LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CH10
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 30 avril 2025
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 396 F-D
Pourvoi n° E 23-15.483
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 AVRIL 2025
La société SGB finance, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 23-15.483 contre l'arrêt rendu le 16 février 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-4), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [G] [T], domicilié [Adresse 2],
2°/ à Mme [X] [R], domiciliée [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société SGB finance, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [R], de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [T], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 mars 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 février 2023), par déclaration du 4 juillet 2019, la société SGB finance a relevé appel du jugement d'un tribunal de grande instance dans un litige l'opposant à M. [T] et Mme [R].
Examen du moyen
Enoncé du moyen
2. La société SGB finance fait grief à l'arrêt de dire que la déclaration d'appel du 4 juillet 2019 est dépourvue d'effet dévolutif et de dire n'y avoir lieu à statuer, alors :
« 1°/ qu'une déclaration d'appel, à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués, constitue l'acte d'appel conforme aux exigences de l'article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction issue du décret 25 février 2022, même en l'absence d'empêchement technique ; qu'il n'est pas exigé que la déclaration d'appel fasse une référence expresse à une telle annexe, dès lors qu'elle été jointe à l'acte de déclaration d'appel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel constate qu'une annexe, comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués, a été « envoyé(e) simultanément à l'envoi du fichier XML » constituant la déclaration d'appel ; qu'en considérant néanmoins que la déclaration d'appel, qui ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués, est dépourvue d'effet dévolutif, au motif inopérant que la déclaration d'appel ne comporte aucun renvoi exprès à l'annexe jointe, la cour d'appel a violé l'article 562 du code procédure civile et l'article 901 du même code, dans sa rédaction issue du décret 25 février 2022 ;
2°/ qu'une déclaration d'appel, à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués, constitue l'acte d'appel conforme aux exigences de l'article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction issue du décret 25 février 2022, même en l'absence d'empêchement technique ; qu'il n'est pas exigé que la déclaration d'appel fasse une référence expresse à une telle annexe, dès lors qu'elle été jointe à l'acte de déclaration d'appel, sauf à faire une interprétation trop formaliste de ce texte ; qu'en l'espèce la cour d'appel constate qu'une annexe, comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués, a été « envoyé(e) simultanément à l'envoi du fichier XML » constituant la déclaration d'appel ; qu'en considérant néanmoins que la déclaration d'appel, qui ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués, est dépourvue d'effet dévolutif, au motif inopérant que la déclaration d'appel ne comporte aucun renvoi exprès à l'annexe jointe, la cour d'appel a violé l'article 562 du code procédure civile et l'article 901 du même code, dans sa rédaction issue du décret 25 février 2022, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 901 du code de procédure civile, dans sa version issue du décret n° 2022-245 du 25 février 2022, les articles 748-1, 748-6, 930-1, alinéas 1 et 5, du code de procédure civile et l'article 4 de l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel, modifié par l'article 2 de l'arrêté du 25 février 2022 :
3. Selon le deuxième de ces textes, la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le cinquième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité :
1° la constitution de l'avocat de l'appelant ;
2° l'indication de la décision attaquée ;
3° l'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;
4° les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
Elle est signée par l'avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle.
4. Selon le troisième, les envois, remises et notifications des actes de procédure, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports, des procès-verbaux ainsi que des copies et expéditions revêtues de la formule exécutoire des décisions juridictionnelles peuvent être effectués par voie électronique dans les conditions et selon les modalités fixées par le titre XXI du livre 1er du code de procédure civile, sans préjudice des dispositions spéciales imposant l'usage de ce mode de communication.
5. Il résulte du quatrième que les procédés techniques utilisés doivent garantir, dans des conditions fixées par arrêté du garde des [Localité 4], ministre de la justice, la fiabilité de l'identification des parties à la communication électronique, l'intégrité des documents adressés, la sécurité et la confidentialité des échanges, la conservation des transmissions opérées et permettre d'établir de manière certaine la date d'envoi et, celle de la mise à disposition ou celle de la réception par le destinataire. Vaut signature, pour l'application des dispositions du code de procédure civile aux actes que les parties, le ministère public ou les auxiliaires de justice assistant ou représentant les parties notifient ou remettent à l'occasion des procédures suivies devant les juridictions des premier et second degrés, l'identification réalisée, lors de la transmission par voie électronique, selon les modalités prévues au premier alinéa.
6. En matière de procédure avec représentation obligatoire, selon le cinquième, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique. Un arrêté du garde des [Localité 4] définit les modalités des échanges par voie électronique.
7. Il résulte du dernier que, lorsqu'un document doit être joint à un acte, ledit acte renvoie expressément à ce document. Ce document est communiqué sous la forme d'un fichier séparé du fichier visé à l'article 3. Ce document est un fichier au format PDF, produit soit au moyen d'un dispositif de numérisation par scanner si le document à communiquer est établi sur support papier, soit par enregistrement direct au format PDF au moyen de l'outil informatique utilisé pour créer et conserver le document original sous forme numérique.
8. La Cour de cassation a jugé que la circonstance que la déclaration d'appel ne renvoie pas expressément à une annexe comportant les chefs de jugement critiqués ne pouvait donner lieu à nullité de l'acte en application de l'article 114 précité et que cette circonstance ne saurait davantage priver la déclaration d'appel de son effet dévolutif, une telle conséquence étant disproportionnée au regard du but poursuivi (2e Civ., 7 mars 2024, pourvoi n° 22-20.035, publié ; 2e Civ., 7 mars 2024, pourvoi n° 22-23.522, publié).
9. Pour dire que la déclaration d'appel du 4 juillet 2019 était dépourvue d'effet dévolutif, la cour d'appel retient qu'elle ne comportait aucune référence à une annexe et que, dès lors, le document distinct envoyé simultanément à la déclaration d'appel ne pouvait être considéré comme faisant corps avec celle-ci.
10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par fausse application, les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 février 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;
Condamne M. [T] et Mme [R] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le trente avril deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.