La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/06/2024 | FRANCE | N°52400688

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2024, 52400688


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CZ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 26 juin 2024








Rejet




Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 688 F-D


Pourvoi n° K 23-12.475








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
____

_____________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 JUIN 2024


M. [B] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-12.475 contre l'arrêt rendu le 15 décembre 2022 par la cour d'appel de Paris (p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 juin 2024

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 688 F-D

Pourvoi n° K 23-12.475

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 JUIN 2024

M. [B] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-12.475 contre l'arrêt rendu le 15 décembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant à la société Crédit industriel et commercial, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Panetta, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [F], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Crédit industriel et commercial, après débats en l'audience publique du 28 mai 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Panetta, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 2022), M. [F] a été engagé en qualité de spécialiste montages bancaires, le 3 mai 1995, par la société Crédit industriel et commercial (le CIC) et était au dernier état de la relation contractuelle, général manager de la succursale de Singapour.

2. Après avoir été convoqué, par lettre du 28 mai 2018, à un entretien préalable fixé au 11 juin suivant, il a été licencié le 19 juin 2018, pour faute non privative des indemnités de rupture.

3. Il a saisi la juridiction prud'homale pour contester cette rupture et obtenir paiement de diverses sommes.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes tendant à voir la société Crédit industriel et commercial condamnée à lui verser une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, à afficher le jugement à intervenir dans les locaux du CIC Singapour et CIC Paris sur les panneaux réservés à la communication de l'employeur, et à publier le jugement à intervenir dans le journal « Les Echos » aux frais du CIC, alors :
« 1°/ que selon l'article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; que l'employeur, au sens de ce texte, s'entend comme la personne titulaire du pouvoir disciplinaire, même si elle n'est pas le supérieur hiérarchique du salarié ; qu'en se bornant, pour écarter le moyen tiré de la prescription du fait fautif et dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, à énoncer que la charte relative à la prévention et la lutte contre le harcèlement", qui donne un rôle central au directeur des ressources humaines de la succursale de Singapour, et les différents documents signés par ce dernier l'informant de l'attribution de bonus exceptionnels, ne sauraient faire de ce directeur le représentant local de l'employeur titulaire de l'autorité de sanction à l'encontre de M. [F], qui était le représentant légal de la société CIC au sein de l'agence de Singapour et le supérieur hiérarchique du personnel en place, dont le directeur des ressources humaines, qui avait pouvoir de sanction sur les effectifs de la succursale mais non sur l'exposant, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la circonstance que le directeur des ressources humaines du CIC Singapour bénéficiait d'une délégation de pouvoirs émanant du conseil d'administration de la société CIC lui permettant d'engager ou de défendre toute procédure judiciaire ou disciplinaire résultant notamment de l'application de conventions collectives ou du règlement intérieur de l'entreprise", de prononcer contre tous les mandataires de CIC toutes les sanctions prévues par la loi et par la convention collective de la banque", et plus généralement" lui attribuant le pouvoir d'exercer toutes opérations relatives ou liées aux questions définies ci-dessus", n'était pas de nature à lui conférer le pouvoir disciplinaire à l'égard de M. [F] et, partant, la qualité d'employeur de ce dernier au sens de l'article L. 1332-4 du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;

2°/ que l'employeur, au sens de l'article L. 1332-4 du code du travail, s'entend comme la personne titulaire du pouvoir disciplinaire, même si elle n'est pas le supérieur hiérarchique du salarié ; que la cour d'appel en se fondant, pour écarter le moyen tiré de la prescription du fait fautif et dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, sur la circonstance inopérante que le directeur des ressources humaines de la succursale de Singapour n'était pas le supérieur hiérarchique de M. [F], circonstance qui n'était pas de nature à exclure sa qualité de représentant de l'employeur au sens de l'article L. 1332-4 du code du travail, a violé ce texte. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance.

6. L'employeur, au sens de ce texte, s'entend non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire mais également du supérieur hiérarchique du salarié, même non titulaire de ce pouvoir.

7. La cour d'appel, après avoir constaté que le directeur des ressources humaines du CIC Singapour, avait été contacté, vers le 28 juillet 2017, par un salarié ayant entendu des rumeurs sur le comportement inapproprié du directeur de la succursale de Singapour lors de la soirée du 7 juillet 2017, pour clarifier ces rumeurs, a d'abord rappelé, par motifs propres et adoptés, que l'employeur était celui qui disposait de l'autorité hiérarchique sur l'auteur des manquements, qui avait la qualité pour contrôler le salarié ou surveiller son activité et pas son subordonné. Elle a ensuite relevé que le directeur des ressources humaines du CIC singapourien ne répondait pas à cette définition puisqu'il n'était ni le représentant local de l'employeur, ni le supérieur hiérarchique du directeur de l'agence de Singapour, pas plus qu'il n'était titulaire de l'autorité de sanction à son encontre et que selon l'organigramme produit, il était hiérarchiquement rattaché au directeur finance & opérations qui reportait lui-même au directeur de la succursale de Singapour, lequel était le représentant légal de la société CIC au sein de cette agence et le supérieur hiérarchique du personnel en place, dont le directeur des ressources humaines qui avait certes, pouvoir de sanction sur les effectifs de la succursale, mais non sur le directeur.

8. Elle en a exactement déduit, sans avoir a procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que, quelles que fussent son ancienneté, son expérience et son intégration localement, ce cadre ne saurait être considéré comme le représentant de l'employeur à Singapour de sorte que la prescription des faits litigieux avait commencé à courir, non pas à compter du jour où des rumeurs lui avaient été rapportées, mais à compter du signalement adressé, le 15 mai 2018, par l'une des collaboratrices victimes des faits litigieux, à la direction générale du CIC.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir la société Crédit industriel et commercial condamnée à lui verser des rappels de bonus différés 2016 et 2017 et les congés payés afférents, alors :

« 1°/ que la cassation, à intervenir sur le premier moyen, de l'arrêt en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, entraînera également par voie de conséquence l'annulation du chef de la décision le déboutant de sa demande en paiement d'un rappel de bonus différé 2016 et 2017 et des congés payés afférents, en application de l'article 625 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en tout état de cause, si l'ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumis à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut pas être soumis à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle fait constaté que M. [F] avait été informé en février 2017 et mars 2018 de son éligibilité au versement de bonus, à savoir respectivement 400.000 et 450.000 dollars singapouriens pour les années 2016 et 2017, et qu'il s'était vu notifier son licenciement par courrier du 19 juin 2018, ce dont il résultait que l'exposant, qui était présent dans l'entreprise au cours des période travaillées 2016 et 2017, correspondant respectivement aux périodes d'acquisition des bonus différés 2016 et 2017, avait droit au paiement de l'intégralité de ces bonus qui lui étaient acquis, a néanmoins, pour le de bouter de ses demandes, énoncé que la partie des bonus non immédiatement versée, à savoir les deux tiers, devait être payée en trois fractions égales différées sur trois ans sous réserve de la présence toujours effective de l'intéressé dans l'entreprise et de l'inscription de sa performance dans le cadre pluriannuel fixé, mais que son licenciement n'avait pas permis qu'il soit payé des sommes restant dues, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article L. 1221-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

11. D'abord, le rejet du premier moyen rend sans portée la première branche.

12. Ensuite, la cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés que le contrat de travail du salarié ne prévoyait pas le versement d'une rémunération variable ni en son principe, ni en sa périodicité, ni en son quantum et que les bonus litigieux avaient été attribués de manière discrétionnaire par le CIC en fonction des résultats du groupe et des performances individuelles de l'intéressé, que si le salarié avait été informé de son éligibilité au versement d'un bonus au titre des années 2016 et 2017, ces bonus ne lui étaient acquis que dans les conditions suivantes : 1/3 de ces sommes serait immédiatement payé et les 2/3 restants lui seraient payés en trois fractions égales différées sur trois ans sous réserve que celui-ci soit toujours salarié du CIC aux échéances de versement fixées dans la lettre d'attribution.

13. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que le salarié qui avait cessé de travailler du fait de son licenciement, ne remplissait pas la condition de présence et ne pouvait donc percevoir la partie différée de ces bonus.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400688
Date de la décision : 26/06/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 décembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2024, pourvoi n°52400688


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400688
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award