La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2024 | FRANCE | N°12400345

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 juin 2024, 12400345


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


MY1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 19 juin 2024








Rejet




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 345 FS-B


Pourvoi n° B 23-10.972




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 19 JUIN 2024


La société [Localité 2] International Terminal (DIT), société de droit Camerounais, dont le siège est [Adresse 3] (Cameroun), a formé le pourvoi n° B 23-10.972 ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 juin 2024

Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 345 FS-B

Pourvoi n° B 23-10.972

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 19 JUIN 2024

La société [Localité 2] International Terminal (DIT), société de droit Camerounais, dont le siège est [Adresse 3] (Cameroun), a formé le pourvoi n° B 23-10.972 contre deux arrêts rendus les 10 mai 2022 et 10 janvier 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 16), dans le litige l'opposant à la société Port autonome de [Localité 2], dont le siège est [Adresse 1]), défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Tréard, conseiller, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de la société [Localité 2] International Terminal, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Port autonome de [Localité 2] (PAD), et l'avis de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mai 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Tréard, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, M. Bruyère, Mmes Peyregne-Wable, Tréard, Corneloup, conseillers, Mme Kloda, conseiller référendaire, M. Salomon, avocat général, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société [Localité 2] International Terminal du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 10 mai 2022 (RG n° 22/00144).

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 janvier 2023), par un contrat du 28 juin 2004, le Port autonome de [Localité 2] (le PAD), société anonyme ayant l'Etat camerounais pour unique actionnaire, a concédé à la société camerounaise [Localité 2] International Terminal (la société DIT) la gestion et l'exploitation d'un terminal du port de [Localité 2] (Cameroun).

3. En application de la clause compromissoire stipulée au contrat, la société DIT a introduit une procédure d'arbitrage auprès de la Chambre de commerce internationale à Paris (la « CCI »).

4. Le 14 avril 2019, le président du tribunal arbitral désigné par les co-arbitres choisis par les parties, a souscrit une déclaration d'indépendance.

5.Une sentence partielle a été rendue à Paris le 10 novembre 2020, contre laquelle le PAD a formé un recours en annulation le 14 décembre 2020.

6. L'instance s'étant poursuivie devant le même tribunal arbitral sur d'autres points restant en litige, le PAD a introduit auprès du secrétariat de la CCI le 20 avril 2021 une demande de récusation du président du tribunal arbitral, fondée sur les termes de l'hommage funèbre paru le 15 avril 2021 dans une revue juridique, qu'il venait de rendre à Emmanuel Gaillard, avocat de la société DIT, décédé le 1er avril 2021. Cette demande a été rejetée le 12 mai 2021.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

8.La société DIT fait grief à l'arrêt d'annuler la sentence partielle et de la condamner à verser une certaine somme au PAD en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors :

« 1°) que la partie qui, en connaissance de cause, s'abstient d'exercer, dans le délai prévu par le règlement d'arbitrage applicable, son droit de récusation en se fondant sur toute circonstance de nature à mettre en cause l'indépendance ou l'impartialité d'un arbitre, est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir devant le juge de l'annulation ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait après avoir constaté que le PAD « fait valoir que le président du tribunal arbitral a omis de faire un certain nombre de révélations sur des faits non notoires dans sa déclaration d'indépendance, que ce n'est qu'en prenant connaissance de l'hommage funèbre qu'il a rédigé en l'honneur d'[L] [F], conseil de la partie adverse, en avril 2021, après le décès brutal de ce dernier, que des doutes sur son impartialité sont devenus des certitudes », sans constater que le PAD, dans le délai de 30 jours imparti par le règlement d'arbitrage de la CCI applicable suivant la date à laquelle il a été informé des faits et circonstances qui l'ont ainsi fait douter de l'indépendance et de l'impartialité de l'arbitre avant la publication de l'hommage, avait exercé ou non son droit de récusation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1456, alinéa 2, 1466, 1506, 2°, 1506, 3° et 1520, 2° du code de procédure civile ;

2°) qu'au soutien de sa requête en récusation déposée auprès de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI le 20 avril 2021, le PAD faisait expressément valoir « que les Conseils du Port Autonome de [S] ont déjà tiré la sonnette d'alarme en indiquant au Professeur [A] [R] qu'il ne préside pas le Tribunal arbitral avec indépendance », que « dans une correspondance en date du 12 février 2020, les Conseils du PAD ont écrit que « Le Port Autonome de [S] regrette que le déroulement de la procédure soulève en l'état, des doutes légitimes sur l'impartialité et l'indépendance de Monsieur le Président du Tribunal arbitral, dont le comportement s'apparente à un traitement inégal des Parties ou à un manque de neutralité du Président du Tribunal, et réclame que soit rétabli l'équilibre des Parties » », que « le PAD s'est abstenu de demander sa récusation, espérant qu'il allait prendre conscience de ses responsabilités après cet échange. Hélas, il a persévéré diaboliquement dans sa démarche, à cause de ses rapports avec le Professeur [L] [F] et son équipe, que le PAD ne découvrira qu'après l'hommage du 15 avril 2021 » et que « le manque de neutralité du Professeur [A] [R] s'est poursuivi tout au long de la procédure comme on peut le découvrir dans le transcript de l'audience du 02 juillet 2020, au cours de laquelle c'est plutôt le Professeur [L] [F] et Maître [G] [U] qui orientent les débats » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris « que les doutes ainsi invoqués par la société PAD sur l'indépendance et l'impartialité de l'arbitre portent sur des faits révélés postérieurement à la sentence arbitrale, cette société ne peut être réputée avoir renoncé à s'en prévaloir durant l'instance arbitrale de telle sorte que le moyen doit être déclaré recevable devant le juge de l'annulation », quand, selon la requête en récusation, visée par l'arrêt, le PAD doutait de l'indépendance du président du tribunal arbitral à raison de prétendus liens avec les conseils de la société DIT plusieurs mois avant l'hommage du 15 avril 2021 et n'avait pas demandé sa récusation, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

9.Après avoir rappelé que le grief dont elle était saisie, tiré de la constitution irrégulière du tribunal arbitral, était soumis à l'article 1466 du code de procédure civile, la cour d'appel a relevé que la violation de l'obligation de révélation en cause, relative aux liens d'amitié unissant le président du tribunal arbitral au conseil de l'une des parties, avait été révélée le 15 avril 2021, à l'occasion de la publication de l'hommage du premier au second, ces liens n'ayant jamais été révélés auparavant.

10. Elle en a déduit que ces faits ayant été révélés postérieurement à la reddition de la sentence partielle, le PAD ne pouvait être réputé avoir renoncé à s'en prévaloir, de telle sorte que le moyen devait être déclaré recevable devant le juge de l'annulation.

11. En l'état de ces constatations et appréciation souveraines, rendant indifférente la circonstance que des faits mettant en doute l'impartialité du président dans la conduite de la procédure arbitrale, distincts de ceux révélés dans l'éloge, avaient été mentionnés dans une correspondance du 12 février 2020, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche inopérante visée par la première branche, a, sans méconnaître l'objet du litige, légalement justifié sa décision.

Sur le second moyen, pris en ses première, quatrième et cinquième branches

Enoncé du moyen

12.La société DIT fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que l'appréciation d'un défaut d'indépendance d'un arbitre procède d'une approche objective consistant à caractériser des facteurs précis et vérifiables externes à l'arbitre susceptibles d'affecter sa liberté de jugement, tels que des liens personnels, professionnels et/ou économiques avec l'une des parties ou son conseil ; qu'en se fondant sur les seules déclarations du président du tribunal arbitral tirées de l'hommage qu'il a rédigé après le décès brutal du conseil de l'une des parties, figure respectée du droit de l'arbitrage pour en déduire l'existence d'une relation personnelle étroite entre eux qu'il devait mentionner dans sa déclaration d'acceptation et d'indépendance et annuler la sentence au motif que le fait d'établir, dans cette même déclaration, un lien entre l'existence de ces liens personnels et la procédure d'arbitrage en cours qui se poursuivait entre les mêmes parties, associé à la mention qu'il le consultait avant tout choix important, constitue une circonstance de nature à laisser penser aux parties que l'arbitre pouvait ne pas être libre de son jugement et ainsi créer dans l'esprit du PAD un doute raisonnable quant à son indépendance et à son impartialité, après avoir constaté, d'une part, que ces deux professeurs de droit entretenaient des liens universitaires qui n'ont pas à être déclarés par nature et la part d'emphase et d'exagération inhérente aux hommages funèbres et, d'autre part, que l'arbitre avait précisé dans un courrier rédigé à l'attention de la CCI en 2021 qu'il n'avait pas revu le défunt seul à seul depuis 2019 et ne l'avait jamais consulté dans sa carrière sur les décisions à prendre en matière d'arbitrage, sans relever l'existence d'autres éléments précis et vérifiables externes à l'arbitre établissant la réalité et la nature de cette relation vantée dans l'hommage puis réfutée par l'arbitre et contestée par la société DIT, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1456, alinéa 2, 1506, 2° et 1520, 2° du code de procédure civile ;

4°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour conclure au rejet du moyen d'annulation tiré du défaut d'indépendance et d'impartialité du président du tribunal arbitral à raison de l'existence alléguée de liens étroits avec son conseil, la société DIT se prévalait d'un courrier de cet arbitre adressé au secrétariat de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI le 5 mai 2021, en réponse à la demande de récusation du PAD fondée sur ses déclarations tirées de l'hommage, dans lequel il admettait que ce que le PAD « présente comme établi dans son message à savoir « amitié profonde, fréquentation soutenue, consultation permanente » est une extrapolation erronée à partir de l'hommage que j'ai rendu à feu [L] [F], qui ne correspond pas à la réalité des faits » ; qu'en se fondant sur les seules déclarations de l'arbitre tirées de l'hommage rédigé après le décès brutal du conseil de l'une des parties, figure respectée du droit de l'arbitrage pour en déduire l'existence d'une relation personnelle étroite entre eux qu'il devait mentionner dans sa déclaration d'acceptation et d'indépendance et annuler la sentence, sans examiner, même sommairement, le courrier de l'arbitre au secrétariat de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI du 5 mai 2021, lequel réfutait l'existence de liens personnels étroits avec le conseil de la société DIT, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour conclure au rejet du moyen d'annulation tiré du défaut d'indépendance et d'impartialité du président du tribunal arbitral à raison de l'existence alléguée de liens étroits avec son conseil, la société DIT se prévalait de courriers des co-arbitres adressés au secrétariat de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI le 28 avril 2021, en réponse à la demande de récusation du PAD, le professeur [J] ayant insisté sur « la parfaite indépendance et impartialité dont a fait preuve le président du tribunal arbitral dans la conduite de la procédure » et M. [Z] [I] relevé n'avoir « pas de commentaire particulier sur le déroulement de cette procédure » et que son « opinion dissidente est intervenue après un débat collégial », ainsi que de l'opinion dissidente délivrée par ce dernier le 10 novembre 2020, dans laquelle il précisait que la sentence partielle « est l'aboutissement d'une procédure respectueuse des principes directeurs du procès arbitral » ; qu'en se fondant sur les seules déclarations de l'arbitre tirées de l'hommage rédigé après le décès brutal du conseil de l'une des parties, figure respectée du droit de l'arbitrage pour en déduire l'existence d'une relation personnelle étroite entre eux qu'il devait mentionner dans sa déclaration d'acceptation et d'indépendance et annuler la sentence, sans examiner, même sommairement, ni les courriers des co-arbitres au secrétariat de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI du 28 avril 2021, ni l'opinion dissidente de l'un des co-arbitres du 10 novembre 2020, lesquels écartaient toute dépendance ou partialité du président du tribunal arbitral à l'égard de quiconque, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

13. Après avoir rappelé les termes des articles 1520 et 1456, alinéa 2, du code de procédure civile, ceux de l'article 11 du règlement de la CCI (version 2017) auquel l'arbitrage en cause était soumis, ainsi que les recommandations émises par la CCI pour évaluer l'obligation de révélation pesant sur l'arbitre, l'arrêt retient qu'il ressort de ces textes que les « relations professionnelles ou personnelles étroites » de l'arbitre avec le conseil d'une partie constituent des circonstances particulières que l'arbitre doit prendre en considération au moment de sa déclaration d'indépendance et tout au long de la procédure arbitrale et qu'en dehors de ces cas caractérisant des causes objectives devant être révélées, l'arbitre est tenu de révéler les circonstances qui, bien que non visées dans cette liste, peuvent être de nature à créer, dans l'esprit des parties, un doute raisonnable sur son indépendance et son impartialité, c'est-à-dire le doute qui peut naître chez une personne placée dans la même situation et ayant accès aux mêmes éléments d'information raisonnablement accessibles.

14.Après avoir reproduit le contenu de la déclaration d'acceptation et d'indépendance faite par le président du tribunal arbitral, qui ne mentionne pas l'existence de relations particulières avec le conseil de l'une des parties, l'arrêt précise que les liens professionnels qui peuvent exister entre les avocats et les professeurs de droit, notamment dans le domaine de l'arbitrage international, et en particulier dans le milieu universitaire à un niveau doctoral et pour les jurys de thèse, n'impliquent nullement, par nature, l'existence de relations professionnelles ou personnelles « étroites » au sens des recommandations de la CCI précitées, ces relations pouvant tout au plus être qualifiées d'académiques ou de scientifiques.

15. Il retient que le président du tribunal arbitral entretenait depuis plusieurs années des relations régulières avec l'avocat d'une partie mais que les liens académiques noués entre eux n'avaient, par nature, pas à être déclarés, conformément aux principes énoncés.

16. Il relève que, dans le contexte particulier d'un éloge funèbre, la publication en cause comportait nécessairement une part d'emphase et d'exagération, de sorte que la mention finale (« Je l'admirais et je l'aimais ») ne pouvait être raisonnablement considérée comme la marque d'une aliénation de son auteur envers le professeur [F], mais devait être entendue comme l'expression d'un hommage rendu à une figure respectée du droit de l'arbitrage.

17. L'arrêt constate, en revanche, que d'autres formules de ce texte s'inscrivent dans un registre plus personnel, l'auteur affirmant qu'il consultait le professeur [F] « avant tout choix important » et que le défunt « se livrait » à lui, « lui qui le faisait peu », suggérant au lecteur l'existence d'une relation amicale dont l'intensité dépassait le registre de la sociabilité universitaire.

18. Il souligne ensuite que le texte litigieux établit une connexion entre l'existence de ces liens personnels étroits et la procédure d'arbitrage en cours, l'auteur déclarant qu'il devait y retrouver [L] [F] en qualité d'avocat et qu'il « se réjouissait d'entendre à nouveau ses redoutables plaidoiries au couteau, où la précision et la hauteur de vue séduisaient bien plus encore que n'importe quel effet de manche ».

19. L'arrêt en déduit que ces derniers éléments étaient de nature à laisser penser aux parties que le président du tribunal arbitral pouvait ne pas être libre de son jugement et ainsi créer dans l'esprit du PAD un doute raisonnable quant à l'indépendance et l'impartialité de cet arbitre, de sorte qu'ils auraient dû être révélés par lui afin de permettre aux parties d'exercer leur droit de récusation.

20. En l'état de ces seules constatations et appréciations reposant sur un fait objectif pris des termes d'une publication émanant du président du tribunal arbitral évoquant des liens personnels étroits avec l'avocat d'une partie, la cour d'appel, qui a caractérisé l'élément de nature à provoquer dans l'esprit de l'autre partie un doute raisonnable quant à l'indépendance et l'impartialité du président et qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve invoqués aux quatrième et cinquième branches, qu'elle avait décidé d'écarter, a légalement justifié sa décision.

21. Le moyen n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société [Localité 2] International Terminal aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [Localité 2] International Terminal et la condamne à payer à la société Port autonome de [Localité 2] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400345
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

ARBITRAGE

La publication émanant du président d'un tribunal arbitral, dont les termes évoquent des liens personnels étroits avec l'avocat d'une partie, constitue un fait objectif permettant de caractériser un élément de nature à provoquer dans l'esprit de l'autre partie un doute raisonnable quant à l'indépendance et l'impartialité de cet arbitre. Dès lors, justifie légalement sa décision d'annuler une sentence arbitrale sur le fondement de l'article 1520, 2°, du code de procédure civile, la cour d'appel qui, après avoir tenu compte de la part d'emphase et d'exagération propre au contexte particulier d'un éloge funèbre, relève que d'autres formules de ce texte s'inscrivent dans un registre plus personnel suggérant l'existence d'une relation amicale dont l'intensité dépassait le cadre de la sociabilité universitaire et établissent une connexion entre l'existence de ces liens personnels étroits et la procédure d'arbitrage en cours, de nature à laisser penser aux parties que le président du tribunal arbitral pouvait ne pas être libre de son jugement


Références :

Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 janvier 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 jui. 2024, pourvoi n°12400345


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune
Avocat(s) : SARL Ortscheidt, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400345
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award