LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
SH
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 septembre 2024
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 512 FS-B
Pourvois n°
D 23-13.067
T 23-14.828 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 SEPTEMBRE 2024
I - La société Groupe canal +, société anonyme à directoire et conseil de surveillance, dont le siège est [Adresse 2], anciennement [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-13.067 contre un arrêt n° RG 21/06512 rendu le 3 février 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société beIN Sports France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société Filiale LFP1, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ à la société Amazon Digital UK, société de droit anglais, dont le siège est [Adresse 5] (Royaume-Uni),
4°/ à l'association Ligue de football professionnel, dont le siège est [Adresse 4],
défenderesses à la cassation.
II - la société beIN Sports France, société par actions simplifiée, a formé le pourvoi n° T 23-14.828 contre le même arrêt n° RG 21/06512 rendu, dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Groupe canal +, société anonyme à directoire et conseil de surveillance,
2°/ à la société Filiale LFP1, société par actions simplifiée,
3°/ à l'association Ligue de football professionnel,
4°/ à la société Amazon Digital UK, société de droit anglais,
défenderesses à la cassation.
La demanderesse au pourvoi n° D 23-13.067 invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi n° T 23-14.828 invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société beIN Sports France, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Groupe canal +, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Filiale LFP1 et de l'association Ligue de football professionnel, de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la société Amazon Digital UK, et l'avis de M. Douvreleur, avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires ; après débats en l'audience publique du 25 juin 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Michel-Amsellem, Sabotier, Tréfigny, conseillers, M. Le Masne de Chermont, Mmes Comte, Bellino, M. Regis, conseillers référendaires, M. Douvreleur, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 23-13.067 et 23-14.828 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 février 2023) et les productions, en 2018, agissant par délégation de la Fédération française de football, l'association Ligue française de football professionnel (la LFP), aux droits de laquelle est venue la société Filiale LFP1, a lancé un appel à candidatures pour l'acquisition des droits de diffusion télévisuelle des matchs de football de Ligue 1 pour les saisons 2020-2021 à 2023-2024, ces droits étant divisés en sept lots. A l'issue de cette procédure, les lots 1, 2, 4, 5 et 7 ont été attribués à la société Mediapro, le lot 3, à la société beIN Sports France (la société beIN Sports) pour un prix de 332 millions d'euros par saison, laquelle en a concédé l'exploitation à la société Groupe canal + (la société Canal +), et le lot 6, à la société Free.
3. Le contrat passé avec la société Mediapro ayant été résilié en 2020, à la suite de la défaillance de cette société dans le paiement du prix, la LFP a lancé, le 19 janvier 2021, un nouvel appel à candidatures aux fins de commercialisation des seuls lots 1, 2, 4, 5 et 7, restitués par la société Mediapro.
4. Le 29 janvier 2021, reprochant à la LFP de ne pas inclure le lot 3 dans cet appel à candidatures et, en conséquence, de ne pas résilier le contrat conclu pour ce lot à l'issue de l'appel à candidatures de 2018, la société Canal + a saisi l'Autorité de la concurrence (l'Autorité) de pratiques d'abus de position dominante mises en oeuvre par la LFP dans le secteur de la vente de droits de diffusion télévisuelle des compétitions sportives, consistant notamment en un traitement discriminatoire de l'attributaire du lot 3 par rapport aux autres candidats à l'appel à candidatures de 2021. Par sa décision n° 21-D-12 du 11 juin 2021 relative à des pratiques mises en oeuvre par la Ligue de Football Professionnel dans le secteur de la vente de droits de diffusion télévisuelle de compétitions sportives, l'Autorité a rejeté la saisine au motif qu'elle n'était pas étayée d'éléments suffisamment probants. Le recours introduit contre la décision de l'Autorité a été rejeté par la cour d'appel de Paris par un arrêt du 30 juin 2022, contre lequel la société Canal + a formé un pourvoi sous le numéro 22-19.527.
5. Le 11 juin 2021, la LFP, qui, avait, le 1er février 2021, déclaré l'appel à candidatures infructueux et ouvert une phase de négociation de gré à gré, a annoncé qu'elle avait retenu comme la mieux-disante l'offre présentée par la société Amazon Digital UK (la société Amazon), par préférence à celle faite en commun par les sociétés Canal + et beIN Sports, et lui a attribué la totalité des lots restitués par la société Mediapro.
6. Les 2 novembre et 24 décembre 2021, faisant valoir que la décision de la LFP d'attribuer 80 % des droits de Ligue 1 à la société Amazon pour 250 millions d'euros par saison, tout en contraignant les sociétés beIN Sports et Canal + à exploiter les droits restants dans les conditions de concurrence résultant de l'appel à candidatures de 2018, constituait une discrimination, les sociétés beIN Sports et Canal + ont saisi l'Autorité des pratiques ainsi mises en oeuvre par la LFP sur le marché de l'acquisition des droits de diffusion télévisuelle de Ligue 1. Par sa décision n° 22-D-22 du 30 novembre 2022 relative à des pratiques mises en oeuvre par la Ligue de Football Professionnel dans le secteur de la vente des droits de diffusion télévisuelle de compétitions sportives, l'Autorité a rejeté la saisine au motif qu'elle n'était pas étayée d'éléments suffisamment probants.
7. Parallèlement à ces procédures, la société Canal + a, le 26 janvier 2021, assigné la LFP, en présence de la société beIN Sports, aux fins de voir annuler l'appel à candidatures du 19 janvier 2021 ainsi que tout accord de gré à gré subséquent portant sur les saisons 2021-2022 à 2023-2024, voir enjoindre à la LFP d'organiser un nouvel appel à candidatures, comprenant le lot 3, et la voir condamner à réparer son préjudice moral.
Examen des moyens
Sur la recevabilité des moyens du pourvoi n° 23-13.067 et du premier moyen du pourvoi n° 23-14.828, en ce qu'ils portent sur l'absence de remise en concurrence du lot 3
8. La société Filiale LFP1, venant aux droits de la LFP, conteste la recevabilité des moyens du pourvoi n° 23-13.067 et du premier moyen du pourvoi n° 23-14.828 en tant qu'ils concernent l'absence de remise en concurrence du lot 3 lors de l'appel à candidatures de 2021. Après avoir énoncé que les moyens dirigés contre une décision ayant déclaré à tort une demande irrecevable sont eux-mêmes irrecevables pour défaut d'intérêt lorsqu'il résulte de la décision attaquée que, si cette demande avait été déclarée recevable, elle aurait en toute hypothèse été rejetée, elle soutient qu'il s'infère des motifs propres et adoptés de l'arrêt, et qu'il s'inférera de l'arrêt à intervenir sur le pourvoi n° 22-19.527, que si la cour d'appel n'avait pas déclaré irrecevables les demandes des sociétés Canal + et beIN Sports fondées sur l'absence de remise en concurrence du lot 3, elle les auraient rejetées.
9. Cependant, d'abord, ayant déclaré irrecevables les demandes des sociétés Canal + et beIN Sports, la cour d'appel n'a pas adopté les motifs par lesquels le jugement a rejeté ces demandes comme mal fondées, ensuite, les pourvois critiquent les motifs propres de l'arrêt, enfin, l'inopérance des moyens d'un pourvoi critiquant un arrêt ne saurait être appréciée en se référant à une décision rendue postérieurement dans une autre instance.
10. Les moyens sont donc recevables.
Sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche, et le troisième moyen du pourvoi n° 23-14.828
11. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° 23-13.067 et le premier moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi n° 23-14.828
Enoncé du moyen
12. La société Canal + fait grief à l'arrêt de dire irrecevables ses demandes fondées sur le refus de la LFP de remettre en concurrence le lot 3 pour l'appel à candidatures de janvier 2021, alors « que l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; que, par un arrêt rendu le 30 juin 2022, la cour d'appel de Paris a rejeté "le recours en annulation formé par la société [Canal +] contre la décision n° 21-D-12 du 11 juin 2021 de l'[Autorité] relative à des pratiques mises en oeuvre par la Ligue de Football Professionnel dans le secteur de la vente de droits de diffusion télévisuelle de compétitions sportives" ayant rejeté, faute d'éléments suffisants à l'appui de ses allégations, la saisine et la demande de mesures conservatoires de la société Canal + et, "en conséquence, dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande au fond tendant à juger que la LFP a commis un abus de position dominante" ; qu'en déclarant irrecevable la société Canal + en ses demandes tirées du refus de la LFP de remettre en concurrence le lot 3 pour l'appel à candidature aux motifs qu' "il n'est pas discutable que suivant les articles 1355 du code civil et 122 du code de procédure civile, l'autorité de la chose jugée est attachée aux arrêts rendus par la chambre [de la régulation économique] de la cour d'appel de Paris désignée comme organe juridictionnel pour connaître des recours contre les décisions de l'Autorité", que "la cour examinera les faits et moyens tirés de l'abus de position dominante reproché par les sociétés Canal + et beIN Sports à la LFP et à la société Amazon d'après l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2022, statuant sur le recours à l'encontre de la première déclaration décision de l'Autorité n° 21-D-12 du 11 juin 2021", que les moyens développés en fait par la société Canal + "ont déjà été soumis, dans leur substance à l'Autorité, puis, en cause de recours contre sa décision du 11 juin 2021, à la chambre [de la régulation économique] de la cour d'appel de Paris, qui, dans son arrêt du 30 juin 2022, les a écartés", et qu' "en conséquence, la demande de ce chef sera déclarée irrecevable par application de la chose jugée de l'arrêt du 30 juin 2022", quand les motifs d'un arrêt sont dépourvus de toute autorité de chose jugée et que, dans son dispositif, l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris, le 30 juin 2022, s'était borné à rejeter le recours en annulation de la décision de l'Autorité et dire, en conséquence, sans statuer sur la demande tendant à voir juger que la LFP avait commis un abus de position dominante, qu'il n'y avait pas lieu à statuer, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1355 du code civil, ensemble les articles 122 et 480 du code de procédure civile. »
13. La société beIN Sports fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable en ses demandes tirées du refus de la LFP de remettre en concurrence le lot 3 pour l'appel à candidature de janvier 2021, alors « que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables les demandes de la société beIN Sports tirées du refus de la LFP de remettre en concurrence le lot 3 pour l'appel à candidature de janvier 2021, que les moyens soulevés de ce chef avaient "déjà été soumis, dans leur substance, à l'Autorité, puis en cause de recours contre sa décision du 11 juin 2021, à la chambre [de la régulation économique] de la cour d'appel de Paris, qui, dans son arrêt du 30 juin 2022, les a écartés", cependant que l'arrêt du 30 juin 2022 n'a tranché, dans son dispositif, aucune demande tendant à caractériser un abus de position dominante de la LFP pour avoir refusé de remettre en concurrence le lot 3 lors de l'appel d'offres de janvier 2021, et que les motifs de cet arrêt, qui indiquaient expressément que la cour d'appel ne pouvait pas statuer sur une telle demande, étaient pour le surplus dépourvus d'autorité de chose jugée, de sorte que cet arrêt du 30 juin 2022 ne pouvait faire obstacle aux demandes soulevées de ce chef par la société beIN Sports, la cour d'appel a violé les articles 1355 du code civil et 480 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1355 du code civil, L. 462-8, alinéa 2, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021 relative à la transposition de la directive (UE) 2019/1 du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en oeuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, et L. 464-8 du même code :
14. En vertu du premier de ces textes, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif.
15. Selon le deuxième, lorsque l'Autorité estime que les faits invoqués au soutien d'une saisine ne sont pas appuyés d'éléments suffisamment probants, elle dispose de la faculté de rejeter cette saisine.
16. Il résulte du troisième que les recours formés contre les décisions de l'Autorité sont limités à leur objet. Dès lors, la cour d'appel de Paris, saisie d'un recours formé contre une décision de l'Autorité rejetant sa saisine sur le fondement de l'article L. 462-8, alinéa 2, du code de commerce, doit seulement vérifier si les faits invoqués, tels qu'ils ont été soumis à l'Autorité, étaient appuyés d'éléments suffisamment probants.
17. Pour déclarer irrecevables les demandes des sociétés Canal + et beIN Sports tendant à l'annulation de l'appel à candidatures de 2021 et à ce qu'il soit enjoint à la LFP d'organiser un nouvel appel à candidatures incluant le lot 3, ainsi que leur demande tendant à l'annulation de la cession de gré à gré à la société Amazon des droits restitués par la société Mediapro, en tant qu'elle est fondée sur les manquements commis par la LFP lors de l'appel à candidatures de 2021, l'arrêt retient que les moyens « développés en fait » par la société Canal + et la société beIN Sports au soutien de ces demandes, ont déjà été soumis, « dans leur substance », à la chambre de la régulation économique de la cour d'appel d'appel de Paris, qui les a écartés par son arrêt du 30 juin 2022, et en déduit que lesdites demandes méconnaissent l'autorité de chose jugée de cet arrêt.
18. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le troisième moyen, pris en sa cinquième branche, du pourvoi n° 23-13.067 et le deuxième moyen, pris en sa sixième branche, du pourvoi n° 23-14.828
Enoncé du moyen
19. La société Canal + fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de nullité de l'attribution de gré à gré, par la LFP à la société Amazon, des lots restitués par la société Mediapro tirée de la discrimination tarifaire sur le marché aval de la distribution de services de télévision payante, alors « que la société Canal + sollicitait dans ses conclusions l'annulation de l'attribution de gré à gré, par la LFP à la société Amazon, des lots restitués par la société Mediapro, attribution constitutive d'une discrimination tarifaire sur le marché aval de la distribution télévisuelle des matchs de Ligue 1 ; qu'elle faisait valoir, notamment et preuves à l'appui, que le refus, en janvier 2021, de remettre le lot 3 dans l'appel d'offres, n'avait pas permis l'attribution des lots dans des conditions similaires, créant une discrimination tarifaire à son détriment en raison d'un coût de revient plus élevé eu égard aux conditions inflationnistes dans lesquelles s'était déroulé l'appel d'offres en 2018 ; qu'en se bornant à relever que "l'essentiel de ces moyens rapportés à la conduite de la procédure d'adjudication en 2021 a été écarté par l'arrêt [de la chambre de la régulation économique] de la cour d'appel de Paris [du 30 juin 2022]", quand l'arrêt rendu le 30 juin 2022 était dépourvu de toute autorité de chose jugée et qu'il lui appartenait d'examiner elle-même l'existence d'une discrimination tarifaire, née du refus de la LFP de réintégrer le lot 3 pour la réattribution, la cour d'appel, qui a méconnu les termes de son office, a violé l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ensemble l'article L. 420-2 du code de commerce. »
20. La société beIN Sports fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de nullité de l'attribution de gré à gré, par la LFP à la société Amazon, des lots restitués par la société Mediapro tirée de la discrimination tarifaire sur le marché aval de la distribution de services de télévision payante, alors « que, pour motiver sa décision, le juge doit se déterminer d'après les éléments particuliers de fait et de preuve qui lui sont soumis et non par voie de référence à des causes déjà jugées ; qu'en retenant, pour écarter tout abus de position dominante de la LFP sur le marché aval de l'édition et de la commercialisation des chaînes de télévision payante, que "l'essentiel [des] moyens rapportés à la conduite de la procédure d'adjudication en 2021 a été écarté par l'arrêt [de la chambre de la régulation économique] de la cour d'appel de Paris [du 30 juin 2022]" et que, "s'agissant des mêmes griefs appliqués à l'attribution de gré à gré des lots à la société Amazon, ils ont aussi [?] déjà été soumis à l'Autorité", quand elle devait se livrer à un examen effectif de la cause, en se déterminant d'après les éléments particuliers de fait et de preuve qui lui étaient soumis et non par voie de référence à l'arrêt du 30 juin 2022 et à la décision du 30 novembre 2022 de l'Autorité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
21. Il résulte de ce texte que, pour motiver sa décision, le juge ne peut se borner à se référer à une décision antérieure, intervenue dans une autre cause.
22. Pour rejeter la demande de nullité de l'attribution de gré à gré, par la LFP à la société Amazon, des lots restitués par la société Mediapro prise de la discrimination tarifaire sur le marché aval de la distribution de services de télévision payante, l'arrêt retient que l'essentiel des moyens se rapportant à la conduite de l'appel à candidatures de 2021 a été écarté par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2022.
23. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi n° 23-13.067 et le deuxième moyen, pris en sa cinquième branche, du pourvoi n° 23-14.828
Enoncé du moyen
24. La société Canal + fait le même grief à l'arrêt, alors « que l'article L. 481-2 du code de commerce ne crée, dans les conditions et la mesure qu'il prévoit, de présomption irréfragable d'une pratique concurrentielle que lorsque "son existence et son imputation à cette personne ont été constatées par une décision qui ne peut plus faire l'objet d'une voie de recours ordinaire pour la partie relative à ce constat, prononcée par l'Autorité de la concurrence ou par la juridiction de recours" ; que, par la décision n° 22-D-22 du 30 novembre 2022, l'Autorité a rejeté, faute d'éléments suffisamment probants, la saisine de la société Canal + et sa demande de mesures conservatoires ; qu'en affirmant, pour confirmer le jugement entrepris et débouter la société Canal + de ses demandes, qu'en application des termes de l'article L. 481-2 du code de commerce, dont l'application est d'ordre public, "la cour examinera les faits et moyens tirés de l'abus de position dominante reproché par les sociétés Canal + et beIN Sports à la LFP et à la société Amazon [...] d'après les présomptions irréfragablement établies par la seconde décision de l'Autorité n° 22-D-22 du 30 novembre 2022", quand aucune présomption irréfragable ne pouvait être déduite de cette décision, qui se bornait à rejeter, faute d'éléments suffisamment probants, une plainte pour abus de position dominante, la cour d'appel a violé l'article L. 481-2 du code de commerce. »
25. La société beIN Sports fait le même grief à l'arrêt, alors que « la présomption irréfragable instituée par l'article L. 481-2 du code de commerce porte seulement sur l'existence d'une pratique anticoncurrentielle reconnue caractérisée par l'Autorité ou la cour d'appel dans une décision devenue définitive ; qu'en retenant, pour refuser de caractériser un abus de position dominante de la LFP sur le marché aval de l'édition de chaînes de télévision premium, qu'elle "examinera les faits et moyens tirés de l'abus de position dominante reproché par les sociétés Canal + et beIN Sports à la LFP et à la société Amazon d'après [?] les présomptions irréfragablement établies par la seconde décision de l'Autorité n° 22-D-22 du 30 novembre 2022" et que "[ces griefs] ont aussi été soumis à l'Autorité, telle qu'elle l'a rapporté aux paragraphes 57 et 83 à 89 de sa décision du 30 novembre 2022", cependant que cette décision de l'Autorité a écarté l'existence de la pratique anticoncurrentielle dénoncée devant elle pour insuffisance de preuve, de sorte qu'aucune présomption irréfragable ne pouvait en être déduite, la cour d'appel a violé l'article L. 481-2 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 481-2 du code de commerce :
26. Aux termes de ce texte, une pratique anticoncurrentielle mentionnée à l'article L. 481-1 est présumée établie de manière irréfragable à l'égard de la personne physique ou morale désignée au même article dès lors que son existence et son imputation à cette personne ont été constatées par une décision qui ne peut plus faire l'objet d'une voie de recours ordinaire pour la partie relative à ce constat, prononcée par l'Autorité ou par la juridiction de recours.
27. Pour rejeter la demande de nullité de l'attribution de gré à gré, par la LFP à la société Amazon, des lots restitués par la société Mediapro, prise de la discrimination tarifaire sur le marché aval de la distribution de services de télévision payante, l'arrêt, après avoir énoncé que la cour d'appel examinera les faits et moyens tirés de l'abus de position dominante reproché par les sociétés Canal + et beIN Sports aux sociétés LFP et Amazon d'après les présomptions irréfragablement établies par la seconde décision de l'Autorité, retient que les moyens se rapportant à l'attribution de gré à gré des lots à la société Amazon ont déjà été soumis à l'Autorité, qui, par sa décision du 30 novembre 2022, les a écartés.
28. En statuant ainsi, alors que l'Autorité s'étant, par sa décision, bornée à rejeter sa saisine faute d'éléments suffisamment probants, il n'en résultait aucune présomption, fût-elle même seulement réfragable, que l'attribution de gré à gré à la société Amazon des lots restitués par la société Mediapro n'était pas constitutive d'un abus de position dominante sur le marché aval des droits de diffusion télévisuelle, la cour d'appel, à qui il appartenait donc d'examiner elle-même l'existence d'une discrimination tarifaire, a violé le texte susvisé par fausse application.
Sur le troisième moyen, pris en sa septième branche, du pourvoi n° 23-13.067 et le deuxième moyen, pris en sa huitième branche, du pourvoi n° 23-14.828
Enoncé du moyen
29. La société Canal + fait le même grief à l'arrêt, alors « que, dans ses conclusions, elle faisait valoir à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'attribution de gré à gré, par la LFP à la société Amazon, des lots restitués par la société Mediapro, attribution ayant pour conséquence une discrimination tarifaire sur le marché aval de la distribution télévisuelle des matchs de Ligue 1, qu'ainsi qu'il avait été reconnu par la pratique décisionnelle européenne et française, l'importance des droits audiovisuels du football et de la Ligue 1, en particulier, revêtait pour la concurrence sur les marchés avals de la télévision payante une importance primordiale et qu'il était impossible pour l'exploitant du lot 3 de conserver ou d'acquérir des abonnés en proposant 20 % des matchs de Ligue 1, avec un coût de revient annuel de 332 millions d'euros, quand la société Amazon pouvait proposer 80 % des matchs de Ligue 1, dont les meilleures affiches, avec un coût de revient de 250 millions d'euros ; qu'elle observait que, de fait, la société Amazon proposait un abonnement Pass Ligue, permettant l'accès à 80 % des matchs de Ligue 1, aux abonnés Prime pour un montant mensuel de 12,99 euros, quand la société Canal + ne pouvait proposer à ses abonnés que la chaîne Canal Plus Sports permettant d'avoir accès aux 20 % des matchs constituant le lot 3 pour un montant de 21 euros supplémentaires ; qu'en se bornant à affirmer, pour rejeter la demande par un motif qualifié de surabondant, qu'en l'absence de mesure des coûts supportés par les sociétés beIN Sports et Canal +, de l'économie des investissements amortis par le distributeur historique et de l'absence de données sur les prix et les coûts des abonnements pour la réceptions des matchs de football en rapport avec les autres programmes premium de la société Canal +, le prix de revient de la retransmission des matchs du lot 3 n'était pas établi, de sorte que n'était pas non plus établie "la preuve de son caractère excessif entraînant un désavantage dans la concurrence par les prix sur les marchés avals ou connexes", sans rechercher s'il ne ressortait pas de la seule comparaison des prix d'achat respectifs des droits de diffusion télévisuelle, compte tenu de la composition des lots acquis, lesquels constituaient la quasi-totalité des coûts de revient de retransmission, l'existence d'un désavantage dans la concurrence par les prix sur le marché aval de la distribution télévisuelle des matchs de Ligue 1, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article L. 420-2 du code de commerce. »
30. La société beIN Sports fait le même grief à l'arrêt, alors « que la constatation d'un désavantage dans la concurrence, au sens de l'article 102, second alinéa, sous c), du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ne requiert pas la preuve d'une détérioration effective et quantifiable de la position concurrentielle, mais doit se fonder sur une analyse de l'ensemble des circonstances pertinentes de l'espèce qui permet de conclure que ledit comportement a une influence sur les coûts, sur les bénéfices ou sur un autre intérêt pertinent d'un ou de plusieurs partenaires commerciaux sur le marché aval, de sorte que ce comportement est de nature à affecter ladite position ; qu'en retenant, pour écarter tout abus de position dominante de la LFP sur le marché aval de l'édition et de la commercialisation des chaînes de télévision payante, en dépit d'un traitement tarifaire différencié entre les sociétés beIN Sports et Amazon, qu' "en l'absence de prix de revient de la retransmission des matchs du lot 3, il ne peut non plus être établi la preuve que sa valeur est excessive et entraîne un désavantage dans la concurrence par les prix sur les marchés avals ou connexes", cependant que l'influence de la pratique anticoncurrentielle dénoncée par la société beIN Sports sur ses coûts ne constituait pas le seul élément susceptible de caractériser ladite pratique anticoncurrentielle qui devait, au contraire, être appréciée au vu de l'ensemble des circonstances pertinentes de l'espèce, tirées en particulier des écarts entre les prix des droits payés par les sociétés beIN Sports et Amazon, des écarts entre les prix moyens des matchs dont les deux sociétés ont, respectivement, acquis les droits, du fait que la LFP avait adopté une logique de péréquation qui revenait à faire supporter à la société beIN Sports l'avantage concurrentiel octroyé à la société Amazon, ainsi que du traitement de faveur ainsi accordé à la société Amazon au regard de la faiblesse des droits payés par celle-ci, en valeur absolue, comme en valeur relative des matchs, la cour d'appel a violé les articles 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et L. 420-2 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et l'article L. 420-2 du code de commerce :
31. Aux termes du premier de ces textes, est incompatible avec le marché intérieur et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci. Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence.
32. Aux termes du second, est prohibée, dans les conditions prévues à l'article L. 420-1 du code de commerce, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées.
33. Pour rejeter la demande en nullité de l'attribution de gré à gré, par la LFP à la société Amazon, des lots restitués par la société Mediapro, tirée de la discrimination tarifaire sur le marché aval de la distribution de services de télévision payante, l'arrêt relève qu'aucun des écarts, arithmétiques ou différentiels entre le prix d'attribution du lot 3 aux sociétés beIN Sports et Canal + et le prix des lots attribués à la société Amazon, avec les prix de distribution des matchs selon les lots, leur programme ou leur attractivité, ne sont mesurés avec les coûts supportés par les sociétés beIN Sports ou Canal +, ni non plus d'après l'économie des investissements amortis par la distribution historique de ces programmes par la société Canal +, ni encore d'après des données, dont la société Canal + se prévaut, sur les prix et les coûts des abonnements pour la réception des matchs de football en rapport avec les autres programmes premium de la société Canal +, ni enfin, d'après des valeurs sur les marchés intermédiaires de l'édition et de la commercialisation de chaînes de télévision payante des sociétés beIN Sports et Canal +. Il en déduit qu'en l'absence de prix de revient de la retransmission des matchs du lot 3, il ne peut être établi la preuve que sa valeur est excessive et entraîne un désavantage dans la concurrence par les prix sur les marchés avals ou connexes.
34. En se déterminant ainsi sur la question des prix de revient dont la comparaison pouvait dépendre de l'efficacité des différents acteurs, et sans procéder à une appréciation de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Et sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, du pourvoi n° 23-13.067
Enoncé du moyen
35. La société Canal + fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande de condamnation de la société Filiale LFP1, venant aux droits de la LFP, à lui payer 68,1 % des sommes qu'elle avait acquittées au titre du lot 3 depuis l'attribution des droits de Ligue 1 à la société Amazon, alors :
« 2°/ que les parties peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions pour faire juger les questions nées de la survenance d'un fait postérieur au jugement entrepris ; que la cour d'appel a constaté qu'alors que le jugement entrepris avait été rendu par le tribunal de commerce de Paris le 11 mars 2021, la LFP avait attribué, le 11 juin 2021, aux termes d'une négociation de gré à gré, à la société Amazon l'ensemble des lots restitués par la société Mediapro, incluant les droits de diffusion de 80 % des matchs du championnat de Ligue 1, dont les dix meilleures affiches, pour un prix de 250 millions d'euros par saison ; qu'à la suite de cette attribution, la société Canal + avait sollicité, en cause d'appel, la condamnation de la LFP à lui payer la différence entre le prix qu'elle avait payé pour le lot 3 (332 millions d'euros par saison) et la valeur de ce lot, telle qu'elle aurait été fixée dans les termes de l'accord conclu avec la société Amazon (105,9 millions d'euros par saison), soit 68,1 % des sommes qu'elle avait acquittées au titre du lot 3 depuis l'attribution des droits de Ligue 1 à la société Amazon ; qu'en déclarant irrecevable cette demande, tendant à l'indemnisation du préjudice né de l'attribution, postérieure au jugement entrepris, des lots restitués par la société Mediapro à la société Amazon au prix de 250 millions d'euros par saison, la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile ;
3°/ que les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ; que la cour d'appel a constaté qu'en première instance, la société Canal + avait sollicité l'annulation de l'appel à candidatures lancé le 19 janvier 2021 par la LFP ainsi que tout accord de gré à gré subséquent portant sur les saisons 2021-2022 à 2023-2024 et qu'il soit enjoint à la LFP d'organiser un appel à candidatures pour la commercialisation des droits du championnat de Ligue 1 restitués par la société Mediapro pour les saisons 2021-2022 à 2023-2024 incluant le Lot 3 attribué à beIN Sports et exploité par Canal + ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer irrecevable la demande de condamnation de la société Filiale LFP1 à payer à la société Canal + 68,1 % des sommes acquittées par cette dernière au titre du lot 3 depuis l'attribution des droits de Ligue 1 à la société Amazon, que "les demandes soumises par la société Canal + aux premiers juges ne comprennent pas celle soutenue pour la première fois en cause d'appel tendant à la condamnation de la LFP à payer à 68,1 % des sommes qu'elle a acquittées au titre du lot 3 depuis l'attribution des droits de Ligue 1 à la société Amazon", sans rechercher, au besoin même d'office, si cette demande n'était pas la conséquence ou le complément nécessaire des demandes d'annulation de tout accord de gré à gré portant sur les saisons 2021-2022 à 2023-2024 et d'injonction d'organiser un appel à candidatures pour la commercialisation des droits du championnat de Ligue 1 restitués par la société Mediapro pour les saisons 2021-2022 à 2023-2024 incluant le lot 3, la LFP ayant, entre-temps, conclu un accord de gré à gré avec la société Amazon, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 564 et 566 du code de procédure civile :
36. Aux termes du premier de ces textes, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
37. Aux termes du second, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
38. Pour déclarer irrecevable la société Canal + en sa demande de condamnation de la société Filiale LFP1 à payer 68,1 % des sommes qu'elle a acquittées au titre du lot 3 depuis l'attribution des droits de Ligue 1 à la société Amazon, l'arrêt retient que les demandes soumises par la société Canal + aux premiers juges ne comprennent pas celles soutenues pour la première fois en cause d'appel et tendant à la condamnation de la LFP à lui verser 68,1 % des sommes qu'elle a acquittées au titre du lot 3 depuis l'attribution des droits de Ligue 1 à la société Amazon.
39. En se déterminant ainsi, sans rechercher, au besoin d'office, comme il lui incombait, si, d'une part, cette prétention ne tendait pas à faire juger les questions nées de la cession, le 11 juin 2021, postérieurement au jugement entrepris, à la société Amazon des droits restitués par la société Mediapro ou, d'autre part, elle ne constituait pas l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles présentées en première instance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 février 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne, d'une part, l'association Ligue française de football professionnel et la société Filiale LFP1, d'autre part, la société Amazon Digital UK aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes, d'une part, de l'association Ligue française de football professionnel et de la société Filiale LFP1, d'autre part, de la société Amazon Digital UK, condamne l'association Ligue française de football professionnel, la société Filiale LFP1 et la société Amazon Digital UK à payer à la société Groupe canal + la somme globale de 3 000 euros et condamne la société Filiale LFP1 à payer à la société beIN Sports France la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille vingt-quatre.