LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° G 24-83.501 F-D
N° 01168
SL2
4 SEPTEMBRE 2024
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 4 SEPTEMBRE 2024
Mme [D] [C] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 5 juin 2024, qui, dans l'information suivie contre elle des chefs de blanchiment, importation de stupéfiants en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants et associations de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande de modification de contrôle judiciaire.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de Mme Jaillon, conseiller, et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 septembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Jaillon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 3 mars 2024, Mme [D] [C] a été mise en examen des chefs susvisés et placée sous contrôle judiciaire, avec notamment pour obligation le versement d'un cautionnement d'un montant de 10 000 euros, payable par mensualités de 1 000 euros.
3. Le 2 mai 2024, elle a adressé au juge d'instruction une requête en modification ou mainlevée du contrôle judiciaire, restée sans réponse.
4. Le 17 mai 2024, l'avocat de l'intéressée a saisi la chambre de l'instruction de cette demande.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
5. Le moyen est pris de la violation des articles 1 du protocole n° 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 138, alinéa 2, 11°, et 593 du code de procédure pénale.
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande de mainlevée ou de modification du contrôle judiciaire présentée par Mme [C], alors :
2°/ que les juges devaient examiner les éléments nouveaux éclairant la situation financière de l'intéressée ;
3°/ qu'ils devaient s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de la mesure de cautionnement ordonnée et sur les ressources et charges de Mme [C].
Réponse de la Cour
Vu les articles 137, 138, alinéa 2, 11° et 593 du code de procédure pénale :
7. Il résulte des deux premiers de ces textes que le juge qui astreint une personne placée sous contrôle judiciaire à fournir un cautionnement doit s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité d'une telle mesure au regard des circonstances de l'espèce et de la situation financière de la personne mise en examen. Le montant et les délais de versement du cautionnement doivent être fixés compte tenu, notamment, des ressources et des charges de l'intéressé.
8. Tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
9. Pour rejeter la requête en mainlevée ou modification du contrôle judiciaire, l'arrêt relève que la défense n'apporte aucun élément nouveau de nature à reconsidérer la situation de Mme [C] et son implication dans les faits qui lui sont reprochés, telles qu'examinées par le juge d'instruction.
10. Les juges concluent que la mesure de cautionnement apparaît justifiée et nécessaire à titre de mesure de sûreté.
11. En statuant ainsi, sans mieux s'expliquer, d'une part, sur la nécessité et la proportionnalité de la mesure de cautionnement ordonnée, d'autre part, sur les ressources et charges exposées dans sa requête par la personne mise en examen, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
12. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 5 juin 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille vingt-quatre.