LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 septembre 2024
Radiation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 457 F-D
Pourvoi n° N 23-19.262
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 SEPTEMBRE 2024
M. [N] [S], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 23-19.262 contre l'ordonnance rendue le 12 mai 2023 par le juge de l'expropriation du département de la Savoie siégeant au tribunal judiciaire de Chambéry, dans le litige l'opposant à la Métropole de Lyon, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Rat, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de M. [S], de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de la Métropole de Lyon, après débats en l'audience publique du 18 juin 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Rat, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller faisant fonction de doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. M. [S] s'est pourvu en cassation contre l'ordonnance du juge de l'expropriation du département de la Savoie du 12 mai 2023 ayant ordonné le transfert de propriété, au profit de la Métropole de Lyon, de lots d'un immeuble en copropriété lui appartenant, rendue sur renvoi après cassation de l'ordonnance du juge de l'expropriation du département du Rhône du 20 septembre 2021 ayant refusé de prononcer l'expropriation de ces lots (3e Civ., 14 décembre 2022, pourvoi n° 21-24.404).
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
2. M. [S] fait grief à l'ordonnance de déclarer expropriés les lots d'un immeuble en copropriété lui appartenant et d'envoyer la Métropole de Lyon en possession, alors :
« 1°/ que le juge de l'expropriation qui statue sur renvoi après cassation d'une précédente ordonnance connaît de l'affaire dans l'état où elle se trouvait avant qu'intervienne l'ordonnance annulée par la Cour de cassation ; qu'en se déterminant au vu de l'arrêté du préfet du Rhône du 21 mars 2023 déclarant cessibles au profit de la métropole de Lyon les propriétés nécessaires à l'opération de restauration immobilière confiée à celle-ci, portant sur les immeubles sis [Adresse 3] annexé audit arrêté, cependant qu'il devait statuer, en tant que juridiction de renvoi, en l'état de l'affaire telle qu'elle se trouvait avant qu'intervienne l'ordonnance annulée, soit en l'occurrence avant le 20 septembre 2021, date de l'ordonnance censurée par la Cour de cassation qui était fondée sur l'arrêté de cessibilité du préfet du Rhône du 19 avril 2021, abrogé par l'arrêté du 21 mars 2023, le juge de l'expropriation du département de la Savoie a méconnu l'étendue de sa saisine qui ne s'étendait pas à l'appréciation de l'arrêté de cessibilité du 21 mars 2023 mais à celle de l'arrêté du 19 avril 2021 dont il devait constater qu'il avait été abrogé, et a ainsi excédé ses pouvoirs ;
2°/ qu'en tout état de cause, le juge de l'expropriation qui statue sur renvoi après cassation d'une précédente ordonnance connaît de l'affaire dans l'état où elle se trouvait avant qu'intervienne l'ordonnance annulée par la Cour de cassation ; que dès lors qu'il ne pouvait donc connaître de l'arrêté de cessibilité du préfet du Rhône du 21 mars 2023, postérieur à l'ordonnance annulée par la Cour de cassation, en se déterminant au visa de cet arrêté, le juge de l'expropriation du département de la Savoie a méconnu sa compétence territoriale et a violé l'article L. 223-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. »
Réponse de la Cour
3. Lorsqu'une décision a été cassée en toutes ses dispositions, la juridiction de renvoi connaît de l'entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit (2e Civ., 9 janvier 1991, pourvoi n° 89-12.109, Bull. 1991, II, n° 5 ; 1re Civ., 7 décembre 1999, pourvoi n° 97-15.613, Bull. 1999, I, n° 334).
4. En annulant la première ordonnance d'expropriation et en renvoyant l'affaire devant le second juge, l'arrêt de cassation a substitué ce magistrat au premier dans toutes les attributions qui lui avaient appartenu sur le litige (3e Civ., 8 mai 1969, Bull. civ. III, n° 362 ; 3e Civ., 17 décembre 1969, Bull. Civ. III, n° 844).
5. Dès lors, le juge de l'expropriation du département de la Savoie, auquel la Cour de cassation avait renvoyé l'affaire, a pu, sans excéder ses pouvoirs, ni méconnaître sa compétence territoriale, rendre l'ordonnance attaquée au vu de l'arrêté de cessibilité du 21 mars 2023, postérieur à l'arrêt de cassation.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. M. [S] fait le même grief à l'ordonnance, alors « que l'annulation par le juge administratif de l'arrêté de cessibilité du préfet du Rhône du 21 mars 2023 entraînera, l'annulation par voie de conséquence de l'ordonnance du juge de l'expropriation pour le département de la Savoie du 12 mai 2023, en application des articles L. 1, L. 121-1 et L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. »
8. M. [S] sollicite la cassation de l'ordonnance, par voie de conséquence de l'annulation, par la juridiction administrative, de l'arrêté de cessibilité des parcelles nécessaires à la réalisation du projet déclaré d'utilité publique du 21 mars 2023.
9. L'issue de ce recours commandant l'examen du pourvoi et aucune décision irrévocable en ce qui le concerne n'ayant été portée à la connaissance de la Cour de cassation, il y a lieu de surseoir à statuer. PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le premier moyen du pourvoi ;
Sursoit à statuer sur le second moyen du pourvoi ;
Prononce la radiation du pourvoi n° N 23-19.262 ;
Dit qu'il sera rétabli au rang des affaires à juger, à la requête, adressée au président de la troisième chambre civile de la Cour de cassation, de la partie la plus diligente, notifiée par celle-ci aux autres parties et après production d'une décision irrévocable intervenue sur le recours formé devant la juridiction administrative ou de la décision constatant le désistement de l'instance dont a été saisie cette juridiction, dans le délai de deux mois à compter de la notification de cette décision ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq septembre deux mille vingt-quatre.