LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 novembre 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1084 F-D
Pourvoi n° A 22-18.028
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
Mme [S] [Z], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° A 22-18.028 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [I] [W], domicilié [Adresse 8],
2°/ à M. [G] [W], domicilié [Adresse 2],
3°/ à Mme [Y] [W], domiciliée [Adresse 7],
4°/ à M. [D] [W], domicilié [Adresse 5],
5°/ à Mme [M] [W], épouse [H], domiciliée [Adresse 6],
6°/ à Mme [X] [W], épouse [O], domiciliée [Adresse 1],
7°/ à la société Agence de la presqu'île, société à responsabilité limitée, dont le siège est cabinet immobilier, [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [Z], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Agence de la presqu'île, de Me Laurent Goldman, avocat de M. [I] [W], M. [G] [W], Mme [Y] [W], M. [D] [W], Mme [M] [W], épouse [H], et Mme [X] [W], épouse [O] et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 avril 2022), par acte du 5 juillet 1979, [A] [W], dans les droits duquel se trouvent M. [G] [W], Mme [Y] [W], M. [I] [W], Mme [M] [W], M. [D] [W] et Mme [X] [W], (les consorts [W]), a donné à bail à Mme [Z], un logement lui appartenant.
2. Mme [Z] a assigné l'Agence de la presqu'île, chargée de la gestion du bien, devant un tribunal d'instance afin d'obtenir le paiement de dommages et intérêts pour travaux non exécutés ainsi qu'une indemnité compensatrice.
3. Elle a, par ailleurs, assigné les consorts [W] devant le même tribunal afin de voir constater la non décence du logement et obtenir l'exécution de travaux sous astreinte, la nullité du congé pour vendre qui lui a été délivré le 12 janvier 2018 et l'indemnisation de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral.
Examen des moyens
Sur les premier et troisième moyens
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
5. Mme [Z] fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'appel incident des consorts [W], de constater qu'ils formaient appel incident du jugement déféré en ce qu'il les avait déboutés de leur demande d'expulsion et de condamnation à une indemnité d'occupation, et en conséquence, de rappeler que le jugement déféré est définitif en toutes ses dispositions, excepté en ce qui concerne celles ayant débouté les consorts [W], alors :
« 1°/ qu'en l'absence d'effet dévolutif opéré par la déclaration d'appel principal, la cour d'appel ne peut être saisie par l'appel incident formé par voie de conclusions ; qu'en retenant le contraire, aux motifs inopérants que le délai d'appel principal n'avait jamais couru du fait de l'absence de signification de jugement à partie, la cour d'appel a méconnu les articles 548 et 550 du code de procédure civile ;
2°/ que la circonstance que l'intimé soit encore dans le délai pour relever appel du jugement en l'absence de signification de celui-ci est inopérant, en tout cas insuffisant à justifier de sa recevabilité ; qu'en se bornant à se fonder, pour déclarer recevable l'appel incident des consorts [W], sur la circonstance inopérante et en tout cas insuffisante que le délai d'appel n'avait pas couru à l'encontre de l'intimé en l'absence de signification du jugement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 548 et 550 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
6. Selon l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. En outre, seul l'acte d'appel opérant la dévolution des chefs critiqués du jugement, la déclaration d'appel qui tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués est privée d'effet dévolutif.
7. Par ailleurs, selon l'article 550, alinéa 1er, du code de procédure civile, sous réserve des articles 905-2, 909 et 910, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable ou s'il est caduc.
8. Il en résulte que lorsque l'appel principal est recevable mais dépourvu d'effet dévolutif, l'appel incident ou l'appel provoqué formé par conclusions dans le délai imparti par les articles 905-2 et 909 du code de procédure civile est recevable et a un effet dévolutif, la cour d'appel étant alors saisie des seuls chefs de dispositif du jugement critiqués par cet appel incident ou provoqué.
9. Ayant relevé que la déclaration d'appel de Mme [Z] n'était pas conforme aux articles 562 et 901-4° du code de procédure civile et qu'elle ne l'avait pas saisie de ses prétentions, la cour d'appel a retenu à bon droit, abstraction faite du motif erroné mais surabondant selon lequel le délai d'appel n'avait pas couru à l'encontre de l'intimé, que l'appel incident des consorts [W] devait être déclaré recevable et qu'elle restait donc saisie des prétentions formées par les intimés.
10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [Z] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [Z] et la condamne à payer à M. [G] [W], Mme [Y] [W], M. [I] [W], Mme [M] [W], M. [D] [W] et Mme [X] [W] la somme globale de 2 000 euros et à l'Agence de la presqu'île la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille vingt-quatre.