LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 novembre 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1019 F-D
Pourvoi n° W 23-13.819
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 NOVEMBRE 2024
Mme [G] [C], domiciliée [Adresse 3] (États-Unis), a formé le pourvoi n° W 23-13.819 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 11), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société L'Équité, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société Generali Bike,
2°/ à la Caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières, dont le siège est [Adresse 1],
3°/ à M. [X] [C], domicilié [Adresse 3] (États-Unis),
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de Mme [C], de la SARL Ortscheidt, avocat de M. [C], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société L'Équité, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 septembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 novembre 2022), le 26 mai 2016, [X] [C], alors âgé de 12 ans, a été victime d'un accident de la circulation impliquant un véhicule automobile assuré par la société Generali IARD, aux droits de laquelle est venue la société Generali Bike puis la société L'équité (l'assureur).
2. Sa mère, Mme [C], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représente légale de ses enfants mineurs, a assigné l'assureur, en présence de la Caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières, en indemnisation de leurs préjudices.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Mme [C] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en indemnisation de ses pertes de gains professionnels, alors « que le juge est tenu de faire respecter le principe de la contradiction et ne peut se fonder sur un moyen relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en se fondant sur le moyen relevé d'office tiré de ce que le préjudice indemnisable s'analysait en une perte de chance et en décidant que « Mme [C] ne peut invoquer une perte de gains totale mais seulement une perte de chance des gains qui est un préjudice distinct » et que, « ne sollicitant pas l'indemnisation d'une perte de chance de gains [elle] doit dès lors être débouté de sa demande relative à la perte de gains professionnels », sans avoir invité préalablement les parties, en particulier Mme [C], à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
4. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
5. Pour rejeter la demande formée par Mme [C] en indemnisation de ses pertes de gains professionnels, l'arrêt retient qu'il pouvait être mis fin, à tout moment et pour n'importe quelle raison, à l'emploi que celle-ci avait prévu d'occuper à compter du mois de juillet 2016 aux Etats-Unis.
6. Il en déduit que Mme [C] ne peut invoquer une perte de gains totale mais seulement une perte de chance des gains, qui est un préjudice distinct, dont elle ne sollicite pas l'indemnisation.
7. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen qu'elle avait relevé d'office, tiré de ce que le préjudice subi par Mme [C] au titre des pertes de gains professionnels consistait en une perte de chance, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. La cassation du chef de dispositif rejetant la demande formée par Mme [C] au titre de ses pertes de gains professionnels n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'assureur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à son encontre.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement en tant qu'il rejette la demande formée par Mme [C] au titre de ses pertes de gains professionnels, l'arrêt rendu le 24 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société L'Équité aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société L'Équité et la condamne à payer à Mme [C] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille vingt-quatre.