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19/06/2024 | FRANCE | N°42400365

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 juin 2024, 42400365


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


SH






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 19 juin 2024








Rejet




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 365 F-B


Pourvoi n° N 22-23.306








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1°/ La société TM Group, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],


2°/ la société Ascagne Aj, société d'exercice libéral à...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

SH

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 juin 2024

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 365 F-B

Pourvoi n° N 22-23.306

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JUIN 2024

1°/ La société TM Group, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ la société Ascagne Aj, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de Mme [Y] [O], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société TM Group,

ont formé le pourvoi n° N 22-23.306 contre l'arrêt rendu le 26 septembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige les opposant :

1°/ à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières,

2°/ à la recette régionale de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],

3°/ à la direction générale des douanes et des droits indirects, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SAS Hannotin Avocats, avocat de la société TM Group et de la société Ascagne Aj, ès qualités, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, de la recette régionale de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières et de la direction générale des douanes et des droits indirects, après débats en l'audience publique du 7 mai 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 septembre 2022) et les productions, la société TM Group (la société TMG), représentée par Mme [O], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société, exerce une activité d'import-export de produits textiles en provenance de Chine.

2. A la suite d'un contrôle a posteriori des opérations de la société TMG, l'administration des douanes lui a notifié un procès-verbal de constat d'infractions d'importation sans déclaration de marchandises prohibées et a liquidé les droits et taxes y afférents.

3. La société TMG ne s'étant pas acquittée des sommes qui lui étaient demandées, l'administration des douanes a émis à son encontre un avis de mise en recouvrement (AMR). Sa contestation de cet avis ayant été rejetée, la société TMG a assigné l'administration des douanes en annulation de la décision de rejet et de l'AMR.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première à septième branches

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa huitième branche

Enoncé du moyen

5. La société TMG et la société Ascagne AJ, représentée par Mme [O], ès qualités, font grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de rejeter les demandes de la société TMG et de confirmer l'AMR, alors « qu'un opérateur du commerce international n'est redevable de droits en France - et l'administration des douanes peut émettre un titre exécutoire correspondant - que si l'opération d'importation litigieuse a été effectuée en France et si elle a donné lieu, ou aurait dû donner lieu, à déclaration en France ; qu'il importe peu, à cet égard, que la personne en cause ait reconnu en France, auprès de l'administration des douanes française, la commission d'une infraction ; qu'au cas présent, la société TMG soulignait dans ses écritures d'appel que ''si la société TMG effectuait des dédouanements en France, elle dédouanait également ses importations dans d'autres pays de l'Union européenne'' et rappelait que, aux termes de l'article 215 du code des douanes communautaires, dont le dispositif est repris en substance aux articles 77 à 80 et surtout 87 du code des douanes de l'Union, ''la dette douanière prend naissance au lieu où se produisent les faits qui font naître cette dette'', de sorte qu' ''il ne suffit pas à l'administration des douanes françaises de constater une prétendue infraction en France pour être fondée à recouvrer la dette douanière'' et que ''dès lors que l'administration ne serait pas capable de rattacher précisément les minorations alléguées à une importation donnée, elle serait donc en situation de réclamer une dette douanière au nom d'autorités douanières d'autres Etats membres, ce qui est bien entendu impensable'' ; que la cour d'appel a considéré que, dès lors qu'une infraction avait été établie en France, les autorités françaises seraient compétentes pour assurer le recouvrement des droits en résultant, peu important la localisation des opérations devant donner lieu à taxation : ''enfin, l'infraction d'importation sans déclaration de marchandises prohibées a été établie à partir d'éléments d'enquête recueillis en France. Il est dès lors indifférent que des importations aient pu avoir lieu par le biais d'autres Etats membres'' ; qu'en statuant ainsi par des motifs faisant totalement abstraction des règles gouvernant à la fois la localisation de la dette douanière et la répartition des compétences, entre Etats membres de l'Union européenne, pour en assurer le recouvrement, la cour d'appel a violé ces règles et principes tels qu'énoncés, en particulier, par les articles 77 à 80 et 87 du code des douanes de l'Union. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de l'article 202 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaire (le code des douanes communautaire), alors applicable, que fait naître une dette douanière à l'importation, l'introduction irrégulière dans le territoire douanier de la Communauté d'une marchandise passible de droits à l'importation. La dette douanière naît au moment de l'introduction irrégulière. Les débiteurs de la dette douairière sont la personne qui a procédé à cette introduction irrégulière ou les personnes qui ont participé à cette introduction en sachant ou en devant raisonnablement savoir qu'elle était irrégulière ainsi que celles qui ont acquis ou détenu la marchandise en cause et qui savaient ou devaient raisonnablement savoir au moment où elles ont acquis ou reçu cette marchandise qu'il s'agissait d'une marchandise introduite irrégulièrement.

7. Selon l'article 215 du même code, la dette douanière prend naissance au lieu où se produisent les faits qui font naître cette dette. Lorsqu'il n'est pas possible de déterminer ce lieu, la dette douanière est considérée comme née au lieu où les autorités douanières constatent que la marchandise se trouve dans une situation ayant fait naître une dette douanière

8. La Cour de justice de l'Union européenne juge que, lorsqu'en raison d'une infraction ou d'une irrégularité commise à l'occasion d'une opération de transit communautaire, les droits et autres impositions exigibles ne sont pas perçus, le recouvrement de ces droits et impositions est poursuivi par l'État membre où l'infraction ou l'irrégularité a été commise, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives de cet État (arrêt du 27 novembre 1984, C. Fioranvanti, Aff. 99/83).

9. La Cour de justice juge encore que la détermination du lieu où la dette douanière a pris naissance permet de désigner l'État membre compétent pour le recouvrement des droits de douanes (arrêt du 13 décembre 2007, Road Air Logistics Customs, point 26). Elle juge enfin que lors d'une hypothèse de fraude, caractérisée par la commission d'infractions ou d'irrégularités, le lieu de naissance de la dette douanière est celui de la soustraction des marchandises à la surveillance douanière par application des dispositions combinées des articles 203, paragraphe 2, et 215, paragraphe 1, du code des douanes (arrêt du 11 juillet 2002, Liberexim, C-371/99, point 52) et qu'en cas d'accomplissement, sur le territoire d'États membres différents, de plusieurs infractions ou irrégularités, l'État membre compétent pour recouvrer les droits de douane est celui sur le territoire duquel la première infraction ou irrégularité a été commise (arrêt du 3 avril 2008, Militzer & Münch, C-230/06).

10. Après avoir relevé, par motifs adoptés, que la société TMG avait eu recours à de fausses factures établies par des fournisseurs situés en France afin d'introduire dans sa comptabilité des marchandises n'ayant pas fait l'objet de déclarations en douane réalisant ainsi des importations sans déclaration, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que, compte tenu de la généralisation de ces pratiques, il n'était pas possible de rattacher une facture de complaisance à une importation en particulier, de sorte que l'ensemble des déclarations d'importation de la société TMG devaient être prises en compte. Il ajoute, qu'à supposer que des importations aient eu lieu dans d'autres Etats membres que la France, l'infraction d'importations sans déclaration de marchandises prohibées a été établie par des éléments recueillis en France.

11. De ces constatations et appréciations, dont il résulte que l'infraction d'importations sans déclaration de marchandises prohibées a été commise sur le territoire national, la cour d'appel a exactement déduit que l'administration des douanes française était fondée à retenir que la dette douanière était née en France, et à la recouvrer.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société TM Group et la société Ascagne AJ, représentée par Mme [O], ès qualités, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400365
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

UNION EUROPEENNE - Douanes - Dette douanière - Recouvrement - Compétence territoriale - Détermination - Lieu de la première infraction ou irrégularité

Dès lors que l'infraction d'importation sans déclaration de marchandises prohibées est commise sur le territoire national, l'administration des douanes est fondée à retenir que la dette douanière est née en France et à la recouvrer


Références :

Articles 202 et 215 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaires.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 26 septembre 2022

Sur la détermination du lieu où la dette douanière a pris naissance, cf : CJCE, arrêt du 27 novembre 1984, C. Fioranvanti, C-99/83 ;

CJCE, arrêt du 13 décembre, Road Air Logistics Customs BV, C-526/06 ;

CJCE, arrêt du11 juillet 2002, Liberexim, C-371/99 ;

CJCE, arrêt du 3 avril 2008, Militzer und Münch, C-230/06.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 jui. 2024, pourvoi n°42400365


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau
Avocat(s) : SAS Hannotin Avocats, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400365
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