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11/02/2025 | FRANCE | N°C2500154

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 février 2025, C2500154


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° R 24-80.173 F-D


N° 00154




ODVS
11 FÉVRIER 2025




CASSATION SANS RENVOI




M. BONNAL président,
















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 11 FÉVRIER 2025




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M. [D] [B], la société [B] et fils et la société [5] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 6 novembre 2023, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 31 janvier...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 24-80.173 F-D

N° 00154

ODVS
11 FÉVRIER 2025

CASSATION SANS RENVOI

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 11 FÉVRIER 2025

M. [D] [B], la société [B] et fils et la société [5] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 6 novembre 2023, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 31 janvier 2023, pourvoi n° 22-83.035), a prononcé sur la requête en rectification d'erreur matérielle de la société [2].

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de M. [D] [B] et la société [B] et fils, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [5], les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société [3], et les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société [2], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le tribunal correctionnel a déclaré la société [2] (la société) coupable, parmi d'autres prévenus, de recel de cuivre, commis au préjudice de la société [4], l'a condamnée à une certaine peine et, statuant sur l'action civile, a reçu la société [4] en sa constitution de partie civile, a déclaré la société [2] solidairement responsable avec d'autres prévenus de l'ensemble de son préjudice et a renvoyé pour le surplus à une audience ultérieure sur intérêts civils.

3. La cour d'appel, infirmant partiellement le jugement sur l'action publique, a relaxé la société, mais a confirmé le jugement sur l'action civile.

4. La société a déposé une requête en rectification d'une erreur matérielle affectant le dispositif civil de cet arrêt.

Examen des moyens

Sur le premier moyen proposé pour la société [B] et fils et M. [D] [B], pris en ses deux premières branches, et le moyen unique proposé pour la société [5]

Enoncé des moyens

5. Le moyen proposé pour la société [B] et fils et M. [D] [B] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a constaté que l'arrêt n° 572 du 18 juillet 2019 était entaché d'une erreur matérielle, a ordonné la rectification des motifs de l'arrêt sur l'action civile en ce sens que la mention « les dispositions civiles du jugement seront donc confirmées » doit être remplacée par :« confirme la décision des premiers juges en ce qu'ils ont déclaré [K] [E], [F] [P], [I] [V], [I] [S] ou [C] [N], [Y] [A], [D] [B], la SARL [B] et fils, la SA [5] solidairement responsables du préjudice subi par l'[4] (devenu [3]) partie civile ; infirme la décision en ce qu'elle a déclaré la SA [2] solidairement responsable du préjudice subi par l'[4] (devenu [3]) partie civile » et a ordonné la rectification du dispositif de l'arrêt sur l'action civile en ce sens que la mention « confirme le jugement déféré » doit être remplacée par : « infirme le jugement déféré dans ses dispositions concernant la SA [2] ; confirme le jugement dans l'ensemble de ses autres dispositions civiles et, statuant du chef infirmé, déboute l'[4] (devenu [3]) de ses demandes à l'égard de la SA [1] compte tenu de la relaxe », alors :

« 1°/ qu'il n'appartient pas à une juridiction saisie en application de l'article 710 du code de procédure pénale de modifier, sous couvert d'interprétation ou de rectification, la chose jugée en substituant à la décision initiale des dispositions nouvelles qui ne seraient pas la réparation d'erreurs matérielles ; qu'au cas d'espèce, les motifs de l'arrêt d'appel du 18 juillet 2019 sur l'action civile, qui disaient qu'il y avait lieu de confirmer les dispositions civiles du jugement entrepris du 29 juin 2018, étaient en parfaite conformité avec son dispositif, qui avait prononcé cette confirmation ; qu'en décidant néanmoins que l'arrêt du 18 juillet 2019 était affecté d'une erreur matérielle en ce qu'il n'aurait pas dû déclarer la société [2] responsable du préjudice subi par la partie civile dès lors qu'elle avait été relaxée sur les dispositions pénales, le juge du fond, qui a modifié la chose jugée, a violé l'article 710 du code de procédure pénale ;

2°/ que le défaut de concordance entre une relaxe pénale et la condamnation civile du prévenu à indemniser la partie civile constitue une erreur de droit et non une erreur matérielle ; qu'au cas d'espèce, à supposer que l'arrêt du 18 juillet 2019 fût affecté d'une erreur de droit, en ce qu'il avait tout à la fois relaxé de la société [2] des fins de la poursuite et déclaré cette dernière solidairement responsable du préjudice subi par la partie civile, la seule voie de recours ouverte était le pourvoi en cassation et non la requête en rectification d'erreur matérielle ; qu'en accueillant cette requête, le juge du fond a violé l'article 710 du code de procédure pénale, ensemble l'article 567 du même code. »

6. Le moyen proposé pour la société [5] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la rectification de l'arrêt sur l'action civile rendu le 18 juillet 2019 en remplaçant, dans les motifs, la mention « les dispositions civiles du jugement seront donc confirmées » par les énonciations « confirme la décision des premiers juges en ce qu'ils ont déclaré [K] [E], [F] [P], [I] [V], [I] [S] ou [C] [N], [Y] [A], [D] [B], la SARL [B] et Fils et la SA [5] solidairement responsables du préjudice subi par l'[4] (devenu [3]) partie civile ; infirme la décision en ce qu'elle a déclaré SA [2] solidairement responsable du préjudice subi par l'[4] (devenu [3]) partie civile » et en remplaçant, dans le dispositif de l'arrêt, la mention « confirme le jugement déféré » par « infirme le jugement déféré dans ses dispositions concernant la SA [2] ; confirme le jugement dans l'ensemble de ses autres dispositions civiles et, statuant du chef infirmé, déboute l'[4] ([3]) de ses demandes à l'égard de la SA [1] compte tenu de la relaxe », alors « qu'il n'appartient pas à une juridiction saisie en application de l'article 710 du code de procédure pénale de modifier, sous le couvert d'interprétation ou de rectification, la chose jugée en substituant à la décision initiale des dispositions nouvelles qui ne seraient pas la réparation d'erreurs matérielles, et notamment de restreindre ou d'accroître les droits consacrés par une précédente décision ; qu'en retenant, pour altérer les motifs et le dispositif de l'arrêt prononcé le 18 juillet 2019, que cette décision présentait « un défaut de concordance entre le dispositif de l'action publique et le dispositif de l'action civile », quand la confirmation du jugement sur l'action civile, en dépit de la relaxe prononcée par infirmation du jugement, procédait d'une erreur de droit et donnait ouverture à cassation pour violation de l'article 2 du code de procédure pénale, en sorte que l'erreur réparée n'était pas purement matérielle, la cour d'appel a violé l'article 710 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

7. Les moyens sont réunis.

Vu l'article 710 du code de procédure pénale :

8. Il n'appartient pas à la juridiction saisie en application de ce texte de modifier, sous le couvert d'interprétation ou de rectification, la chose jugée en substituant à la décision initiale des dispositions nouvelles qui ne seraient pas la réparation d'erreurs matérielles.

9. Pour ordonner la rectification de l'arrêt du 18 juillet 2019, d'une part, en substituant aux motifs confirmant les dispositions civiles du jugement l'énonciation selon laquelle cette décision est infirmée à l'égard de la société, d'autre part, en substituant au dispositif confirmant le jugement sur l'action civile l'énonciation selon laquelle cette décision est infirmée à l'égard de cette société, l'arrêt attaqué énonce que l'arrêt dont la rectification est demandée a tout à la fois relaxé la société et confirmé le jugement la condamnant solidairement avec d'autres prévenus à la réparation du préjudice causé à la partie civile.

10. Le juge ajoute qu'il existe donc un défaut de concordance entre le dispositif sur l'action publique et le dispositif sur l'action civile et qu'il s'agit d'une erreur matérielle, l'arrêt initial ayant simplement omis d'extraire le nom de la société de la liste des dix prévenus solidairement condamnés au paiement de dommages-intérêts à la partie civile, ce que confirment les dispositions relatives à l'article 475-1 du code de procédure pénale qui condamnent tous les autres prévenus sur ce fondement, sans y ajouter la société.

11. En modifiant ainsi tout à la fois les motifs et la portée du dispositif de l'arrêt, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

12. La cassation est par conséquent encourue, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre grief.

Portée et conséquences de la cassation

13. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen de cassation proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux en date du 6 novembre 2023 ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

REJETTE la requête ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge où à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2500154
Date de la décision : 11/02/2025
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 06 novembre 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 fév. 2025, pourvoi n°C2500154


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Krivine et Viaud, SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:C2500154
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