LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 23 octobre 2024
Cassation partielle
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 584 F-D
Pourvoi n° N 22-18.430
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 23 OCTOBRE 2024
Mme [I] [Y], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 22-18.430 contre l'arrêt rendu le 16 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [G] [Y], domicilié [Adresse 3],
2°/ à Mme [S] [Y], domiciliée [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dard, conseiller, les observations de Me Bardoul, avocat de Mme [I] [Y], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [G] [Y], Mme [S] [Y], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Dard, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2021 et les productions), [N] [C] est décédé le 11 septembre 1982, en laissant pour lui succéder son épouse, [U] [R], et leur fille [W] [C], épouse de [O] [Y].
2. [O] [Y], [W] [C] et [U] [R] sont décédés respectivement les 11 octobre 1983, 18 février 1992 et 4 septembre 1993, en laissant pour leur succéder leurs enfants et petits-enfants, M. [G] [Y] et Mmes [S] et [I] [Y].
3. Un jugement du 6 décembre 2004 a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation, partage des quatre successions.
4. Le 10 octobre 2016, le notaire désigné pour y procéder a dressé un procès-verbal de difficultés.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et quatrième moyens
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et cinquième branches, et le quatrième moyen qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation et sur le premier moyen et le deuxième moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, qui sont irrecevables.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
6. Mme [I] [Y] fait grief à l'arrêt de fixer à une certaine somme la créance de M. [G] [Y] sur l'indivision, alors « que les juges doivent procéder à une analyse, même sommaire, des pièces sur lesquelles ils fondent leur décision ; qu'en se bornant à retenir qu'il résulte des justificatifs versés aux débats par M. [G] [Y] et Mme [S] [Y] que la créance de M. [G] [Y] sur l'indivision est établie à la seule somme de 83.584,06 euros sans analyser même sommairement les justificatifs qu'elle retenait, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
7. M. [G] [Y] et Mme [S] [Y] contestent la recevabilité du moyen, en ce que Mme [I] [Y] ne se prévaut pas d'un défaut d'examen de pièces produites par elle.
8. Cependant, le moyen ne porte pas sur un défaut d'examen des éléments de preuves soumis par les parties au soutien de leurs prétentions, mais sur un défaut d'analyse, par le juge, des pièces fondant sa décision.
9. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
10. Tout jugement doit être motivé.
11. Pour fixer à un certaine somme la créance de M. [G] [Y] sur l'indivision, l'arrêt se borne à énoncer qu'il résulte des justificatifs produits que cette créance est établie à hauteur de ce montant.
12. En statuant ainsi, sans analyser, même sommairement, les pièces sur lesquelles elle fondait sa décision, alors que la créance invoquée était contestée par Mme [I] [Y], la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
13. La cassation du chef de dispositif fixant à une certaine somme la créance de M. [G] [Y] sur l'indivision n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant Mme [I] [Y] aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe à la somme de 83 584,06 euros la créance de M. [G] [Y] sur l'indivision, l'arrêt rendu le 16 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. [G] [Y] et Mme [S] [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [G] [Y] et Mme [S] [Y] et les condamne à payer à Mme [I] [Y] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille vingt-quatre.