LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 novembre 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1179 F-B
Pourvoi n° U 21-13.648
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 NOVEMBRE 2024
1°/ M. [R] [N],
2°/ Mme [W] [U], épouse [N],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
ont formé le pourvoi principal et le pourvoi additionnel n° U 21-13.648 contre l'arrêt rendu le 15 décembre 2020 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre civile TGI) et l'ordonnance n° 2020/27 rendue le 16 septembre 2020 par le premier président de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, dans le litige les opposant à la société Caisse d'épargne CEPAC, société anonyme à directoire, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la Banque de la Réunion, défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leurs pourvois principal et additionnel, respectivement trois moyens et un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vendryes, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. et Mme [N], de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société Caisse d'épargne CEPAC, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 novembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Vendryes, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 15 décembre 2020) et les productions, à la suite d'un commandement valant saisie immobilière délivré le 19 avril 2019 en vertu d'un acte notarié de prêt, la Caisse d'épargne CEPAC (la CEPAC), venant aux droits de la Banque de la Réunion, a assigné M. et Mme [N] à comparaître à une audience d'orientation devant un juge de l'exécution.
2. Suivant déclaration déposée au greffe de la cour d'appel le 9 septembre 2020, la CEPAC a relevé appel du jugement d'orientation l'ayant déclarée irrecevable en certaines demandes et déboutée du surplus.
3. Le 16 septembre 2020, elle a remis au premier président de la cour d'appel une requête en vue d'être autorisée à assigner à jour fixe et a été autorisée, par ordonnance du même jour, à faire délivrer l'assignation pour l'audience du 20 octobre 2020.
Recevabilité du pourvoi principal et du pourvoi additionnel en tant qu'ils sont dirigés contre l'ordonnance du premier président de la cour d'appel du 16 septembre 2020, contestée par la défense
Vu les articles 537 et 917, alinéa 1er, du code de procédure civile et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
4. Selon le premier et le deuxième de ces textes, l'ordonnance par laquelle le premier président de la cour d'appel fixe la date à laquelle l'affaire sera appelée par priorité constitue une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours, fût-ce pour excès de pouvoir.
5. Il résulte du dernier qu'une telle ordonnance ne peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation que lorsqu'est caractérisée une atteinte au droit à l'accès au juge d'appel.
6. Le premier moyen du pourvoi principal et le premier moyen du pourvoi additionnel qui font grief à l'arrêt d'autoriser une telle assignation ne caractérisent pas une atteinte au droit à l'accès au juge d'appel.
7. Le pourvoi principal et le pourvoi additionnel en tant qu'il sont dirigés contre cette ordonnance sont, dès lors, irrecevables.
Examen des moyens du pourvoi principal en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt du 15 décembre 2020
Sur le troisième moyen
8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
9. M. et Mme [N] font grief à l'arrêt de déclarer recevable l'appel de la CEPAC, alors « que la cassation entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution de la décision cassée ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que par conséquent, la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen, qui attaque l'ordonnance du 16 septembre 2020, entraînera l'annulation de l'arrêt attaqué par le présent moyen, qui en est la suite, en application de l'article 625 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
10. L'irrecevabilité du pourvoi principal en tant qu'il est dirigé contre l'ordonnance du premier président du 16 septembre 2020 rend ce moyen sans portée.
Sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
11. M. et Mme [N] font grief à l'arrêt de déclarer recevable l'appel de la CEPAC, alors « qu'en toute hypothèse, l'appel contre le jugement d'orientation est formé, instruit et jugé selon la procédure à jour fixe ; qu'à peine d'irrecevabilité, l'appelant doit, au plus tard dans les huit jours de la déclaration d'appel, présenter au premier président une requête en vue d'être autorisé à assigner à jour fixe ; qu'une requête au premier président est présentée, dans le cas où l'instance devant la cour implique constitution d'avocat, dans les conditions prévues à l'article 930-1 ; qu'aux termes de ce dernier texte, à peine l'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique ; qu'en application de l'article 2 de l'arrêté de l'arrêté du l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la Justice du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel, applicable au 1er septembre 2020, lorsqu'ils sont effectués par voie électronique entre un avocat et la juridiction, dans le cadre d'une procédure avec représentation obligatoire devant la cour d'appel ou son premier président, les envois, remises et notifications mentionnés à l'article 748-1 du code de procédure civile doivent répondre aux garanties fixées par le présent arrêté ; qu'en l'espèce, suivant déclaration d'appel déposée au greffe de la cour d'appel le 9 septembre 2020, la CEPAC a interjeté appel du jugement d'orientation du 27 août 2020 ; que le 16 septembre 2020, elle a déposé au greffe sur support papier une requête au premier président en vue d'être autorisée à assigner à jour fixe ; qu'en retenant, pour déclarer néanmoins l'appel recevable, que la requête au premier président pouvait être déposée sur support papier, seuls les actes de procédure destinés à la cour d'appel devant être remis par voie électronique, la cour d'appel a violé les articles R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution et 919, 930-1 et 959 du code de procédure civile, ensemble l'article 2 de l'arrêté du l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la Justice du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel. »
Réponse de la Cour
12. Aux termes de l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, l'appel contre le jugement d'orientation est formé, instruit et jugé selon la procédure à jour fixe sans que l'appelant n'ait à se prévaloir dans sa requête d'un péril.
13. En vertu de l'article 919, alinéa 3, du code de procédure civile, la requête sollicitant l'autorisation d'assigner à jour fixe peut être présentée au premier président au plus tard dans les huit jours de la déclaration d'appel.
14. Selon l'article 930-1, alinéas 1er et 5, du code de procédure civile, en matière de procédure avec représentation obligatoire, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique. Un arrêté du garde des Sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique.
15. Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d'appel, applicable à compter du 1er septembre 2020, lorsqu'ils sont effectués par voie électronique entre avocats, ou entre un avocat et la juridiction, ou entre le ministère public et un avocat, ou entre le ministère public et la juridiction, dans le cadre d'une procédure avec ou sans représentation obligatoire devant la cour d'appel ou son premier président, les envois, remises et notifications mentionnés à l'article 748-1 du code de procédure civile doivent répondre aux garanties fixées par le présent arrêté.
16. Si cette disposition est applicable, non seulement aux procédures devant la cour d'appel, mais également devant son premier président, la méconnaissance d'une telle prescription propre aux procédés techniques utilisés en matière de communication électronique, ne saurait avoir pour effet de rendre l'appel irrecevable, une telle conséquence étant disproportionnée au regard du but poursuivi.
17. Ayant relevé que la requête devant le premier président a été déposée sur support papier, mais que l'article 2 de l'arrêté du 20 mai 2020, relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel, entré en vigueur le 1er septembre 2020, se bornait à fixer les garanties de sécurité et les modalités de transmission des documents par la voie électronique, notamment les actes de procédure, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, la recevabilité de l'appel.
18. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DÉCLARE IRRECEVABLES le pourvoi principal et le pourvoi additionnel en ce qu'ils sont dirigés contre l'ordonnance du premier président de la cour d'appel du 16 septembre 2020 ;
REJETTE le pourvoi dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel du 15 décembre 2020 ;
Condamne M. et Mme [N] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [N] et les condamne à payer à la Caisse d'épargne CEPAC, venant aux droits de la Banque de la Réunion, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en l'audience publique du vingt-huit novembre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.