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15/01/2025 | FRANCE | N°52500037

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 janvier 2025, 52500037


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 15 janvier 2025








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 37 F-D


Pourvoi n° C 23-19.460


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [Z].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de ca

ssation
en date du 25 mai 2023.


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 janvier 2025

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 37 F-D

Pourvoi n° C 23-19.460

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [Z].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 25 mai 2023.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JANVIER 2025

M. [E] [Z], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 23-19.460 contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-7), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Manpower France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à la société Action logement services, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

3°/ à la société Produits de revêtement du bâtiment, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Deltort, conseiller, les observations de la SAS Boucard - Capron - Maman, avocat de M. [Z], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Action logement services, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Produits de revêtement du bâtiment, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Manpower France, après débats en l'audience publique du 4 décembre 2024 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Deltort, conseiller rapporteur, M. Flores, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 novembre 2022), M. [Z], engagé par la société Manpower France, a été mis à la disposition, en qualité d'employé administratif, de la société Produits de revêtement du bâtiment (PRB), puis, en qualité d'agent commercial, de la société Action logement services (ALS) suivant plusieurs contrats de mission successifs du 29 mars 2018 au 31 octobre 2018 et du 13 décembre 2018 au 1er février 2019.

2. Le 2 avril 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'une indemnité de requalification et de dommages-intérêts au titre de la rupture de la relation contractuelle. Il a formé des demandes additionnelles en paiement à l'encontre des trois sociétés de diverses sommes au titre d'une indemnité de requalification et de dommages-intérêts pour violation des dispositions relatives au travail temporaire et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Pour la première fois en cause appel, le salarié a sollicité la requalification des contrats de travail temporaire en contrat à durée indéterminée.

Examen du moyen

Sur le moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande en paiement d'une indemnité de requalification et de dommages-intérêts pour violation des dispositions relatives au travail temporaire

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait ce grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que pour justifier, en appel, les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux ; qu'à peine d'irrecevabilité d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, sous réserve des exceptions prévues par les articles 564 à 567 du code de procédure civile ; qu'il en résulte que si les prétentions nouvelles sont irrecevables, sous réserve de diverses exceptions, lorsqu'elles sont formées pour la première fois en cause d'appel, il en va différemment des moyens présentés pour la première fois en cause d'appel ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la demande en requalification du contrat de mission formée par M. [E] [Z] et pour, en conséquence, déclarer irrecevables les autres demandes de M. [E] [Z], que M. [E] [Z] formait une demande de requalification de ses contrats de travail temporaires pour la première fois en cause d'appel, quand elle constatait que M. [E] [Z] avait formé, en première instance, une demande d'indemnité de requalification et des demandes subséquentes relatives à la rupture du travail et quand la demande du salarié en requalification de ses contrats de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée s'analysait, non pas comme une véritable prétention, mais comme le fondement juridique de la demande d'indemnité de requalification et des demandes subséquentes relatives à la rupture du travail formées par M. [E] [Z] en première instance, et, donc, comme un simple moyen, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 563 et 564 du code de procédure civile ;

2°/ qu'à titre subsidiaire, les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont le complément nécessaire ; que la demande de requalification d'un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée, parce qu'elle en est le préalable, est le complément nécessaire de la demande d'indemnité de requalification d'un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée formée par le salarié en première instance ; qu'en retenant le contraire, pour déclarer irrecevable la demande en requalification du contrat de mission formée par M. [E] [Z] et pour, en conséquence, déclarer irrecevables les autres demandes de M. [E] [Z], la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 566 du code de procédure civile et de l'article L. 1251-41 du code du travail ;

3°/ qu'à titre également subsidiaire, la cour d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de prétentions nouvelles en cause d'appel ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile ; qu'aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ; que la demande du salarié de requalification d'un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée et la demande du salarié d'indemnité de requalification d'un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée, qui tendent toutes deux à tirer les conséquences de la méconnaissance des règles relatives au travail temporaire, tendent aux mêmes fins ; qu'en déclarant, dès lors, irrecevable la demande en requalification du contrat de mission formée par M. [E] [Z] en raison de sa nouveauté en cause d'appel et pour, en conséquence, déclarer irrecevables les autres demandes de M. [E] [Z], sans rechercher, même d'office, après avoir relevé que M. [E] [Z] avait formé, en première instance, une demande d'indemnité de requalification, si la demande en requalification du contrat de mission formée par M. [E] [Z] ne tendait pas aux mêmes fins que la demande d'indemnité de requalification qu'il avait formée en première instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

4. La société Manpower France conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que la cour d'appel n'a pas dans le dispositif de l'arrêt, déclaré irrecevables les demandes du salarié en paiement d'une indemnité de requalification et de dommages-intérêts pour violation des dispositions relatives au travail temporaire.

5. La cour d'appel n'ayant, en effet, pas déclaré irrecevable, ainsi qu'il le lui était demandé, la demande en paiement d'une indemnité de requalification et de dommages-intérêts pour violation des dispositions relatives au travail temporaire, le moyen, qui dénonce en réalité une omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation.

6. En conséquence, le moyen n'est pas recevable.

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande du salarié en requalification du contrat de mission et de déclarer en conséquence irrecevables ses demandes additionnelles formées devant la juridiction prud'homale au titre du licenciement et des indemnités de rupture

7. Le salarié fait ce grief à l'arrêt, alors « que la cour d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de prétentions nouvelles en cause d'appel ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile ; qu'aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ; que la demande du salarié de requalification d'un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée et la demande du salarié d'indemnité de requalification d'un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée, qui tendent toutes deux à tirer les conséquences de la méconnaissance des règles relatives au travail temporaire, tendent aux mêmes fins ; qu'en déclarant, dès lors, irrecevable la demande en requalification du contrat de mission formée par M. [E] [Z] en raison de sa nouveauté en cause d'appel et pour, en conséquence, déclarer irrecevables les autres demandes de M. [E] [Z], sans rechercher, même d'office, après avoir relevé que M. [E] [Z] avait formé, en première instance, une demande d'indemnité de requalification, si la demande en requalification du contrat de mission formée par M. [E] [Z] ne tendait pas aux mêmes fins que la demande d'indemnité de requalification qu'il avait formée en première instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 564 à 567 du code de procédure civile :

8. Il résulte de ces textes qu'une cour d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de prétentions nouvelles, est tenue de l'examiner, même d'office, au regard de toutes les exceptions qu'ils prévoient.

9. Selon l'article L. 1251-41 du code du travail, si les juges font droit à la demande du salarié en requalification d'un contrat de mission en contrat de travail à durée indéterminée, ils lui accordent une indemnité, à la charge de l'entreprise utilisatrice, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

10. Pour déclarer irrecevable la demande en requalification d'un contrat de mission en contrat à durée indéterminée, l'arrêt retient qu'il se déduit de l'article L. 1251-41 du code du travail que le versement de l'indemnité de requalification résulte du bien-fondé de cette demande et qu'en conséquence, la demande en requalification ne peut s'analyser comme l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de la demande d'indemnité de requalification.

11. En statuant ainsi, alors que la demande nouvelle en requalification d'un contrat de mission en contrat à durée indéterminée tend aux mêmes fins que la demande initiale en paiement d'une indemnité de requalification, même si le fondement juridique est différent, à savoir tirer les conséquences de la méconnaissance des règles relatives au travail temporaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables la demande de M. [Z] en requalification du contrat de mission et ses demandes additionnelles formées devant le conseil de prud'hommes au titre du licenciement et des indemnités de rupture, l'arrêt rendu le 25 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne les sociétés Manpower France, Produits de revêtement du bâtiment et Action logement services aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés Manpower France et Produits de revêtement du bâtiment et condamne les sociétés Manpower France, Produits de revêtement du bâtiment et Action logement services à payer à la SAS Boucard - Capron - Maman la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500037
Date de la décision : 15/01/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix en Provence, 25 novembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jan. 2025, pourvoi n°52500037


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SAS Boucard-Capron-Maman, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500037
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