LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° H 24-83.569 F-D
N° 00540
RB5
30 AVRIL 2025
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 30 AVRIL 2025
M. [O] [T] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 1er février 2024, qui, pour fraude fiscale et omissions d'écritures en comptabilité, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, dix ans d'interdiction de gérer, a ordonné l'affichage de la décision, et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. [O] [T], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la direction régionale des finances publiques de Franche-Comté et du département du Doubs, et les conclusions de M. Desportes, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 19 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [O] [T] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour omission d'écriture comptable et fraude fiscale.
3. Par jugement du 7 octobre 2021, le tribunal l'a déclaré coupable et condamné aux peines rappelées ci-dessus.
4. M. [T] a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [T] coupable d'omission d'écriture dans un document comptable, soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt, omission de déclaration dans les délais prescrits, fraude fiscale, a prononcé à son encontre, à titre de peine complémentaire, l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de dix ans, alors « que nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi ; Que l'article 1750 du code général des impôts, applicable au délit de fraude fiscale, limite l'interdiction professionnelle qu'il prévoit, à titre de peine complémentaire, aux entreprises commerciales ou industrielles et aux sociétés commerciales ; Que, dès lors, en prononçant à l'encontre de l'exposant l'interdiction de diriger, administrer, gérer ou contrôler toute entreprise ou société pendant dix ans, la cour d'appel a méconnu le principe de la légalité criminelle et violé l'article 111-3 du code pénal, ensemble l'article 131-27 du même code et les articles 1741 et 1750 du code général des impôts. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 111-3 du code pénal :
7. Il résulte de ce texte que nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi.
8. Après avoir déclaré M. [T] coupable de fraude fiscale, l'arrêt l'a condamné, notamment, à l'interdiction de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de dix ans.
9. En prononçant ainsi une interdiction de gérer toute entreprise ou toute société, alors que l'article 1750 du code général des impôts applicable au délit reproché limite une telle interdiction aux entreprises commerciales ou industrielles et aux sociétés commerciales, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
10. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
11. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 1er février 2024, mais en ses seules dispositions relatives à la peine complémentaire d'interdiction de gérer, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT que l'interdiction de gérer prononcée pour dix ans à titre de peine complémentaire contre M. [O] [T] est limitée à la direction ou à la gestion, directes ou indirectes, d'une entreprise commerciale ou industrielle ou d'une société commerciale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille vingt-cinq.