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12/06/2024 | FRANCE | N°52400630

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juin 2024, 52400630


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 12 juin 2024








Cassation partielle




M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 630 F-D


Pourvoi n° N 23-11.695








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇA

IS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JUIN 2024


1°/ La société Bonyte, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],


2°/ la société MPM, société par actions s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 juin 2024

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 630 F-D

Pourvoi n° N 23-11.695

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JUIN 2024

1°/ La société Bonyte, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ la société MPM, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ la société VLD31, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° N 23-11.695 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2022 par la cour d'appel de Lyon (1e chambre civile B), dans le litige les opposant à l'association Service de santé au travail de l'Ain, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat des sociétés Bonyte, MPM et VLD31, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'association Service de santé au travail de l'Ain, après débats en l'audience publique du 15 mai 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 13 décembre 2022), les sociétés MPM, VLD31 et Bonyte (les sociétés) ont souscrit au service de santé interentreprises proposé par l'association Service de santé au travail de l'Ain (l'association).

2. Contestant le mode de calcul des cotisations, par acte d'huissier en date du 18 août 2018, les sociétés ont fait assigner l'association devant le tribunal de grande instance en restitution d'indus au titre des années 2014 à 2017.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Les sociétés font grief à l'arrêt de les débouter de l'intégralité de leurs prétentions, alors :

« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 4622-6 du code du travail dans sa rédaction, applicable au litige, issue de la loi n° 2016-925 du 16 juillet 2016, les cotisations dues par les employeurs lorsqu'ils adhèrent à un service de santé au travail interentreprises correspondent aux dépenses afférentes à ces services réparties proportionnellement au nombre de salariés ; qu'aux termes de l'article L. 1111-2 du même code, qui sont d'ordre public, les effectifs des entreprises doivent être calculés par "équivalent temps plein" ; qu'il en résulte que la cotisation doit être fixée à une somme, par salarié équivalent temps plein de l'entreprise, correspondant au montant total des dépenses engagées par le service de santé interentreprises auquel adhère l'employeur rapporté au nombre total de salariés pris en charge par l'organisme ; que seul peut être appliqué le cas échéant à ce calcul un coefficient déterminé correspondant au nombre de salariés nécessitant une surveillance médicale renforcée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour décider le contraire, a énoncé « que la disposition faisant mention du "nombre de salariés" est claire en ce qu'elle a posé pour l'établissement du calcul du montant de la cotisation le principe d'une assiette correspondant au nombre de salariés dans l'entreprise concernée sans qu'il puisse être fait référence au temps de travail effectué par les dits salariés. L'interprétation de ce texte revenant à dire que la cotisation doit être fixée à une somme par salarié équivalent à temps plein de l'entreprise ajoute manifestement à la loi » ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles L. 4622-2 dans sa rédaction applicable au litige, L. 1111-2 et L. 1111-3 du code du travail ;

2°/ que la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif ; que l'article 40-I de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 dispose que : "Sauf disposition contraire, la présente loi entre en vigueur le 31 mars 2022 ; qu'en l'espèce la cour d'appel, pour juger que la cotisation des employeurs aux services de santé au travail interentreprises devait se calculer par nombre de salariés et non en fonction des effectifs, a énoncé que : "Si ces dispositions issues de la loi du 2 août 2021 ne s'appliquent pas au présent litige, cette rédaction, destinée manifestement à remédier aux pratiques divergentes qui s'étaient instaurées au sein des SSTI (services de prévention et de santé au travail), confirme l'idée selon laquelle la volonté du législateur a toujours été d'instituer un calcul de cotisations "per capita" ; qu'en statuant de la sorte quand la loi du 2 août 2021, qui ne présentait pas un caractère interprétatif, n'avait pas vocation à s'appliquer à des cotisations appelées et réglées avant son entrée en vigueur, et qu'avant son entrée en vigueur, la volonté du législateur, telle que l'avait analysée l'administration dans une circulaire validée par le Conseil d'Etat (circulaire DGT n° 13 du 9 novembre 2012 et C.E. 30 juin 2014 ¿ n° 365071, Fédération française du bâtiment c/ ministère du travail, de l'emploi et du dialogue social) avait été que "... le coût de l'adhésion à un SSTI [fût] calculé selon l'effectif de chaque entreprise adhérente, défini selon les modalités des articles L. 1111-2 et L. 1111-3 du code du travail", la cour d'appel a derechef violé l'article L. 4622-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article 2 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 4622-6 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021, et 2 du code civil :

4. Selon l'article L. 4622-6 du code du travail, les cotisations dues par les employeurs lorsqu'ils adhèrent à un service de santé au travail interentreprises correspondent aux dépenses afférentes à ces services réparties proportionnellement au nombre de salariés.

5. Il en résulte que la cotisation doit être fixée à une somme, par salarié équivalent temps plein de l'entreprise, correspondant au montant total des dépenses engagées par le service de santé interentreprises auquel adhère l'employeur rapporté au nombre total de salariés pris en charge par l'organisme. Seul peut être appliqué le cas échéant à ce calcul un coefficient déterminé correspondant au nombre de salariés nécessitant une surveillance médicale renforcée.

6. L'article L. 1111-2 du code du travail précise le mode de calcul des effectifs de l'entreprise pour la mise en oeuvre des dispositions du code du travail.

7. Il ressort de la combinaison de ces articles que le seul mode légal de répartition des dépenses de santé entre les entreprises, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021, est la répartition par salarié équivalent temps plein.

8. L'article 40 de la loi n° 2021-1018 précitée dispose que celle-ci est entrée en vigueur le 31 mars 2022.

9. Pour débouter les sociétés de leurs demandes, l'arrêt retient que l'article L. 4622-6 dans sa version applicable en la cause faisant mention du « nombre de salariés » est claire en ce qu'elle a posé pour l'établissement du calcul du montant de la cotisation le principe d'une assiette correspondant au nombre de salariés dans l'entreprise concernée sans qu'il puisse être fait référence au temps de travail effectué par lesdits salariés, que l'interprétation de ce texte revenant à dire que la cotisation doit être fixée à une somme par salarié équivalent temps plein de l'entreprise ajoute manifestement à la loi, que l'article L. 4622-6 du code du travail dans sa version issue de la loi du 2 août 2021 retient désormais un calcul per capita, que si ces dispositions issues de la loi du 2 août 2021 ne s'appliquent pas au présent litige, cette rédaction, destinée manifestement à remédier aux pratiques divergentes qui s'étaient instaurées au sein des services de prévention et de santé au travail, confirme l'idée selon laquelle la volonté du législateur a toujours été d'instituer un calcul de cotisations per capita, qu'il en résulte ainsi que la répartition des cotisations ne pouvait se faire que per capita, c'est à dire par unité de salarié.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt déboutant les sociétés de leurs prétentions entraîne la cassation des chefs de dispositif infirmant l'ordonnance du juge de la mise en état sauf en ce qu'elle a débouté les sociétés de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dit que l'injonction prononcée par le juge de la mise en état à l'association de communiquer le montant total des dépenses engagées par elle au titre des années 2014, 2015, 2016 et 2017 et le nombre de salariés de l'ensemble des entreprises adhérentes en équivalent temps plein au titre de ces mêmes années est devenue sans objet, qui s'y rattachent par un lien d'indivisibilité et de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que les sociétés MPM, VLD31 et Bonyte sont irrecevables à se prévaloir des dispositions du règlement intérieur en ce qu'il prévoit une facturation basée sur le nombre d'examens effectués pour les entreprises à personnel mouvant, l'arrêt rendu le 13 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne l'association Service de santé au travail de l'Ain aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400630
Date de la décision : 12/06/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 13 décembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2024, pourvoi n°52400630


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400630
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