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29/05/2024 | FRANCE | N°42400308

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 mai 2024, 42400308


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


HM1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 29 mai 2024








Rejet




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 308 F-D


Pourvoi n° M 22-17.141








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



r> ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 MAI 2024


Le groupement d'Intérêt Economique des commerçants du centre commercial [1], dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° M 22-17.141 contre...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

HM1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 mai 2024

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 308 F-D

Pourvoi n° M 22-17.141

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 MAI 2024

Le groupement d'Intérêt Economique des commerçants du centre commercial [1], dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° M 22-17.141 contre l'arrêt rendu le 15 mars 2022 par la cour d'appel de Rennes (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société Pull & Bear France, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat du groupement d'intérêt économique des commerçants centre commercial [1], de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Pull & Bear France, après débats en l'audience publique du 3 avril 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1.Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 mars 2022) et les productions, le 4 juillet 2012, la société Shd-Immo a donné à bail à la société Pull & Bear France (la société Pull & Bear), qui appartient à l'unité économique et sociale (l'UES) Inditex, un local situé dans le centre commercial Atlantis à Saint-Herblain.

2. Par l'effet de ce bail, la société Pull & Bear a adhéré au groupement d'intérêt économique des commerçants du centre commercial [1] (le GIE).

3. Une délibération de l'assemblée générale du GIE a fixé l'horaire d'ouverture du centre commercial et des magasins qui y sont implantés à 9 heures ou 9 heures 30 et l'horaire de fermeture à 21 heures, et a prévu qu'en cas de non respect de ces horaires, le contrevenant s'exposait à une pénalité.

4. A partir de l'année 2016, la société Pull & Bear a fermé son magasin à 20 heures 30 pendant la période d'hiver.

5. Le 25 octobre 2017, le GIE a assigné la société Pull & Bear afin qu'il lui soit enjoint de respecter l'horaire de fermeture du centre commercial prévu par ses statuts et son règlement intérieur et qu'elle soit condamnée à lui payer une somme au titre des pénalités dues pour non-respect de l'horaire de fermeture. La société Pull & Bear a soutenu en défense que la délibération votée par le GIE était illicite en raison de sa contrariété avec les dispositions légales d'ordre public encadrant le travail de nuit.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le GIE fait grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble de ses demande et de la condamner aux dépens et à payer à la société Pull & Bear la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que selon l'article L. 3122-29 du code du travail dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et les articles L. 3122-2 et L. 3122-20 du code du travail dans leur rédaction issue de la loi précitée, le travail de nuit est défini, en l'absence de convention ou d'accord collectif, comme le travail accompli entre 21 heures et 6 heures, un accord de branche ou un accord d'entreprise ou d'établissement pouvant substituer à cette définition légale une autre période débutant au plus tôt à 21 heures et se terminant au plus tard à 7 heures, d'au moins neuf heures consécutives et comprenant l'intervalle entre minuit et 5 heures ; que, selon l'article L. 3122-29 du code du travail dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et l'article L. 3122-22 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi précitée, à défaut d'accord définissant la période de travail de nuit, l'inspecteur du travail peut autoriser la définition d'une période différente de la définition légale dans les limites précitées ; qu'il en résulte qu'une entreprise peut, par accord collectif ou avec l'autorisation de l'inspecteur du travail, reporter l'heure de début de travail de nuit à 21 heures 30 ou 22 heures et ainsi faire travailler ses salariés, de manière habituelle, jusqu'à 21 heures 30 ou 22 heures ; qu'en l'espèce, le GIE soutenait que la société Pull & Bear avait la faculté, pour respecter les horaires d'ouverture des magasins de la galerie commerciale fixés par l'assemblée générale et maintenir son magasin du centre Atlantis ouvert jusqu'à 21 heures toute l'année, d'adopter une autre définition du travail de nuit que celle fixée par la loi et que l'accord collectif conclu le 29 décembre 2015 par l'UES Inditex à laquelle la société Pull & Bear appartient avait ainsi adapté la définition du travail de nuit, en reportant le début du travail de nuit à 21 h 30, mais uniquement pendant la période correspondant à l'heure d'été, de manière à permettre aux magasins de fermer à 21 heures pendant cette période ; qu'en retenant néanmoins, pour juger que la société Pull & Bear ne saurait être tenue de se conformer aux décisions de l'assemblée générale du GIE et de fermer son magasin du centre commercial Atlantis à 21 heures, que le travail de nuit est défini à l'article L. 3122-20 comme le travail accompli entre 21 heures et 6 heures, que les dispositions légales d'ordre public qui encadrent le travail de nuit ne permettent aux partenaires sociaux de conclure des accords d'entreprise ou de branche pour organiser le recours au travail de nuit, en dehors des zones touristiques internationales, qu'à la condition que le travail de nuit reste exceptionnel et soit "justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale", que l'activité de vente de vêtements ne relève pas d'un service d'utilité sociale, la prolongation de cette activité jusqu'à 21 heures ne paraissant pas non plus nécessaire pour assurer la continuité de l'activité économique, et qu'étendre aux douze mois de l'année l'ouverture des magasins jusqu'à 21 heures, que l'UES Inditex avait réussi à négocier avec les partenaires sociaux pour la seule "période de l'année qui correspond au plus grand flux de clientèle", serait "contraire à la loi" et exposerait la société Pull & Bear à des poursuites individuelles ou collectives, voire même pénales, la cour d'appel a violé les articles précités du code du travail et l'accord collectif du 29 décembre 2015. »

Réponse de la Cour

7. En premier lieu, selon l'article L. 3122-32, devenu l'article L. 3122-1, du code du travail, interprété à la lumière de la directive 93/104 du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, le recours au travail de nuit est exceptionnel. Il prend en compte les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et est justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale.

8. Il en résulte que le travail de nuit ne peut pas être le mode d'organisation normal du travail au sein d'une entreprise et ne doit être mis en oeuvre que lorsqu'il est indispensable à son fonctionnement.

9. En second lieu, il résulte de l'article L. 3122-29 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et des articles L. 3122-15, L. 3122-20 et L. 3122-22 de ce code, dans leur rédaction issue de cette loi, applicables au litige, qu'une période de travail de nuit différente de la période légale comprise entre 21 heures et 6 heures ne peut valablement être fixée par un accord collectif organisant le recours au travail de nuit ou être autorisée par l'inspecteur du travail que si l'entreprise est en droit de recourir au travail de nuit.

10. Après avoir exactement énoncé que le recours au travail de nuit doit être exceptionnel et justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale, l'arrêt retient que l'activité de vente de vêtements de la société Pull & Bear ne relève pas d'un service d'utilité sociale et que la prolongation de cette activité au-delà de 21 heures, y compris de ses tâches ultimes d'arrêté de caisses et de rangement du magasin avant sa fermeture effective, n'est pas nécessaire pour assurer la continuité de l'activité économique, de sorte que cette société n'est pas tenue de se conformer aux décisions de l'assemblée générale du GIE qui sont d'une valeur moindre dans l'échelle de la hiérarchie des normes.

11. La cour d'appel a exactement déduit de ces énonciations, constatations et appréciations que le recours au travail de nuit pendant la période d'hiver en litige n'était pas indispensable au fonctionnement de la société Pull & Bear, ce dont il résulte qu'une période de travail de nuit différente de la période légale ne pouvait ni être fixée par un accord collectif organisant le recours au travail de nuit ni être autorisée par l'inspecteur du travail.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le groupement d'intérêt économique des commerçants du centre commercial [1] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le groupement d'intérêt économique des commerçants du centre commercial [1] et le condamne à payer à la société Pull & Bear France la somme de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400308
Date de la décision : 29/05/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 15 mars 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 mai. 2024, pourvoi n°42400308


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400308
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