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12/06/2024 | FRANCE | N°12400341

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 juin 2024, 12400341


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


CF






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 12 juin 2024








Cassation




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 341 F-B


Pourvoi n° U 22-21.794








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2024


Mme [W] [X], domiciliée [Adresse 2], (Ile Maurice), a formé le pourvoi n° U 22-21.794 contre l'arrêt rendu le 19 août 2022 par la cour d'appel de Toulouse...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 juin 2024

Cassation

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 341 F-B

Pourvoi n° U 22-21.794

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2024

Mme [W] [X], domiciliée [Adresse 2], (Ile Maurice), a formé le pourvoi n° U 22-21.794 contre l'arrêt rendu le 19 août 2022 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 2), dans le litige l'opposant à M. [V] [D], domicilié chez Mme [Z] [D], [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Fulchiron, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [X], de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 30 avril 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Fulchiron, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse,19 août 2022), du mariage entre Mme [X] et M. [D] est issu l'enfant [R], né le 22 août 2014.

2. Un jugement mauricien du 21 juin 2018, a prononcé le divorce des époux et homologué leur accord fixant la résidence habituelle de [R] chez sa mère, à [F], et organisant les relations personnelles entre l'enfant et son père, que celui-ci réside en France ou à Maurice.

3. Par requête du 23 décembre 2019, M. [D] a saisi le tribunal de Maurice pour obtenir le transfert de la résidence habituelle de l'enfant chez lui et, subsidiairement, l'élargissement de son droit de visite et d'hébergement.

4. Par lettre du 26 mai 2020, le bureau des passeports et de l'immigration mauricien a informé M. [D] de la décision de le considérer comme « prohibited immigrant », lui imposant d'obtenir son autorisation pour tout nouveau voyage à Maurice. M. [D] a ensuite été expulsé de Maurice.

5. Par requête du 28 décembre 2020, M. [D] a saisi un juge français pour que soient modifiées les mesures relatives à l'enfant et que la résidence habituelle de celui-ci soit fixée auprès de lui.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

6. Mme [X] fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'incompétence territoriale par elle soulevée et, en conséquence, de déclarer le juge aux affaires familiales français compétent pour connaître du litige, alors « que la seule considération que du fait qu'en raison de son statut de "prohibited immigrant" lui imposant, pour se rendre sur le territoire mauricien, l'obtention d'une autorisation préalable du ministre responsable de l'immigration ou d'une personne par lui désignée, M. [D] ne bénéficiait pas de la garantie d'être en mesure de se présenter physiquement devant les juridictions de Maurice pour se soumettre à un contre-interrogatoire et que, dans l'hypothèse où M. [D] ne pourrait répondre à une convocation judiciaire en vue de s'y prêter, faute d'y avoir été autorisé par les autorités mauriciennes, il n'était pas démontré qu'une autorisation du chef juge mauricien pourrait être obtenue pour permettre à ce contre-interrogatoire de se dérouler par voie de visioconférence, ne pouvait justifier l'éviction de la compétence de la juridiction mauricienne au profit de celle de la juridiction française ; qu'en retenant que faute, ainsi, pour M. [D], d'avoir la garantie de pouvoir se livrer au contre-interrogatoire, la compétence des juridictions mauricienne ne serait pas conforme aux articles 6 § 1 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme, la cour d'appel, qui n'a nullement caractérisé l'impossibilité pour M. [D] d'accéder au juge chargé de se prononcer sur sa prétention dans des conditions répondant aux exigences du procès équitable, a, à tout le moins, privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1070 du code de procédure civile, ensemble les articles 6 § 1 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1070 du code de procédure civile et les articles 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales :

7. La juridiction française ne peut retenir sa compétence sur le fondement d'un déni de justice, lorsqu'il existe un rattachement avec la France, que si l'impossibilité pour une partie d'accéder au juge chargé de se prononcer sur sa prétention et d'exercer un droit qui relève de l'ordre public international est établie.

8. Pour rejeter l'exception d'incompétence territoriale soulevée par Mme [X] et, en conséquence, déclarer le juge aux affaires familiales français compétent pour connaître du litige, l'arrêt retient que M. [D] n'étant pas certain, compte tenu de son statut de « prohibited immigrant », de pouvoir se présenter devant les juridictions de Maurice, et la possibilité de recourir à la visioconférence n'étant pas établie, son procès devant les juridictions mauriciennes ne présenterait pas la garantie d'un procès équitable, dès lors qu'il ne serait pas assuré de pouvoir se livrer au contre-interrogatoire, ce qui le priverait de la possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne le placeraient pas dans une situation de net désavantage par rapport à Mme [X].

9. En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants pour établir que le droit de M. [D] à un procès équitable devant le juge mauricien ne serait effectivement pas garanti, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 août 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. [D] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [D] et le condamne à payer à Mme [X] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400341
Date de la décision : 12/06/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Analyses

CONFLIT DE JURIDICTIONS


Références :

Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 19 août 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 jui. 2024, pourvoi n°12400341


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Leduc et Vigand

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400341
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