LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 septembre 2024
Cassation
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 771 F-D
Pourvoi n° V 22-18.000
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 SEPTEMBRE 2024
L'association Alforeas-irts de Lorraine, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° V 22-18.000 contre l'arrêt rendu le 24 février 2022 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Y] [K], domicilié [Adresse 1],
2°/ à Pôle emploi [Localité 5] [Localité 3], dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
M. [K] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal, invoque à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.
Le demandeur au pourvoi incident, invoque à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Douxami, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de l'association Alforeas-irts de Lorraine, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [K], après débats en l'audience publique du 11 juin 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Douxami, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à l'association Alforeas-irts de Lorraine du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Pôle emploi [Localité 5] [Localité 3].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 24 février 2022), M. [K], engagé en qualité de vacataire enseignante par l'association Alforeas-irts de Lorraine, a saisi la juridiction prud'homale aux fins notamment de voir requalifier les contrats de vacation en contrat à durée indéterminée, de faire produire à la rupture de la relation de travail les effets d'un licenciement nul ou, au moins, sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de la relation de travail.
3. Il a relevé appel, le 9 mars 2021, du jugement ayant partiellement fait droit à ses demandes.
Examen des moyens
Sur le premier moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la requalification des contrats à durée déterminée signés par les parties en un contrat à durée indéterminée et de le condamner à verser au salarié différentes sommes au titre de l'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, alors « que lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation des chefs de dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement ; que le respect de cette obligation s'apprécie au regard des conclusions déposées dans le délai de l'article 908 à l'exclusion de toutes conclusions ultérieures ; qu'en l'espèce, les conclusions déposées par M. [K] le 8 juin 2021, dans les trois mois de la déclaration d'appel déposée le 9 mars 2021, ne comportaient dans leur dispositif aucune demande d'annulation ou d'infirmation du jugement, de sorte que la cour d'appel ne pouvait que confirmer celui-ci ; qu'en décidant le contraire, et en infirmant la décision qui lui était déférée sur son appel, motif pris "que les dernières conclusions de M. [K] datées du 9 septembre 2021, dont la cour est saisie, se réfèrent dans leur dispositif à l'infirmation totale ou partielle du jugement déféré et sont recevables" la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 542, 908, 910-1, 910-4 et 954 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
5. Le salarié conteste la recevabilité du moyen. Il soutient, d'une part, qu'il dénonce en réalité une omission de statuer, la cour d'appel ayant statué sur la recevabilité de ses conclusions et non de ses prétentions, comme le sollicitait l'employeur, d'autre part, qu'il ne correspond pas aux prétentions d'appel de l'employeur qui ne demandait pas à la cour d'appel de confirmer purement et simplement le jugement.
6. Cependant, le moyen tiré de l'absence d'effet dévolutif de l'appel, faute pour le salarié d'avoir déposé dans les trois mois de la déclaration d'appel des conclusions sollicitant dans leur dispositif l'infirmation ou l'annulation du jugement, était inclus dans le débat, dès lors que l'employeur invoquait cette sanction dans ses conclusions.
7. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 542, 908 et 954 du code de procédure civile :
8. L'objet du litige devant la cour d'appel étant déterminé par les prétentions des parties, le respect de l'obligation faite à l'appelant de conclure conformément à l'article 908 s'apprécie nécessairement en considération des prescriptions de l'article 954.
9. Il résulte de ce dernier texte, en son deuxième alinéa, que le dispositif des conclusions de l'appelant remises dans le délai de l'article 908 doit comporter une prétention sollicitant expressément l'infirmation ou l'annulation du jugement frappé d'appel.
10. À défaut, en application de l'article 908, la déclaration d'appel est caduque ou, conformément à l'article 954, alinéa 3, la cour d'appel ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif, ne peut que confirmer le jugement.
11. Ainsi, l'appelant doit dans le dispositif de ses conclusions mentionner qu'il demande l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ou l'annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue de relever d'office la caducité de l'appel. Lorsque l'incident est soulevé par une partie, ou relevé d'office par le conseiller de la mise en état, ce dernier, ou le cas échéant la cour d'appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d'appel si les conditions en sont réunies (2e Civ., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-15-766, publié).
12. Pour requalifier les contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et condamner l'employeur à payer au salarié différentes sommes au titre de l'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, l'arrêt énonce d'abord que l'association Lorraine de formation et de recherche en action sociale fait valoir que les conclusions de M. [K] ont été notifiées le 8 juin 2021, que leur dispositif qui, aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, récapitule les prétentions, ne comporte aucune demande d'annulation, de réformation, d'infirmation totale ou partielle ou de confirmation partielle du jugement rendu en première instance et que M. [K] fait valoir qu'il s'agit d'une omission relevant d'une erreur matérielle, la déclaration d'appel visant « en tout premier lieu à voir infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy en date du 8 février 2021 en ce qu'il... » ; que la cour n'est saisie que des dernières conclusions.
13. L'arrêt retient ensuite que les dernières conclusions du salarié, datées du 9 septembre 2021, dont la cour est saisie, se réfèrent dans leur dispositif à l'infirmation totale ou partielle du jugement déféré.
14. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses énonciations que le salarié n'avait pas mentionné dans le dispositif de ses conclusions remises dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile qu'il demandait l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherchait l'anéantissement, ou l'annulation du jugement en sorte qu'elle ne pouvait que confirmer le jugement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs et le pourvoi incident, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Reims ;
Condamne M. [K] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille vingt-quatre.