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18/09/2024 | FRANCE | N°52400910

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 septembre 2024, 52400910


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


ZB1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 18 septembre 2024








Cassation partielle




M. FLORES, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président






Arrêt n° 910 F-D


Pourvoi n° H 23-10.080


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [U].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près l

a Cour de cassation
en date du 20 octobre 2022.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 septembre 2024

Cassation partielle

M. FLORES, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président

Arrêt n° 910 F-D

Pourvoi n° H 23-10.080

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [U].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 20 octobre 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 SEPTEMBRE 2024

M. [S] [C] [U], domicilié chez Mme [E] [T], [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 23-10.080 contre l'arrêt rendu le 6 janvier 2022 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Alliance, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], prise en la personne de Mme [F] [R], en qualité de mandataire ad litem de la société Nero corporation,

2°/ à l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Île-de-France Ouest, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Flores, conseiller conseiller le plus ancien faisant fonction de président, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [U], après débats en l'audience publique du 3 juillet 2024 où étaient présents M. Flores, conseiller le plus ancien faisant fonction de président et rapporteur, Mmes Ala, Techer, conseillers référendaires ayant voix délibérative, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée en application des articles R. 431-7 et L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 6 janvier 2022), M. [U] a été engagé en qualité de chauffeur le 29 novembre 2017 par la société Nero corporation (la société).

2. La société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 2 mai 2018, la société Alliance étant désignée en qualité de mandataire.

3. Le salarié a été licencié pour motif économique le 16 mai 2018.

4. Le 14 juin 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution du contrat de travail.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater que l'employeur a satisfait à toutes ses obligations et de le débouter de sa demande à titre de dommages-intérêts pour non-respect des temps de pause, de repos et de durée maximale de travail, alors « que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation ; qu'après avoir constaté que l'employeur ne communiquait aucun élément de nature à établir le respect de la durée hebdomadaire, journalière de travail et des temps de repos et de pause du salarié qui produisait, pour sa part, des pièces permettant à l'employeur d'y répondre utilement, que l'employeur ne justifiait donc pas du respect de ses obligations à ce titre et que son manquement était, dès lors, établi, la cour d'appel a débouté le salarié de sa demande en dommages-intérêts motif pris qu'il ne justifiait d'aucun préjudice ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-20, L. 3121-21 et L. 3121-22 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige, interprétés à la lumière de l'article 6 b) de la directive n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3121-20, interprété à la lumière de l'article 6 b) de la directive n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, L. 3121-21 et L. 3121-22 du code du travail :

6. Aux termes du premier de ces textes, au cours d'une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser quarante-huit heures.

7. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire fixée à l'article 6, sous b), de la directive 2003/88 constitue, en tant que tel, une violation de cette disposition, sans qu'il soit besoin de démontrer en outre l'existence d'un préjudice spécifique (CJUE, 14 octobre 2010, Fuß c. Stadt Halle, C-243/09, point 53). Cette directive poursuivant l'objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d'un repos suffisant, le législateur de l'Union a considéré que le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire, en ce qu'il prive le travailleur d'un tel repos, lui cause, de ce seul fait, un préjudice dès lors qu'il est ainsi porté atteinte à sa sécurité et à sa santé (CJUE,14 octobre 2010, Fuß c. Stadt Halle, C-243/09, point 54). La Cour de justice de l'Union européenne a précisé que c'est au droit national des États membres qu'il appartient, dans le respect des principes d'équivalence et d'effectivité, d'une part, de déterminer si la réparation du dommage causé à un particulier par la violation des dispositions de la directive 2003/88 doit être effectuée par l'octroi de temps libre supplémentaire ou d'une indemnité financière et, d'autre part, de définir les règles portant sur le mode de calcul de cette réparation (CJUE, 25 novembre 2010, Fuß c. Stadt Halle, C-429/09, point 94).

8. Aux termes du dernier de ces textes, la durée hebdomadaire de travail calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives ne peut dépasser quarante-quatre heures sauf dans les cas prévus aux articles L. 3121-23 à L. 3121-25.

9. Ces dispositions participent de l'objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d'un repos suffisant et le respect effectif des limitations de durées maximales de travail concrétisé par la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.

10. Pour constater que l'employeur a satisfait à toutes ses obligations et débouter le salarié de sa demande à titre de dommages-intérêts pour non-respect des temps de pause, de repos et de durée maximale de travail, l'arrêt, après avoir énoncé que la preuve du respect des prescriptions légales, prétendument violées, incombe à l'employeur, retient que ce dernier ne communique aucun élément de nature à établir le respect de la durée hebdomadaire, journalière de travail et des temps de repos et de pause du salarié. L'arrêt ajoute que l'employeur ne justifie pas du respect de ses obligations à ce titre et que son manquement est, dès lors, établi. Il relève cependant que le salarié ne justifie d'aucun préjudice à l'appui de cette demande indemnitaire.

11. En statuant ainsi, alors que le seul constat du non-respect des dispositions relatives aux durées maximales de travail ouvre droit à la réparation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il constate que la société Nero corporation a satisfait à toutes ses obligations et déboute M. [U] de sa demande à titre de dommages-intérêts pour non-respect des temps de pause, de repos et de durée maximale du travail, l'arrêt rendu le 6 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;

Condamne la société Alliance, en sa qualité de mandataire ad litem de la société Nero corporation, et l'AGS-CGEA d'Île-de-France Ouest aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Alliance, ès qualités, et l'AGS-CGEA d'Île-de-France Ouest à payer à la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400910
Date de la décision : 18/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 06 janvier 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 sep. 2024, pourvoi n°52400910


Composition du Tribunal
Président : M. Flores (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400910
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