LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 février 2025
Cassation
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 80 F-D
Pourvoi n° U 23-14.185
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [M].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 15 décembre 2022.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 FÉVRIER 2025
1°/ Mme [F] [M], domiciliée [Adresse 2],
2°/ l'Union départementale des associations familiales (UDAF), dont le siège est [Adresse 3], mandataire judiciaire à la protection des majeurs, agissant en qualité de curateur de Mme [M],
ont formé le pourvoi n° U 23-14.185 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2021 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ au Conseil départemental de la Réunion, dont le siège est [Adresse 4],
2°/ au procureur général près la cour d'appel de Saint-Denis, domicilié en son parquet général, [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de Mme [M], et de l'UDAF, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat du conseil départemental de la Réunion, et l'avis de Mme Caron-Deglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 décembre 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Sara, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 24 novembre 2021) et les productions, [Y] [M] est né le 31 août 2017 de Mme [M].
2. Après l'établissement, le 3 juin 2020, d'un procès-verbal de recueil de l'enfant comportant le consentement de Mme [M] à l'adoption de celui-ci, le président du conseil départemental de La Réunion a pris un arrêté d'admission de l'enfant en qualité de pupille de l'Etat.
3. Après avoir formé appel contre le jugement du 18 décembre 2020 ayant rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté, Mme [M] a, par jugement du 24 février 2021, exécutoire par provision, été placée sous curatelle renforcée pour une durée de vingt-quatre mois, l'Union départementale des associations familiales de La Réunion (UDAF) étant désignée en qualité de curateur à la personne et aux biens. Un jugement du 24 novembre 2021, également exécutoire par provision, a maintenu cette mesure pour une durée de soixante mois.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. Mme [M], assisté de son curateur, l'UDAF, fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 août 2020 portant admission de l'enfant [Y] [M] en qualité de pupille de l'État, sa demande subsidiaire de droit de visite à l'égard de l'enfant, sa demande d'enquête sociale et de déclarer son appel mal fondé, alors « qu'une personne en curatelle ne peut introduire une action en justice ou y défendre sans l'assistance du curateur ; que Mme [M] a été placée sous curatelle renforcée par jugement du 24 février 2021 pour une durée de 24 mois, puis par jugement du 24 novembre 2021 pour une durée de 60 mois ; qu'en déboutant Mme [M] de ses demandes en annulation de l'arrêté portant admission de son enfant en qualité de pupille de l'État sans qu'il résulte des énonciations de l'arrêt ni d'aucune pièce de la procédure que son curateur ait été appelé à l'instance d'appel afin de l'assister, la cour d'appel a violé l'article 468 alinéa 3 du code civil. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
5. Le conseil départemental de La Réunion conteste la recevabilité du moyen en soutenant qu'il est nouveau et mélangé de fait et de droit.
6. Le moyen, pris de la violation de l'article 468, alinéa 3, du code civil, en l'absence du curateur pour assister un majeur protégé partie à l'instance d'appel, peut-être invoqué par ce dernier pour la première fois devant la Cour de cassation.
7. Il est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article 468, alinéa 3, du code civil :
8. Selon ce texte, la personne sous curatelle ne peut introduire une action en justice ou y défendre sans l'assistance de son curateur.
9. L'arrêt, rendu postérieurement à l'ouverture de la mesure de protection de Mme [M], confirmant le jugement déféré, rejette les demandes d'annulation de l'arrêté d'admission de l'enfant en qualité de pupille de l'Etat et de droit de visite sur l'enfant formées par Mme [M], sans qu'il résulte de ses énonciations ni d'aucune pièce de la procédure que celle-ci ait été assistée de son curateur.
10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion autrement composée ;
Condamne le conseil départemental de La Réunion aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille vingt-cinq.