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11/09/2024 | FRANCE | N°52400859

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 septembre 2024, 52400859


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 11 septembre 2024








Cassation partielle




Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 859 F-B


Pourvoi n° Q 22-18.409












R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________

> AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 SEPTEMBRE 2024


La société Les Mandataires, société par actions simplifiée, représentée par M. [PB] [A], ayant son siège [Adres...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 septembre 2024

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 859 F-B

Pourvoi n° Q 22-18.409

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 SEPTEMBRE 2024

La société Les Mandataires, société par actions simplifiée, représentée par M. [PB] [A], ayant son siège [Adresse 20], ayant un établissement, [Adresse 16], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société OFP Maintenance, anciennement représentée par la société Ortec industrie, agissant en qualité de liquidateur amiable de la société OFP Maintenance, a formé le pourvoi n° Q 22-18.409 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2022 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [R] [I], domicilié [Adresse 5],

2°/ à M. [ET] [F], domicilié [Adresse 11],

3°/ à M. [R] [V], domicilié [Adresse 8],

4°/ à M. [C] [P], domicilié [Adresse 6],

5°/ à Mme [S] [T], domiciliée [Adresse 14],

6°/ à M. [Y] [J], domicilié [Adresse 22],

7°/ à M. [G] [B], domicilié [Adresse 15],

8°/ à M. [EL] [L], domicilié [Adresse 23],

9°/ à M. [Z] [TM], domicilié [Adresse 12],

10°/ à M. [TF] [UI], domicilié [Adresse 4],

11°/ à M. [X] [HX], domicilié [Adresse 9],

12°/ à M. [TU] [PI], domicilié [Adresse 17],

13°/ à M. [H] [W], domicilié [Adresse 19],

14°/ à M. [U] [M], domicilié [Adresse 1],

15°/ à M. [XU] [O], domicilié [Adresse 13],

16°/ à M. [K] [N], domicilié [Adresse 7],

17°/ à M. [XM] [XF], domicilié [Adresse 18],

18°/ à M. [IE] [UB], domicilié [Adresse 10],

19°/ à M. [H] [OU], domicilié [Adresse 2],

20°/ à M. [D] [E], domicilié [Adresse 21],

21°/ à la société Sud-Ouest déchets industriels, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 25],

22°/ à Pôle emploi, direction régionale Auvergne-Rhône-Alpes, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, six moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Les Mandataires, ès qualités, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Sud-Ouest déchets industriels, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [T], de MM. [I], [F], [V], [P], [J], [B], [L], [TM], [UI], [HX], [PI], [W], [M], [O], [N], [XF], [UB], [OU] et [E], après débats en l'audience publique du 25 juin 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Barincou, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 7 avril 2022), Mme [T] ainsi que MM. [I], [F], [V], [P], [J], [B], [L], [TM], [UI], [HX], [PI], [W], [M], [O], [N], [XF], [UB], [OU] et [E] ont été engagés par la société OFP Maintenance.

2. La société OFP Maintenance avait conclu, en octobre 2006, un contrat d'entretien et de maintenance sur le site chimique de [Localité 24] qui a été attribué, à compter du 31 mai 2017, à la société Sud-Ouest déchets industriels.

3. En conséquence, en juin 2017, la société OFP Maintenance a proposé aux salariés un contrat de sécurisation professionnelle qu'ils ont accepté.

4. Par décisions des 20 juillet et 28 août 2017, l'administration a autorisé le licenciement de Mme [T] et MM. [I], [J], [PI], [W], [O] et [UB] qui avaient le statut de salariés protégés. Ces autorisations ont ensuite été annulées au motif que les contrats de travail auraient dû être transférés en application de l'article L. 1224-1 du code du travail.

5. En septembre et novembre 2018, les vingt salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour contester la rupture de leur contrat de travail.

6. Par jugement du 1er septembre 2022, la société OFP Maintenance, alors en liquidation amiable, a été placée en liquidation judiciaire et la société Les Mandataires a été désignée en qualité de liquidateur.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

8. La société Les Mandataires, ès qualités, fait grief à l'arrêt de condamner la société OFP Maintenance à payer à Mme [T] ainsi qu'à MM. [I], [F], [V], [P], [B], [L], [TM], [UI], [HX], [PI], [W], [M], [O], [N], [XF], [UB], [OU] et [E] diverses sommes au titre de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de lui ordonner de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômages perçues par ces salariés, dans la limite de six mois d'indemnités, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer ou observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, l'employeur faisait valoir que ''S'agissant de l'information de la commission paritaire régionale de l'emploi et de la formation professionnelle, la société OFP Maintenance a produit la lettre adressée à cet organisme le 17 mai 2017 ainsi que, dans un premier temps, la copie de l'accusé réception et dans un second temps, sur demande des conseillers prud'hommes, une copie plus lisible de l'accusé réception. Pour prétendre que la commission paritaire régionale de l'emploi et de la formation professionnelle n'aurait pas été saisie, les appelants entendent se prévaloir du rapport établi par la Direccte pour les besoins du recours hiérarchique, dans lequel il est allégué que cet organisme n'aurait pas été saisi, ce qui est totalement inexact, la production de l'accusé réception puis l'original faisant foi'' ; que le bordereau de communication annexé aux conclusions d'appel mentionnait, sous les numéros 67-a et 67-b, les notes en délibéré et leurs pièces annexes adressées au conseil de prud'hommes les 27 novembre 2019 et 22 janvier 2020 et ces notes en délibéré visaient parmi leurs annexes respectivement une copie et l'original de l'accusé de réception de la lettre du 17 mai 2017 ; que la communication de ces pièces n'avait fait l'objet d'aucune contestation, les salariés ne contestant que la valeur probante de l'accusé de réception transmis le 27 novembre 2019 ; qu'en affirmant, pour retenir que la société OFP Maintenance échouait à rapporter la preuve qu'elle avait informé et fait appel à la Commission dans le cadre de la recherche des possibilités de reclassement, que l'employeur ne produisait pas l'accusé de réception de la lettre du 17 mai 2017 en cause d'appel, et que les courriers produits par l'employeur relatifs à la transmission d'une photocopie de l'accusé réception et de l'original importaient peu dès lors que l'accusé de réception en question n'était pas produit en cause d'appel, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de l'accusé de réception, constituant une pièce annexe des notes en délibéré, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

9. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

10. Pour dire les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur produit la lettre du 17 mai 2017 par laquelle il soutient avoir saisi la commission territoriale de l'emploi puis ajoute que s'il avait produit l'avis de réception de cette lettre devant le conseil de prud'hommes, dans le cadre d'une note en délibéré du 27 novembre 2019, les salariés avaient soutenu que l'accusé de réception produit en première instance manquait de valeur probante, et que, néanmoins, l'employeur ne produit pas ledit accusé de réception en cause d'appel et se contente uniquement du courrier en date du 17 mai 2017, les courriers relatifs à la transmission d'une photocopie de l'accusé de réception et de l'original, important peu dès lors que l'accusé de réception en question n'est pas produit en cause d'appel et que le conseil de prud'hommes ne s'est pas prononcé sur cette demande.

11. En statuant ainsi, alors que les salariés ne contestaient pas la production de l'accusé réception en cause d'appel et que l'employeur faisait valoir dans ses conclusions qu'il avait produit, dans un premier temps, la copie de l'accusé réception et, dans un second temps, sur demande des conseillers prud'hommes, une copie plus lisible de l'accusé réception et que son bordereau de pièces, annexé à ces conclusions, mentionnait les deux notes en délibéré ainsi que leurs pièces annexes, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur l'absence au dossier de l'accusé réception, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

12. La société Les Mandataires, ès qualités, fait grief à l'arrêt de condamner la société OFP Maintenance à payer des dommages-intérêts pour licenciement nul à M. [J] et d'ordonner à cette société de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômages perçues par ce salarié, dans la limite de six mois d'indemnités, alors « que la cessation d'activité réelle de l'entreprise rend impossible le maintien du contrat de travail du salarié en arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle et permet donc de rompre son contrat ; qu'en l'espèce, la cessation d'activité de la société OFP Maintenance n'était pas contestée ; qu'en affirmant cependant que cette société ne démontrait pas l'impossibilité de maintenir le contrat de travail du salarié pour un motif non lié à l'accident du travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail :

13. Dès lors que la cessation d'activité est réelle et qu'elle rend impossible la poursuite du contrat de travail, la résiliation de ce contrat n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail relatives au licenciement d'un salarié pendant une période de suspension consécutive à un accident du travail.

14. Pour juger le licenciement nul, l'arrêt constate d'abord que, à la date d'expiration du délai dont le salarié disposait pour prendre parti sur la proposition d'un contrat de sécurisation professionnelle, son contrat de travail était suspendu à la suite d'un accident du travail, puis retient ensuite que l'employeur, qui ne répond pas au moyen du salarié, n'apporte aucune pièce permettant de démontrer l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif non lié à l'accident du travail.

15. En statuant ainsi, alors que la cessation totale et définitive d'activité de la société OFP Maintenance n'était pas contestée, ce dont il résultait l'impossibilité pour l'employeur de maintenir le contrat de travail du salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Mise hors de cause

16. Il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société Sud-Ouest déchets industriels, la cour de renvoi devant statuer à nouveau sur les demandes des salariés, y compris en ce qu'elles sont dirigées contre cette société.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute la société OFP Maintenance de sa demande au titre de la fin de non-recevoir tirée de l'estopel, la condamne à payer diverses sommes à Mme [T] et MM. [I], [J], [W], [O], [UB] et [PI] au titre de l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail, et déboute Mme [T] ainsi que MM. [I], [F], [V], [P], [J], [B], [L], [TM], [UI], [HX], [PI], [W], [M], [O], [N], [XF], [UB], [OU] et [E] de leur demande de dommages-intérêts du fait des conditions vexatoires entourant leur licenciement, l'arrêt rendu le 7 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne la société Sud-Ouest déchets industriels, Mme [T] ainsi que MM. [I], [F], [V], [P], [J], [B], [L], [TM], [UI], [HX], [PI], [W], [M], [O], [N], [XF], [UB], [OU] et [E], aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400859
Date de la décision : 11/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maladie du salarié - Accident du travail ou maladie professionnelle - Suspension du contrat - Rupture pendant la période de suspension - Validité - Conditions - Impossibilité de maintenir le contrat - Motif étranger à l'accident ou à la maladie - Cas - Cessation réelle d'activité - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Nullité - Exclusion - Cas - Accident du travail ou maladie professionnelle - Licenciement prononcé pendant la période de suspension - Conditions - Impossibilité de maintenir le contrat - Motif étranger à l'accident ou à la maladie - Portée

Dès lors que la cessation d'activité est réelle et qu'elle rend impossible la poursuite du contrat de travail, la résiliation de ce contrat n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail relatives au licenciement d'un salarié pendant une période de suspension consécutive à un accident du travail


Références :

Articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 07 avril 2022

Sur les conditions de validité d'une rupture, en raison d'une cessation d'activité, pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, à rapprocher : Soc., 15 mars 2005, pourvoi n° 03-43038, Bull. 2005, V, n° 87 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 sep. 2024, pourvoi n°52400859


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Célice, Texidor, Périer, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400859
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