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16/05/2024 | FRANCE | N°22400428

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 mai 2024, 22400428


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 2


LM






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 16 mai 2024








Rejet




Mme MARTINEL, président






Arrêt n° 428 F-B


Pourvoi n° N 22-13.692


Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [R].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 2 juin 2022.








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MAI 2024


...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 mai 2024

Rejet

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 428 F-B

Pourvoi n° N 22-13.692

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [R].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 2 juin 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MAI 2024

1°/ la société [9], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1] (Principauté de Monaco),

2°/ la société [4], société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° 22-13.692 contre l'arrêt rendu le 21 janvier 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-8), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme [Z] [R], veuve [T], domiciliée [Adresse 6], prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [L] [T] et représentant ses enfants mineurs [N] [T], né le 22 octobre 2007, et [C] [T], né le 15 mars 2010, tous deux en qualité d'ayants droit de [L] [T],

2°/ à la société [5], société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ à Mme [E] [T], domiciliée [Adresse 6], devenue majeure en cours d'instance, prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [L] [T],

défenderesses à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [9] et de la société [4], de la SARL Cabinet Briard, avocat de Mme [R] veuve [T], prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [L] [T] et représentant ses enfants mineurs, [N] [T] et [C] [T], tous deux en qualité d'ayants droit de [L] [T], et de Mme [E] [T], prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [L] [T], et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 mars 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à la société [9] et à la société [4] de la reprise d'instance à l'encontre de Mme [E] [T], devenue majeure en cours d'instance, prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [L] [T].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 janvier 2022), [L] [T], de nationalité française, employé par la société de droit monégasque [9] (l'employeur), assurée auprès de la société [4] pour son éventuelle faute inexcusable (l'assureur), et affilié à la caisse de compensation des services sociaux monégasque, a été victime le 24 avril 2018 d'un accident mortel du travail alors qu'il se trouvait détaché pour une durée de moins de trois mois sur un chantier à [Localité 8].

3. Ses ayants droit ont saisi une juridiction française chargée du contentieux de la sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

4. L'employeur a contesté la compétence de la juridiction française.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. L'employeur et son assureur font grief à l'arrêt de dire que les juridictions françaises sont internationalement compétentes et de déclarer le tribunal judiciaire spécialement désigné par l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire compétent, alors « que selon l'article 40 de la convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco, toutes les contestations relatives à l'application du régime de sécurité sociale monégasque sur le territoire français relèvent des organismes compétents, aux termes de la législation monégasque dans les mêmes conditions que si le litige était né sur le territoire de la Principauté ; qu'il résulte de ce texte que lorsque la loi ou la réglementation de sécurité sociale applicable au litige est celle de la Principauté de Monaco, le litige relève de la compétences des autorités administratives et juridictions monégasques ; que, selon l'article 3 de cette même convention, les travailleurs français ou monégasques salariés ou assimilés aux salariés par les législations applicables dans chacun des pays contractants, occupés dans l'un de ces pays, sont soumis aux législations en vigueur au lieu de leur travail et que les travailleurs salariés ou assimilés, habituellement occupés dans le premier pays par une entreprise ayant dans ce pays un établissement dont les intéressés relèvent normalement et qui sont temporairement occupés dans le deuxième pays, demeurent soumis aux législations en vigueur dans le premier pays, pour autant que la durée probable de leur occupation sur le territoire du deuxième pays n'excède pas six mois ; qu'il résulte de ce texte que le travailleur français qui travaille habituellement sur le territoire de Monaco pour le compte d'une société établie sur ce même territoire est soumis à la législation de sécurité sociale monégasque ; qu'au cas présent, il résulte des constatations de l'arrêt que M. [T] travaillait, au moment de son accident mortel du travail, pour le compte de la société [9], établie à [Localité 7], qu'il était versé aux débats la demande d'autorisation d'embauchage et de permis de travail auprès de la caisse de compensation des services sociaux de [Localité 7] et qu'il ne résultait d'aucune pièce que la victime exerçait habituellement son travail en France ; qu'il résultait de ces constatations que le litige était relatif à l'application de la législation monégasque sur les accidents du travail et relevait donc de la seule compétence de la juridiction monégasque ; que, pour considérer que l'épouse de M. [T] était bien fondée à invoquer sa nationalité française et celle de son époux pour se prévaloir de la compétence des juridictions françaises en application de l'article 14 du code civil, la cour d'appel a énoncé que la convention du 28 février 1952 s'applique aux seules législations afférentes aux accidents du travail et à leurs réparations et est muette sur la juridiction compétente ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 3 et 40 de la convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco et, par fausse application, l'article 14 du code civil. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article 14 du code civil, l'étranger, même non résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux français, pour l'exécution des obligations par lui contractées en France avec un français ; il pourra être traduit devant les tribunaux de France, pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des français.

7. Il résulte de ce texte que la compétence des juridictions françaises ne peut être écartée, en l'absence de renonciation de la partie qui en est bénéficiaire, que par l'application d'une convention internationale ou d'un règlement de l'Union européenne.

8. Selon l'article 3 de la Convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco sur la sécurité sociale, les travailleurs français ou monégasques salariés ou assimilés aux salariés par les législations applicables dans chacun des pays contractants, occupés dans l'un de ces pays, sont soumis aux législations en vigueur au lieu de leur travail. Par exception, les travailleurs salariés ou assimilés, habituellement occupés dans le premier pays par une entreprise ayant dans ce pays un établissement dont les intéressés relèvent normalement et qui sont temporairement occupés dans le deuxième pays, demeurent soumis aux législations en vigueur dans le premier pays, pour autant que la durée probable de leur occupation sur le territoire du deuxième pays n'excède pas six mois.

9. Aux termes de l'article 40 de la Convention du 28 février 1952 précitée, toutes les contestations relatives à l'application du régime français de sécurité sociale sur le territoire monégasque relèvent des organismes et juridictions compétents aux termes de la législation française dans les mêmes conditions que si le litige était né dans le département des Alpes-Maritimes. Toutes les contestations relatives à l'application du régime monégasque de sécurité sociale sur le territoire français relèvent des organismes compétents, aux termes de la législation monégasque, dans les mêmes conditions que si le litige était né sur le territoire de la Principauté.

10. Ayant relevé que, s'agissant des contestations relatives à l'application du régime monégasque de sécurité sociale sur le territoire français, cette convention demeurait muette sur la juridiction compétente, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'en l'absence de toute clause attributive de juridiction, alors que la demande portait sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur d'une victime de nationalité française, décédée en France au temps et au lieu de travail, dont les ayants droit sont de nationalité française, les juridictions françaises étaient internationalement compétentes pour en connaître.

11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Condamne la société [9] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [9] et la société [4] et les condamne à payer à la SARL Cabinet Briard, avocat de Mme [R] veuve [T], tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [L] [T] et représentant ses enfants mineurs, [N] [T] et [C] [T], tous deux en qualité d'ayants droit de [L] [T], et de Mme [E] [T], prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [L] [T], bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 22400428
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX


Références :

Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix en Provence, 21 janvier 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 16 mai. 2024, pourvoi n°22400428


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SARL Cabinet Briard

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:22400428
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