LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 4 septembre 2024
Cassation partielle
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 800 F-D
Pourvoi n° S 22-22.942
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 SEPTEMBRE 2024
Mme [D] [S], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 22-22.942 contre l'arrêt rendu le 9 septembre 2022 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à la société Guy Challancin, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Salomon, conseiller, les observations de Me Ridoux, avocat de Mme [S], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Guy Challancin, après débats en l'audience publique du 18 juin 2024 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Salomon, conseiller rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Thuillier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 9 septembre 2022), Mme [S] a été engagée en qualité d'agent de propreté à compter du 2 janvier 2003 par la société Mouette Propreté. Son contrat de travail a été transféré à la société Guy Challancin le 12 juillet 2013.
2. La salariée a saisi le 30 novembre 2016 la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Déclarée inapte à son poste sans possibilité de reclassement le 27 décembre 2016, elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 26 mai 2017.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
4. La salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement nul, alors « que le jugement doit être motivé ; qu'en l'espèce, en se contentant d'affirmer que "les éléments versés aux débats ne permettent pas d'établir que l'inaptitude à l'origine de la procédure de licenciement est liée à ce harcèlement", la cour d'appel, qui a statué par voie d'affirmation sans motiver sa décision ni mettre la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
6. Pour débouter la salariée de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement nul, l'arrêt retient que la salariée fait valoir que l'employeur a commis plusieurs manquements et que seul le non-respect de la prohibition du harcèlement moral est susceptible de faire produire à la demande de résiliation judiciaire les effets d'un licenciement nul. Il ajoute que la salariée a été victime d'un harcèlement moral mais que les éléments versés aux débats ne permettent pas d'établir que l'inaptitude à l'origine de la procédure de licenciement est liée à ce harcèlement moral.
7. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la salariée, qui soutenait que le harcèlement moral subi rendait impossible la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. La cassation du chef de dispositif déboutant la salariée de ses demandes de résiliation judiciaire et de paiement de diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci et non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement nul et en ce qu'il déboute Mme [S] de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 9 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ;
Condamne la société Guy Challancin aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Guy Challancin et la condamne à payer à Mme [S] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille vingt-quatre.