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27/11/2024 | FRANCE | N°52401232

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2024, 52401232


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CZ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 27 novembre 2024








Rejet




M. SOMMER, président






Arrêt n° 1232 FS-B


Pourvoi n° H 22-20.886








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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La Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT (FGMM-CFDT), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 22-20.886 contre l'arrêt rendu le 13 avril 20...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 novembre 2024

Rejet

M. SOMMER, président

Arrêt n° 1232 FS-B

Pourvoi n° H 22-20.886

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 NOVEMBRE 2024

La Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT (FGMM-CFDT), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 22-20.886 contre l'arrêt rendu le 13 avril 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à la société Thales AVS France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Thales AVS France, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 octobre 2024 où étaient présents M. Sommer, président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, M. Huglo conseiller doyen, Mmes Ott, Sommé, Bouvier, Bérard, M. Dieu, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, Arsac, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 13 avril 2022), le Groupe Thales a engagé, à compter de l'année 2017, un processus de simplification de ses différentes structures juridiques en France par la fusion de sociétés spécialisées dans le même type d'activité ou dans des activités connexes. Treize entités ont ainsi été regroupées en trois sociétés : Thales Land and Air Systems France, Thales DMS France et Thales AVS France.

2. Un accord de groupe a été conclu le 23 octobre 2017 aux fins d'organiser les négociations nécessaires à l'élaboration des accords applicables, in fine, à l'ensemble des salariés du nouveau périmètre créé par ces opérations de restructuration. Cet accord relatif aux négociations a été conclu pour une période de seize mois.

3. La fusion des sociétés a été réalisée le 1er janvier 2018.

4. Un accord intitulé « Accord sur la poursuite des négociations au sein de la société Thales AVS France SAS liées au projet de simplification des structures juridiques du groupe Thales en France » a été signé le 28 janvier 2021 entre la société Thales AVS France, la CFE-CGC et la CGT, deux des trois organisations syndicales représentatives.

5. La Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT (la fédération CFDT), également représentative, a, par lettre du 1er mars 2021, indiqué à la société qu'elle considérait que cet accord n'avait aucune valeur juridique puis a saisi le tribunal judiciaire par assignation à jour fixe délivrée le 26 mars 2021 à la société Thales AVS France, à la Fédération des cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC et à la Fédération des travailleurs de la métallurgie (FTM-CGT), afin d'obtenir à titre principal l'annulation de l'accord du 28 janvier 2021 et à titre subsidiaire son inopposabilité.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. La fédération CFDT fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ qu'en application de l'article L. 2261-14-2 du code du travail, dès lors qu'est envisagée une fusion, une cession, une scission ou toute autre modification juridique qui aurait pour effet la mise en cause d'une convention ou d'un accord, les employeurs des entreprises concernées et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise qui emploie les salariés dont les contrats de travail sont susceptibles d'être transférés peuvent négocier et conclure une convention ou un accord de substitution prévu au premier alinéa de l'article 2261-14 du même code ; que la durée de cette convention ou de cet accord, qui s'applique à l'exclusion des stipulations portant sur le même objet des conventions et accords applicables dans l'entreprise ou l'établissement dans lequel les contrats de travail sont transférés, ne peut excéder trois ans ; qu'en l'espèce, il est constant que l'accord collectif du 28 janvier 2021 conclu au sein de la société absorbante Thales AVS France dispose que « les parties conviennent de prolonger jusqu'au 31 décembre 2022 pour tous les salariés des nouveaux établissements des sociétés issues de la fusion, les dispositions des accords qui étaient applicables au sein de leur société absorbée avant l'opération de fusion et qui n'ont pas encore faire l'objet d'une harmonisation », ce dont il résultait que cet accord collectif a prolongé la durée de vie des dispositions conventionnelles mises en cause depuis le 1er janvier 2018 jusqu'au 31 décembre 2022, soit au-delà du délai légal de trois ans fixé à l'article L. 2261-14-2 du code du travail ; qu'en déboutant néanmoins la fédération syndicale de ses demandes, aux motifs erronés que l'accord du 28 janvier 2021 ne peut être regardé comme un accord de substitution au sens des articles L. 2261-14 et L. 2261-14-2 du code du travail et qu'il doit être considéré comme un accord de droit commun dont l'objet est l'organisation de la poursuite des négociations au sein de la société Thales AVS France, quand cet accord collectif litigieux s'était placé sur le régime des accords de substitution en prolongeant les effets des accords de substitution conclus au sein des entreprises absorbées avant les opérations de fusion-absorption, la cour d'appel a violé les articles L. 2261-14 et L. 2261-14-2 du code du travail, ensemble l'accord collectif du 28 janvier 2021 ;

2°/ que la convention ou l'accord de substitution conclu en application de l'article L. 2261-14-2 du code du travail, qui s'applique à l'exclusion des stipulations portant sur le même objet des conventions et accords applicables dans l'entreprise ou l'établissement dans lequel les contrats de travail sont transférés, a une durée maximale de trois ans à l'issue de laquelle les conventions et accords applicables dans l'entreprise ou dans l'établissement dans lequel les contrats de travail des salariés ont été transférés s'appliquent à ces salariés ; qu'un accord collectif ne peut déroger à ces dispositions d'ordre public ; qu'en l'espèce, il est constant que l'accord collectif du 28 janvier 2021 conclu au sein de la société absorbante Thales AVS France dispose que ''les parties conviennent de prolonger jusqu'au 31 décembre 2022 pour tous les salariés des nouveaux établissements des sociétés issues de la fusion, les dispositions des accords qui étaient applicables au sein de leur société absorbée avant l'opération de fusion et qui n'ont pas encore faire l'objet d'une harmonisation'', ce dont il résultait que cet accord collectif a prolongé la durée de vie de dispositions conventionnelles mises en cause depuis le 1er janvier 2018 jusqu'au 31 décembre 2022, soit au-delà du délai légal de trois ans fixé à l'article L. 2261-14-2 du code du travail ; qu'en déboutant néanmoins la fédération syndicale de ses demandes, aux motifs erronés que l'accord du 28 janvier 2021 ne peut être regardé comme un accord de substitution au sens des articles L. 2261-14 et L. 2261-14-2 du code du travail et qu'il doit être considéré comme un accord de droit commun dont l'objet est l'organisation de la poursuite des négociations au sein de la société Thales AVS France, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-14-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. L'article L. 2261-14, alinéa 1er, du code du travail dispose que lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'article L. 2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure.

8. Aux termes de l'article L. 2261-14-2 du même code, dès lors qu'est envisagée une fusion, une cession, une scission ou toute autre modification juridique qui aurait pour effet la mise en cause d'une convention ou d'un accord, les employeurs des entreprises concernées et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise qui emploie les salariés dont les contrats de travail sont susceptibles d'être transférés peuvent négocier et conclure la convention ou l'accord de substitution prévu au premier alinéa de l'article L. 2261-14. La durée de cette convention ou de cet accord ne peut excéder trois ans. La convention ou l'accord entre en vigueur à la date de réalisation de l'événement ayant entraîné la mise en cause et s'applique à l'exclusion des stipulations portant sur le même objet des conventions et accords applicables dans l'entreprise ou l'établissement dans lequel les contrats de travail sont transférés. A l'expiration de cette convention ou de cet accord, les conventions et accords applicables dans l'entreprise ou dans l'établissement dans lequel les contrats de travail des salariés ont été transférés s'appliquent à ces salariés.

9. Selon l'article L. 2232-16, alinéa 2, du code du travail, une convention ou des accords peuvent être conclus au niveau d'un établissement ou d'un groupe d'établissements.

10. L'arrêt retient que l'accord du 28 janvier 2021 intitulé « sur la poursuite des négociations au sein de la société Thales AVS France SAS liées au projet de simplification des structures juridiques du Groupe Thales en France » stipule, en son article 1er, que « Les parties conviennent de prolonger jusqu'au 31 décembre 2022, pour tous les salariés des nouveaux établissements des sociétés issues de la fusion, les dispositions des accords qui étaient applicables au sein de leur société absorbée avant l'opération de fusion et qui n'ont pas encore fait l'objet d'une harmonisation compte tenu notamment de la crise sanitaire ».

11. L'arrêt constate par ailleurs que les établissements de la société Thales AVS France correspondent aux anciennes sociétés absorbées par celle-ci et que les accords collectifs issus de ces anciennes sociétés sont applicables, ainsi que le prévoit l'article 1er de l'accord collectif du 28 janvier 2021, à l'ensemble des salariés de ces nouveaux établissements, y compris ceux engagés au sein de ces établissements depuis la fusion du 1er janvier 2018.

12. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a jugé que cet accord collectif du 28 janvier 2021 qui organise l'existence d'accords collectifs applicables à tous les salariés de chacun des établissements composant la société Thales AVS France ne constituait pas un accord relevant de l'article L. 2261-14-2 du code du travail et que la période maximale d'application de trois années instituée par ce texte n'était pas applicable, de sorte que les demandes de la fédération CFDT devaient être rejetées.

13. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401232
Date de la décision : 27/11/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Application - Mise en cause - Cas - Fusion-absorption - Engagement unilatéral du nouvel employeur - Maintien de dispositions conventionnelles - Dispositions conventionnelles en vigueur au sein de l'entreprise absorbée - Conditions - Détermination - Portée

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Application - Mise en cause - Cas - Fusion-absorption - Maintien des dispositions conventionnelles - Conséquence - Article L. 2261-14-2 du code du travail - Dérogation - Période maximale d'application - Détermination - Portée

C'est à bon droit qu'ayant constaté que les établissements d'une société correspondaient aux anciennes sociétés absorbées par celle-ci et que les accords collectifs issus de ces anciennes sociétés étaient applicables, ainsi que le prévoyait l'accord collectif, à l'ensemble des salariés de ces nouveaux établissements, y compris ceux engagés au sein de ces établissements depuis la fusion, une cour d'appel juge que l'accord collectif qui organise l'existence d'accords collectifs applicables à tous les salariés de chacun des établissements composant une société ne constitue pas un accord relevant de l'article L. 2261-14-2 du code du travail et que la période maximale d'application de trois années instituée par ce texte n'est pas applicable


Références :

Article L. 2261-14-2 du code du travail.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 13 avril 2022

Sur les conditions d'application d'un accord collectif suite à la fusion-absorption d'une entité juridique, à rapprocher : Soc., 24 mars 2021, pourvoi n° 19-15920, Bull., (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2024, pourvoi n°52401232


Composition du Tribunal
Président : M. Sommer
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 10/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401232
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