LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 4 décembre 2024
Rejet
M. SOMMER, président
Arrêt n° 1252 FS-B
Pourvoi n° Z 23-14.259
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 DÉCEMBRE 2024
La société Vivauto PL, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 23-14.259 contre l'arrêt rendu le 2 février 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-5), dans le litige l'opposant à M. [O] [N], domicilié [Adresse 3], défendeur à la cassation.
M. [N] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, Ã l'appui de son recours, six moyens de cassation.
Le demandeur au pourvoi incident invoque, Ã l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Quellec, conseiller, les observations de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de la société Vivauto PL, de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [N], et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 6 novembre 2024 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Le Quellec, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, M. Flores, Mme Deltort, conseillers, Mmes Thomas-Davost, Laplume, Rodrigues, Segond, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 février 2023), M. [N] a été engagé en qualité de contrôleur technique des véhicules poids lourds, à compter du 1er février 2016, par la société Vivauto PL.
2. Le 13 avril 2018, le salarié a été licencié.
3. Le 23 novembre 2018, il a saisi la juridiction prud'homale en contestation de son licenciement et en paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième, quatrième, cinquième, sixième moyens du pourvoi principal de l'employeur et sur les premier et second moyens du pourvoi incident du salarié
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le troisième moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre d'indemnité pour travail dissimulé, alors :
« 1°/ que pour juger que la société Vivauto PL avait mis à la disposition de M. [N] un logement de fonction de manière gratuite, l'arrêt retient qu'"il est établi par les attestations précises et concordantes de [K] [S] et [Z] [X], qui emportent la conviction, que M. [N] était logé par son employeur dans un bâtiment de l'entreprise constitué d'une pièce principale d'environ 45 m2 avec un coin cuisine, douche et wc au premier étage du centre Autovision [Adresse 4], dans lequel il vivait et recevait ses amis. Le salarié produit en outre des factures d'achat d'éléments mobiliers acquis en 2016 qui corroborent le fait invoqué qu'il avait dû meubler ce logement" et que "M. [N] fait exactement valoir que l'indication d'une adresse personnelle distincte de celle du logement de fonction octroyé, dans l'acte de saisine du conseil de prud'hommes et sur ses factures de mobilier n'est pas un élément pertinent conduisant à rejeter sa demande" ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'exposante qui avait valoir, d'une part, que "durant toute l'exécution de son contrat de travail, M. [N] n'a déclaré qu'une seule adresse pour son domicile : [Adresse 3] [Localité 1]. Cette adresse est également portée sur l'offre de crédit émise à son nom, le 22 juin 2017", la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que le délit de travail dissimulé par dissimulation partielle d'emploi salarié est caractérisé par l'absence volontaire de déclaration préalable à l'embauche, la mention délibérée sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui véritablement exécuté par le salarié ou le défaut intentionnel d'établissement des déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale ; que, pour condamner l'employeur à payer à M. [N] la somme de 15 178,56 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt - après avoir retenu que le salarié justifiait de la mise à disposition d'un logement à titre gratuit - énonce que "l'intention de dissimuler l'avantage en nature ainsi accordé par l'employeur est caractérisée en l'espèce" ; qu'en statuant ainsi, cependant que le manquement de l'employeur à son obligation de faire figurer sur le bulletin de paie la nature et le montant des avantages en nature et de payer les cotisations sociales en résultant ne suffit pas à caractériser une dissimulation volontaire d'emploi, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-5 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;
3°/ plus subsidiairement, que le délit de travail dissimulé par dissimulation partielle d'emploi salarié est caractérisé par l'absence volontaire de déclaration préalable à l'embauche, la mention délibérée sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui véritablement exécuté par le salarié ou le défaut intentionnel d'établissement des déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale ; que, pour condamner l'employeur à payer à M. [N] la somme de 15 178,56 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt - après avoir retenu que le salarié justifiait de la mise à disposition d'un logement à titre gratuit - énonce que "l'intention de dissimuler l'avantage en nature ainsi accordé par l'employeur est caractérisée en l'espèce" ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'élément intentionnel de l'omission de la mention de l'avantage en nature de logement sur les bulletins de paie et de déclaration de celui-ci aux organismes sociaux concernés, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-5 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016. »
Réponse de la Cour
6. La fourniture, par l'employeur, d'un logement constitue un avantage en nature qu'il y a lieu d'inclure dans le montant de la rémunération du salarié et qui doit être indiqué sur le bulletin de paie qui lui est remis.
7. Selon l'article L. 8221-5, 3°, du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
8. Après avoir jugé, à bon droit, que la mise à disposition d'un logement de fonction de manière gratuite était constitutive d'un avantage en nature qui devait, à ce titre, être évalué pour être soumis à cotisations sociales, la cour d'appel, qui a constaté, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que le salarié était logé par son employeur dans un bâtiment de l'entreprise, a, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, retenu que l'intention de l'employeur de dissimuler cet avantage, non indiqué sur les bulletins de paie du salarié, était caractérisée.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille vingt-quatre.