LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CC
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 novembre 2024
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 650 F-B
Pourvoi n° R 23-17.609
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 14 NOVEMBRE 2024
La société LySécurité, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 23-17.609 contre le jugement rendu le 14 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Paris, statuant selon la procédure accélérée au fond,
dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Adoma, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société Global Sécurité Prévention Incendie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5],
3°/ à la société BMA administrateurs judiciaires, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [S] [K], prise en qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Global Sécurité Prévention Incendie,
4°/ à la société MJS Partners, dont le siège est [Adresse 4], en la personne de M. [C] [E], prise en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Global Sécurité Prévention Incendie,
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société LySécurité, de la SCP Poupet et Kacenelenbogen, avocat de la société Adoma, après débats en l'audience publique du 24 septembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à la société BMA et à la société MJS Partners agissant respectivement en qualité d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Global Sécurité Prévention Incendie de leur reprise d'instance.
Faits et procédure
2. Selon le jugement attaqué (président du tribunal judiciaire de Paris, 14 juin 2023), rendu selon la procédure accélérée au fond, le 7 juillet 2022, la société Adoma, agissant en qualité de coordonnateur d'un groupement de commandes, a, en vertu des articles R. 2123-1 et R. 2123-4 du code de la commande publique, initié une procédure adaptée de publicité et de mise en concurrence en vue de l'attribution d'un accord-cadre mono-attributaire alloti ayant pour objet des prestations de gardiennage, de sûreté et/ou de sécurité incendie sur différents sites.
3. À l'issue de l'analyse des offres, le 9 novembre 2022, les lots 2, 19 et 20 ont été attribués à la société LySécurité. Les lots 8, 9, 15 et 18 n'ont pas été attribués, de sorte que le 6 janvier 2023, la société Adoma a ouvert une seconde procédure adaptée en vue de l'attribution de ces quatre lots. La société LySécurité a fait une offre sur le lot 18.
4. Par lettre du 2 mars 2023, la société Adoma a indiqué à la société LySécurité que son offre semblait anormalement basse et a sollicité en conséquence des justifications sur les prix proposés et les coûts supportés. La société LySécurité a répondu à cette sollicitation par lettre accompagnée de pièces du 8 mars 2023. Par lettre du 30 mars 2023, la société Adoma l'a informée que son offre avait été jugée anormalement basse et était, pour cette raison, rejetée.
5. La société LySécurité a assigné les sociétés Adoma et Global Sécurité Prévention Incendie, attributaire du marché, devant le président du tribunal judiciaire de Paris selon la procédure accélérée au fond en demandant, à titre principal, l'annulation de l'intégralité de la procédure de passation du marché relatif au lot 18 de l'accord-cadre et, à titre subsidiaire, l'annulation de la décision d'attribution de ce marché à la société Global Sécurité Prévention Incendie, et qu'il soit enjoint à la société Adoma, si elle entendait poursuivre la procédure de passation du lot 18 de l'accord-cadre, de la reprendre au stade de l'analyse des offres.
6. Par jugement du 13 novembre 2023, le Tribunal de commerce de Valenciennes a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Global Sécurité Prévention Incendie. Les sociétés BMA et MJS Partners ont été désignées respectivement en qualité d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. La société LySécurité fait grief au jugement de rejeter ses demandes, alors,
« 1°/ que le prix anormalement bas d'une offre s'apprécie au regard de son prix global ; que l'acheteur peut recourir à un scénario de commandes" [DQE, pour détail quantitatif estimatif] pour procéder à cette appréciation à la condition que le scénario proposé permette d'évaluer le prix dans sa globalité et donc corresponde à l'objet du marché et n'ait pas pour effet d'en privilégier un aspect particulier ; que la société LySécurité soutenait que le prix de son offre n'avait pas pu être apprécié de façon globale sur le fondement d'un DQE au terme duquel seules les prestations effectuées par des agents de sécurité confirmés" étaient prises en compte tandis que le bordereau de prix prévoyait quatre autres catégories d'agents et que cette unique prestation ne correspondait pas aux besoins réels de la société Adoma, comme en témoignait la réalité des commandes passées par la société Adoma dans le cadre de l'exécution du précédent marché sur le même territoire ; qu'en se bornant à estimer que le devis quantitatif estimatif fixe un nombre d'heures pour les ADS [pour agents de sécurité] confirmés (au total de 56 131) [...] qui fait état des besoins spécifiques de l'acheteur comme cela résulte du règlement de consultation" et que les offres ont été comparées entres elles sur le fondement du devis quantitatif estimatif, recensant les besoins spécifiques de l'acheteur limités aux ADS confirmés" pour juger que le caractère anormal de l'offre avait été apprécié dans sa globalité, le tribunal, qui a fondé le besoin de l'acheteur sur le DQE, dont l'exactitude était précisément contestée, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2152-5 et L. 2152-6 du code de la commande publique ;
2°/ que la société LySécurité soutenait que le prix de son offre n'avait pas pu être apprécié de façon globale sur le fondement d'un DQE au terme duquel seules les prestations effectuées par des agents de sécurité confirmés" étaient prises en compte tandis que le bordereau de prix prévoyait quatre autres catégories d'agents et que cette unique prestation ne correspondait pas aux besoins réels de la société Adoma, comme en témoignait la réalité des commandes passées par la société Adoma dans le cadre de l'exécution du précédent marché sur le même territoire ; qu'en écartant ce moyen au motif, inopérant, que les candidats étaient (...) informés par le document de consultation que la comparaison des offres entre elles s'effectuerait sur la base de l'annexe intitulé devis quantitatif estimatif (...) qui correspond au nombre d'heures fixé dans l'annexe 1 renseigné, en connaissance de cause, par les soumissionnaires" [,] le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2152-5 et L. 2152-6 du code de la commande publique ;
3°/ que le juge des référés précontractuels apprécie, en plein contentieux, la légalité de la décision de rejet d'une offre comme anormalement basse à la date à laquelle il statue, de sorte que le candidat évincé peut présenter tout argument permettant d'établir l'erreur manifeste d'appréciation commise par l'acheteur, peu important, notamment, qu'il aurait pu être communiqué à l'acheteur avant la date de la décision attaquée ; que, pour retenir que l'ensemble des justifications de la société LySécurité ne permettait pas de justifier l'offre qui, notamment du fait de l'attestation du Groupement des entreprises de sécurité (GES) sur le coût de revient du 13 mars 2023, apparaissait manifestement sous-évaluée, le tribunal judiciaire a considéré que, pour justifier que ses prix n'étaient pas sous-évalués et de nature à compromettre la bonne exécution du marché, la société LySécurité ne peut, dans le cadre de la présente instance, se prévaloir d'éléments qu'elle n'a pas communiqués à l'acheteur lors de sa réponse du 8 mars 2023" et écarté sans les prendre en compte les éléments opérants présentés en défense par la société LySécurité fondés sur le détail du prix de revient d'un agent communiqué par l'expert-comptable dans l'attestation du 21 avril 2023, au motif inopérant qu'il aurait pu être utilement communiqué le 8 mars 2023", et le courriel du 22 mai 2023 du GES permettant de contester utilement l'attestation du 13 mars 2023 ; que, ce faisant, le tribunal judiciaire a méconnu l'office du juge des référés précontractuels et violé les articles 2 et 3 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009, ensemble les articles L. 2152-5 et L. 2152-6 du code de la commande publique ;
4°/ que la viabilité économique d'une offre ne peut être subordonnée à un équilibre entre les charges effectivement exposées et le prix facturé ; qu'en jugeant que l'offre de la société LySécurité apparaissait comme manifestement sous-évaluée et de nature à compromettre la bonne exécution du marché au motif qu'elle présentait un coût de revient inférieur à celui préconisé par le GES, le tribunal judiciaire, qui a subordonné ainsi la viabilité économique de l'offre à un équilibre entre les charges effectivement exposées et le prix facturé, a violé les articles L. 2152-5, L. 2152-6, R. 2152-3 et R. 2152-4 du code de la commande publique ;
5°/ qu'une offre anormalement basse est une offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché ; que la société Adoma a rejeté l'offre présentée par la société LySécurité comme anormalement basse en se fondant sur le fait que par lettre du 11 janvier 2023, elle avait sollicité sur les autres lots dont elle est titulaire une revalorisation à la hausse des tarifs, similaires ou légèrement plus élevés à ceux proposé dans son offre ; que la société LySécurité faisait valoir que cette circonstance ne pouvait être prise en compte dès lors que la société Adoma n'avait pas donné suite à cette demande et que, malgré ce refus, l'exécution des marchés n'avait connu aucun problème ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, le tribunal judiciaire a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°/ qu'en tout état de cause, la société LySécurité soutenait en outre que, comme l'indiquait la lettre du 8 mars 2023, les prix pratiqués s'inscrivaient dans sa fourchette pratiquée habituellement avec d'autres clients Grands Comptes et sur les lots n° 2, 19, et 20 de l'accord-cadre, sans que ces sociétés, et notamment la société Adoma, aient connu de difficultés d'exécution, que la demande de revalorisation du 11 janvier 2023 formée sur d'autres lots, qui ne visait qu'à remédier à une baisse de la rentabilité et non à une situation de vente à perte, ne permettait pas de douter de la bonne exécution du lot n° 18, et que son refus par la société Adoma n'avait en rien remis en cause la qualité de ses prestations sur les lots concernés, de sorte que les prix de l'offre n'étaient pas de nature à compromettre la bonne exécution du marché ; qu'en estimant que la lettre du 11 janvier 2023 et l'attestation du GES sur le coût de revient ne permettaient pas de justifier que les prix n'étaient pas sous-évalués pour en déduire que les prix de l'offre étaient pour cette raison, de nature à compromettre la bonne exécution du marché" sans caractériser le moindre risque d'exécution au regard des éléments précités, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2152-5, L. 2152-6, R. 2152-3 et R. 2152-4 du code de la commande publique ;
7°/ que le caractère suffisant de la réponse fournie par un candidat à l'acheteur qui suspecte que son offre est anormalement basse doit être apprécié au regard d'une part, du propre degré de précision de la demande de justifications formée par l'acheteur et du délai imparti pour répondre et, d'autre part, de l'importance de l'anormalité soupçonnée ; que la société LySécurité soutenait que la société Adoma, qui se bornait à demander à la société toutes précisions que vous jugerez utiles pour justifier le prix ou les coûts proposés dans votre offre", n'avait posé aucune question sur un ou des éléments précis de l'offre et ne dénonçait que pour la première fois au contentieux l'incomplétude et la généralité des réponses apportées par la lettre du 8 mars 2023 et, notamment, de ne pas avoir fourni d'indications sur la structure détaillée de ses coûts et sur le montant exact de la marge bénéficiaire qu'elle affirmait pouvoir tirer de l'exécution de ce lot, au demeurant protégée par le secret des affaires - et n'accordait à la société LySécurité qu'un délai de six jours calendaires pour répondre, week-end compris ; qu'en se bornant à considérer que la question de la société Adoma sur des justificatifs portant sur le prix ou les coûts proposés [faisait] très clairement référence à la composition des prix proposés" pour juger que l'absence de précision sur la composition des tarifs proposés d'une part, et (...) ses explications vagues et générales, d'autre part" ne permettaient pas de justifier que l'offre de la société LySécurité n'était pas anormalement basse, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2152-5, L. 2152-6, R. 2152-3 et R. 2152-4 du code de la commande publique. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, après avoir rappelé qu'il n'appartient pas au juge du recours précontractuel d'apprécier si l'offre en question, à ce stade de la procédure de passation, apparaît anormalement basse, mais de déterminer si le pouvoir adjudicateur n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans sa décision de rejeter l'offre compte tenu des explications fournies par le candidat, le jugement précise que le caractère anormalement bas d'une offre ne peut résulter du seul constat d'un écart de prix important entre cette offre et d'autres offres ou entre cette même offre et l'estimation effectuée par l'acheteur, mais que, néanmoins, cet écart est de nature à justifier le déclenchement de la procédure de vérification, qui peut, le cas échéant, conduire au rejet de l'offre si les explications fournies par le candidat ne permettent pas de justifier cet écart.
9. Il relève ensuite que l'offre financière remise par la société LySécurité a été chiffrée à 1 143 170 euros, alors que le montant de la moyenne des offres concurrentes ayant donné lieu à un jugement comparatif s'est, selon la société Adoma, élevé à la somme de 1 289 274 euros, soit un écart de 11,33 %, et que, dans la mesure où le montant global de l'offre de l'attributaire s'est élevé, quant à lui, à la somme de 1 325 167 euros, l'écart évalué par l'acheteur n'apparaît pas fantaisiste.
10. Il ajoute que le règlement de consultation précisait que chaque soumissionnaire devait remplir l'annexe n° 2 intitulée « Détail quantitatif estimatif » et qu'il stipulait que « [...] le coût des prestations ponctuelles sera apprécié à partir des bordereaux des prix unitaires. Le devis quantitatif estimatif (soit l'annexe intitulée coûts prévisionnels ) a été établi afin d'apprécier les offres entre elles. ». Il en déduit que les candidats étaient informés par le document de consultation que la comparaison des offres entre elles s'effectuerait sur la base de l'annexe intitulée « Devis quantitatif estimatif ».
11. Le jugement relève que ce document fixe un nombre d'heures pour les ADS confirmés qui correspond au nombre d'heures fixé dans l'annexe 1 renseignée, en connaissance de cause, par les soumissionnaires et qui fait état des besoins spécifiques de l'acheteur, comme cela résulte du règlement de consultation.
12. Il en déduit exactement que le caractère anormal de l'offre a bien été apprécié au regard de sa globalité, les offres ayant été comparées entre elles sur le fondement du devis quantitatif estimatif, recensant les besoins spécifiques de l'acheteur limités aux ADS confirmés.
13. En deuxième lieu, le jugement relève que la société Adoma justifie par la production d'un courriel du GES du 13 mars 2023, adressé cinq jours après la réception des explications de la société LySécurité, que le coût de revient horaire 2023 pour un ADS est compris entre 19,20 et 19,50 euros par heure, ce coût étant exclusivement calculé sur la base d'un horaire de jour. Il retient qu'il résulte de cette estimation que le coût de revient horaire est supérieur au prix proposé par la société LySécurité dans son offre. Il ajoute que cette évaluation doit être analysée à la lumière de la lettre adressé par la société LySécurité le 11 janvier 2023 à la société Adoma, sollicitant une revalorisation des tarifs pratiqués sur les lots 2, 19 et 20 attribués lors de la première passation de marché, et rappelle que cette demande fait état de la signature le 19 septembre 2022, après la date de remise des offres pour le marché de gardiennage, d'un accord de revalorisation des salaires prévoyant une évolution de la grille conventionnelle de 7,5 %, ainsi que des « hausses considérables des coûts de l'énergie » pour solliciter la revalorisation des tarifs appliqués de 7,5 % « correspondant uniquement à l'augmentation conventionnelle et [nous] faisons l'effort financier de supporter l'augmentation des autres coûts ».
14. Après avoir détaillé les éléments transmis dans la réponse de la société LySécurité le 8 mars 2023, le jugement retient qu'il résulte de cette réponse que cette société était parfaitement consciente de l'impact de sa lettre du 11 janvier 2023 sollicitant la revalorisation de ses tarifs, et en déduit qu'il lui appartenait en conséquence, à ce stade de la procédure, de démontrer, au-delà de la simple pétition de principe, que son offre était viable. Il ajoute qu'elle ne peut se retrancher derrière l'absence de demande de précisions par le pouvoir adjudicateur, la question de la société Adoma sur des justificatifs portant sur le prix ou les coûts exposés faisant très clairement référence à la composition des prix proposés.
15. En troisième lieu, après avoir énoncé à bon droit que l'erreur manifeste d'appréciation est examinée par le juge au regard des éléments dont disposait le pouvoir adjudicateur lorsqu'il a rejeté l'offre, le jugement retient exactement que la société LySécurité ne peut se prévaloir d'éléments qu'elle n'a pas communiqués à l'acheteur dans sa réponse du 8 mars 2023 et que, dès lors, le détail du prix de revient d'un agent communiqué par l'expert-comptable dans son attestation du 21 avril 2023 postérieurement au rejet de son offre comme anormalement basse, ne peut établir l'erreur manifeste d'appréciation du pouvoir adjudicateur.
16. En quatrième lieu, après avoir relevé que les pièces justificatives, succinctes, présentées par la société LySécurité dans sa réponse du 8 mars 2023, permettent uniquement de constater que celle-ci s'acquitte de l'ensemble de ses obligations sociales et fiscales, le jugement retient que ces seules justifications générales ne permettaient pas à l'acheteur de comprendre la composition des tarifs proposés, tant en ce qui concerne les charges exposées par la société LySécurité et le prix facturé, au regard notamment de l'accord collectif signé le 19 septembre 2022 et non répercuté sur les tarifs, qu'en ce qui concerne la marge nette dégagée, dont le montant n'était pas précisé par l'expert-comptable.
17. En l'état de ces constatations, énonciations et appréciations, le président du tribunal, qui a exactement retenu que l'acheteur avait procédé à une analyse globale de l'offre de la société LySécurité, et que celle-ci avait été mise en mesure de produire tous les éléments nécessaires à la justification de son offre au regard des circonstances dont elle avait pleinement connaissance, a, à bon droit, retenu que le montant de cette offre ne pouvait être justifié par des éléments qui n'avaient pas été soumis à l'acheteur pour lui permettre d'en apprécier le caractère viable, puis ayant, sans être tenu de suivre la société LySécurité dans le détail de son argumentation, fait ressortir qu'eu égard, d'une part, aux écarts constatés ente les offres, d'autre part, aux caractéristiques financières de celle de la société Lysécurité, dont le coût de revient était supérieur au prix proposé, et, enfin, de la démarche de celle-ci sollicitant, de la société Adoma, juste après le dépôt de cette offre, une revalorisation des tarifs pratiqués à un prix quasiment identique sur les lots précédemment attribués en invoquant la conclusion d'un accord de revalorisation des salaires, a pu en déduire que la société Adoma n'avait pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en considérant que cette offre n'était pas économiquement viable, de sorte qu'elle risquait de compromettre l'exécution du marché.
18. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société LySécurité aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société LySécurité et la condamne à payer à la société Adoma la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille vingt-quatre.