie, sur des faits pour lesquels le salarié bénéficiait de la protection prévue par l'article L. 1132-3-3, alinéa 1er, du code du travail, était nul.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le moyen du pourvoi incident du salarié, pris en ses première et cinquième branches
Enoncé du moyen
13. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en condamnation de la société en paiement de dommages-intérêts au titre du préjudice né du harcèlement moral, alors :
« 1°/ que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, au soutien de sa demande au titre du harcèlement moral, le salarié faisait valoir que la dégradation de ses conditions de travail qu'il avait subie avait nui à son état de santé puisqu'il avait perdu plus de dix kilos et qu'il avait dû être placé en arrêt de travail pour ''syndrome anxieux réactionnel'' du 26 septembre au 5 novembre 2018 et versait aux débats, à l'appui de ses dires, son avis d'arrêt de travail ; qu'en rejetant sa demande formée au titre du harcèlement moral au motif que les faits invoqués par le salarié n'étaient pas matériellement établis, sans prendre en compte ces éléments médicaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
5°/ que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, ayant relevé que, si le salarié se plaignait de la suppression de tous les grands comptes de son périmètre d'intervention tandis que son secteur géographique était doublé, la décision de réorganisation des grands comptes ne le concernait pas exclusivement mais l'ensemble des inspecteurs industriels et ne pouvait dès lors pas faire présumer une situation de harcèlement moral à l'encontre du salarié puis que, s'agissant ensuite de l'usage de sobriquets dont se plaignait également le salarié, si M. [S], son supérieur, pouvait parler de lui comme ''Roger Rabbit'', l'usage de ce sobriquet était insuffisant pour faire présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral, la cour d'appel a débouté le salarié de sa demande au titre du harcèlement moral ; qu'en se prononçant ainsi au terme d'une appréciation séparée des éléments de faits invoqués par le salarié sans rechercher si, pris dans leur ensemble, ces éléments ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail :
14. Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral et que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui laissent supposer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.
15. Pour débouter le salarié de ses demandes au titre d'un harcèlement moral, l'arrêt constate, d'abord, que quatre des six éléments invoqués ne sont pas matériellement établis.
16. Il retient, ensuite, d'une part, s'agissant de la réduction du périmètre d'intervention du salarié, qu'il n'était pas le seul dont le périmètre d'intervention avait été modifié par la suppression de tous les grands comptes, dans la mesure où la décision de réorganisation de ces grands comptes avait concerné l'ensemble des inspecteurs risques industriels, d'autre part, que l'attribution du sobriquet de « Roger Rabbit » par un supérieur hiérarchique, est à lui seul insuffisant pour laisser supposer qu'il a subi des faits de harcèlement moral.
17. En statuant ainsi, en procédant à une appréciation séparée des éléments invoqués par le salarié qu'elle a considéré comme établis et en examinant pour l'un d'eux les éléments avancés par l'employeur pour les justifier, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis et les certificats médicaux produits par ailleurs par le salarié laissaient supposer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, si l'employeur démontrait que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi principal ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [L] de sa demande en dommages-intérêts au titre du harcèlement moral, l'arrêt rendu le 17 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles du Grand Est aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles du Grand Est et la condamne à payer à M. [L] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le six mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.