LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 avril 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 354 F-D
Pourvoi n° P 22-11.278
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 AVRIL 2024
La caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 22-11.278 contre l'arrêt rendu le 1er décembre 2021 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. [M] [S], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Montfort, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, de Me Balat, avocat de M. [S], et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 5 mars 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Montfort, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 1er décembre 2021), la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault (la caisse) a notifié le refus de prise en charge de ses soins effectués en France à M. [S] (l'assuré), de nationalité française résidant en Suisse et titulaire de pensions de retraite attribuées par les régimes de sécurité sociale français et suisse.
2. L'assuré a saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La caisse fait grief à l'arrêt de la condamner à prendre en charge les prestations litigieuses, alors « que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que dans ses conclusions d'appel, la caisse avait soutenu que le statut de retraité de l'assuré, français résidant en Suisse, ne lui permettait pas de solliciter l'exemption de l'assurance maladie suisse, les dispositions prévues par l'accord franco-suisse du 7 juillet 2016 ne s'appliquant qu'aux seuls travailleurs frontaliers ; qu'en considérant que l'assuré justifiait d'une exception à l'obligation d'assurance en Suisse, de sorte qu'il pouvait prétendre au bénéfice de l'article 24 du règlement (CE) n° 883/2004 du parlement européen et du conseil du 29 avril 2004 lui permettant d'être affilié au régime général de sécurité sociale français et de bénéficier de la prise en charge des prestations en nature par la caisse, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
5. Pour condamner la caisse à prendre en charge les prestations litigieuses, l'arrêt constate que l'état de santé et l'âge de l'assuré nécessitaient un suivi médical, que ce dernier disposait d'une carte européenne d'assurance maladie et de formulaires attestant de la dispense d'une assurance maladie en Suisse et que des cotisations et contributions sociales étaient prélevées sur la pension de retraite versée par l'organisme de sécurité sociale français. Il en déduit qu'en application de l'article 24 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, il pouvait être affilié au régime général de sécurité sociale français et bénéficier de la prise en charge des prestations en nature par la caisse.
6. En se statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la caisse faisant valoir, sur le fondement de l'accord franco-suisse du 7 juillet 2016, que le ressortissant français, titulaire de pensions de retraite en France et en Suisse et résident en Suisse, ne peut bénéficier de l'exemption réservée aux seuls travailleurs frontaliers à l'obligation de s'affilier auprès de l'assurance maladie suisse, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de l'assuré, l'arrêt rendu le 1er décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. [S] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [S] et le condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille vingt-quatre.