LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 octobre 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 988 F-D
Pourvoi n° W 22-10.733
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 OCTOBRE 2024
M. [H] [Z], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 22-10.733 contre l'arrêt rendu le 18 novembre 2021 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, protection sociale), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Rhône-Alpes, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [Z], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Rhône-Alpes, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 septembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 18 novembre 2021), la caisse du régime social des indépendants d'Auvergne, devenue l'URSSAF de Rhône-Alpes (l'URSSAF), a fait signifier à M. [H] [Z], par acte du 3 février 2014, une contrainte à laquelle ce dernier a formé opposition.
2. Par jugement du 11 décembre 2018, dont M. [H] [Z] a interjeté appel le 14 février 2019, une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale a reçu partiellement M. [I] [Z] en son opposition, validé la contrainte à concurrence d'une certaine somme et condamné M. [I] [Z] aux frais de citation et d'exécution forcée du jugement.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. [H] [Z] fait grief à l'arrêt d'ordonner la rectification du jugement rendu le 11 décembre 2018 comme suit : les paragraphes des motifs en page 2 du jugement ainsi libellé : « Selon acte du 3 février 2014, la caisse R.S.I Auvergne a fait signifier à M. [I] [Z] (...) » et « M. [I] [Z] a formé opposition (..) » seront remplacés par : « Selon acte du 3 février 2014, la Caisse R.S.I Auvergne a fait signifier à M. [H] [Z] (...) » et « M. [H] [Z] a formé opposition (...) » et dans le dispositif de la décision les phrases : « Reçoit M. [I] [Z] partiellement en son opposition à contrainte » et « Condamne M. [I] [Z] aux frais de citation à l¿audience (52,96 euros) et d¿exécution forcée du jugement pour parvenir au règlement desdites sommes le cas échéant », seront remplacées par : « Reçoit M. [H] [Z] partiellement en son opposition à contrainte » et « Condamne M. [H] [Z] aux frais de citation à l'audience (52,96 euros) et d'exécution forcée du jugement pour parvenir au règlement desdites sommes le cas échéant », et d'ordonner la mention de ces rectifications en marge de la minute des expéditions du jugement du 18 décembre 2018, alors « que le désistement général d'appel accepté par la partie adverse entraîne l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour d'appel ; que le juge d'appel dessaisi par l'effet de ce désistement ne peut statuer au fond et rectifier l'erreur matérielle affectant le jugement déféré sur lequel il n'a pas statué ; qu'en ordonnant la rectification du jugement du 11 décembre 2018 en ce qu'il mentionnait le nom de M. [I] [Z] au lieu de M. [H] [Z] tout en constatant le désistement d'appel de M. [H] [Z] accepté par l'URSSAF Rhône Alpes, la cour d'appel a violé les articles 400, 403, 462 et 561 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte de l'article 462 du code de procédure civile qu'après son dessaisissement, la cour d'appel reste seule compétente pour réparer une erreur ou une omission matérielle affectant les dispositions du jugement qui lui a été déféré et ce, même si elle a déjà statué.
6. C'est, dès lors, sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a ordonné, à la demande de l'intimée, la rectification du jugement qui lui avait été déféré et constaté le désistement d'appel de M. [H] [Z], accepté par l'URSSAF.
7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
8. M. [H] [Z] fait grief à l'arrêt de rejeter le moyen tiré de la péremption d'instance, alors « que les dispositions de l'article R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale selon lesquelles l'instance est périmée lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction, ne sont applicables qu'aux procédures de première instance ; qu'aucune dérogation au droit commun de la péremption et donc à l'article 386 du code de procédure civile n'est instituée en appel ; qu'à défaut d'un texte spécial subordonnant l'application de l'article 386 du code de procédure civile à une injonction particulière du juge, la péremption est constatée lorsque les parties n'ont accompli aucune diligence dans un délai de deux ans, quand bien même le juge n'en aurait pas mis à leur charge ; qu'en se fondant sur l'article R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale applicable à compter du 1er janvier 2020, pour refuser de constater la péremption d'instance qui était demandée à titre principal, et énoncer qu'avant le 1er janvier 2020 le délai de deux ans n'était pas écoulé et qu'à compter du 1er janvier en l'absence de diligence expressément mise à la charge des parties par la juridiction, le délai de péremption n'avait pas couru, la cour d'appel a violé par fausse application l'article R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale et par refus d'application l'article 386 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles R. 142-10-10 et R. 142-12-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue du décret n° 2019-1506 du 30 décembre 2019, et 386 du code de procédure civile :
9. Selon le premier de ces textes, relatif à la procédure applicable en première instance, et applicable, conformément à l'article 9 du décret précité du 30 décembre 2019, à compter du 1er janvier 2020, y compris aux péremptions non constatées à cette date, l'instance est périmée lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction. Aux termes du deuxième, relatif à la procédure applicable en appel, les dispositions de l'article R. 142-10-9 sont applicables en appel.
10. Aux termes du dernier de ces textes, l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
11. Il résulte de la combinaison de ces textes qu'en l'absence de renvoi, en ce qui concerne la procédure applicable en appel, aux dispositions de l'article R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale, l'instance d'appel est périmée, conformément aux dispositions de l'article 386 du code de procédure civile, lorsqu'aucune des parties n'a accompli de diligence pendant deux ans, quand bien même le juge n'en aurait pas mis à leur charge.
12. Pour rejeter le moyen tiré de la péremption de l'instance, l'arrêt retient, après avoir rappelé les dispositions de l'article R. 142-10-10 précité, que M. [Z] se prévaut de l'absence de diligence accomplie par les parties dans les deux années qui ont suivi l'appel interjeté le 14 février 2019, mais que, avant le 1er janvier 2020, le délai de deux ans n'était pas écoulé et qu'à compter du 1er janvier 2020, en l'absence de diligence expressément mise à la charge des parties par la juridiction, le délai de péremption n'a pas couru.
13. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
14. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt, en ce qu'il rejette le moyen tiré de la péremption, entraîne la cassation de tous les autres chefs de dispositif, à l'exception de ceux qui, ne s'y rattachant pas par un lien de dépendance nécessaire, ordonnent la rectification du jugement et qu'il soit fait mention de ces rectifications en marge de la minute et des expéditions du jugement.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il ordonne la rectification du jugement n° 18/2357 en date du 11 décembre 2018 et ordonne qu'il soit fait mention de ces rectifications en marge de la minute et des expéditions du jugement, l'arrêt rendu le 18 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble autrement composée ;
Condamne l'URSSAF de Rhône-Alpes aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille vingt-quatre.